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12 novembre 2022 6 12 /11 /novembre /2022 09:00

Au musée d'Orsay, une des grandes expositions de la saison, au titre un peu grandiloquent, retrace l'œuvre du peintre et graveur norvégien Edvard Munch (1863-1944), qui peut être considéré a posteriori comme le pionnier de l'expressionnisme dans la peinture moderne.

Nous proposons au lecteur d'en partager le très beau parcours au long de deux billets.

De l'intime au symbole

«Nous voulons autre chose que la simple photographie de la nature. Nous ne voulons pas non plus peindre de jolis tableaux à accrocher aux murs du salon. Nous voudrions un art qui nous prend et nous émeut, un art qui naîtrait du cœur.» (Journal, 1889). Edvard Munch est initié dès l'enfance au dessin et à la peinture par sa tante Karen Bjølstad, qui l'élève depuis le décès prématuré de sa mère. À l'âge de dix-sept ans, il entre au Collège royal de dessin de Kristiana (actuelle Oslo) mais ne suit pas de formation artistique à proprement parler, la Norvège n'étant pas pourvue d'une véritable académie. En 1885, il séjourne à Paris une première fois grâce à l'aide financière du peintre Frits Thaulow. Il visite les musées français et découvre les œuvres des artistes naturalistes mais également celles des impressionnistes qui faisaient alors scandale en France. Il leur emprunte notamment leur facture rapide et leur traitement libre des couleurs. Munch se détourne cependant très rapidement de la peinture de paysage pour peindre des portraits sensibles de ses proches, principalement ses sœurs Inger et Laura, ou ses amis de la bohème de Kristiania. Au tournant des années 1890, la dimension symbolique de ces scènes intimes devient déterminante, apportant à son œuvre toute sa singularité.

Hans Jaeger, 1889, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Inger en noir et violet, 1892, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Nuit d'été. Inger sur la plage, 1889, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Heure du soir, 1888, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Autoportrait à la cigarette, 1895, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Explorer l'âme humaine

"On ne doit plus peindre d'intérieurs, de gens qui lisent et de femmes qui tricotent. Ce doit être des personnes vivantes qui respirent et s'émeuvent, souffrent et aiment. Je vais peindre une série de tableaux de ce genre - Les gens en comprendront la dimension sacrée et ils enlèveront leur chapeau comme à l'église. » (Carnet de notes, 1889-1890)
Les trois œuvres de cette salle annoncent le sujet central de l'œuvre de Munch pour plusieurs décennies : l'exploration et l'expression des grands mouvements de l'âme - l'amour, l'angoisse, le doute existentiel. Il revient ainsi sa vie durant, de façon quasi obsessionnelle, sur un petit nombre de thèmes dont il transforme sans cesse le sens. Puberté occupe une place à part : elle débute un questionnement majeur sur le passage entre deux âges sur cet état d'instabilité caractéristique des moments déterminants de la vie. Dans Désespoir, le peintre livre avec une intensité rare l'une des clés de compréhension de son œuvre : la projection du sentiment humain sur la nature environnante. Enfin, dans L'Enfant malade, écho à la mort précoce de sa sœur aînée, il affirme la vocation universelle de ses œuvres, qui dépassent  par leur force l'évocation d'un événement personnel.

Puberté, 1894-1895, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Désespoir. Humeur malade au coucher de soleil, 1892, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

L'Enfant malade, 1896, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

La Frise de la vie

« La frise de la vie a été pensée comme une série cohérente de tableaux, qui doivent donner un aperçu de la vie. J'ai ressenti cette fresque comme un poème de vie, d'amour, de mort... ». (La Frise de la vie, 1919)
Les premières présentations publiques des œuvres de Munch suscitent critique ou étonnement. Soucieux de se faire comprendre, le peintre invente une nouvelle manière de présenter son art pour en souligner la cohérence. Il regroupe ainsi ses principaux motifs dans un vaste projet qu'il finit par intituler La Frise de la vie. Initiée au cours des années 1890, cette série de tableaux fait l'objet de plusieurs grandes expositions. Celle de Berlin en 1902 est un jalon important: pour la première fois, Munch pense l'accrochage de ses œuvres comme un véritable discours, insistant sur le cycle perpétuel de la vie et de mort. Ce projet est si crucial à ses yeux qu'il pourrait résumer l'essentiel de sa carrière. Il travaille tout au long de sa vie sur les toiles qui le composent et en explore les possibilités. Dans les années 1900 et 1910, il se tourne par ailleurs vers des projets liés au théâtre ou au décor architectural dans lesquels il intègre certains thèmes de La Frise de la vie.

Croquis de la frise de la vie (1917-1924), aquarelle et crayon sur papier vélin.

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Vampire, 1895, huile sur toile
Vampire II, 1895-1902, lithographie et gravure sur bois
Vampire dans la forêt, 1924-1925, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)
Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)
Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Rouge et blanc, 1899-1900, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Danse sur la plage, 1899-1900, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Soirée sur l'avenue Karl Johan, 1892, huile sur toile
Angoisse, 1896, gravure sur bois, rehauts d'aquarelle

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)
Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Près du lit de mort, 1895, huile et détrempe sur toile
La Lutte contre la mort, 1915, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)
Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Métabolisme. La vie et la mort, 1898-1899, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Nuit fraîche sur l'avenue, 1906, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Enfants jouant dans une rue d'Asgårdstrand, 1901-1903, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Nuit d'été à Asgårdstrand, 1904, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Les Jeunes Filles sur le pont, 1927, huile sur toile
Les Dames sur le pont, 1934-1940, huile sur toile

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)
Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Les vagues de l'amour

« J'ai symbolisé la communication entre les êtres séparés à l'aide de longs cheveux ondoyants. La longue chevelure est une sorte de fil téléphonique.» (Projet de lettre à Jens Thiis, vers 1933-1940)
Parallèlement à ses peintures, Munch décline les motifs de La Frise de la vie dans de nombreux dessins et gravures. Il commence à les exposer comme ses toiles, les intégrant pleinement à son discours, dès 1897 à Kristiania ou en 1902 à Berlin. Cette salle est organisée autour du lien, sentimental ou spirituel, qui unit les êtres humains entre eux ; Munch le symbolise par la chevelure de la femme, qui relie, attache ou sépare. Ce motif matérialise les relations entre les personnages et rend visibles leurs émotions. Dans ses évocations du sentiment amoureux, l'artiste projette une vision complexe et toujours ambigüe de la femme. Les figures sensuelles sont toujours chez Munch une source de danger ou de souffrance potentielle. Alors qu'il fait de sa Madone une icône, un sujet de dévotion, il l'associe pourtant souvent au macabre.

Métabolisme. La vie et la mort, 1898-1904, crayon et aquarelle sur papier vélin.

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Séparation I, 1896, lithographie

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Séparation II, 1896, lithographie

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Madone, 1895-1896, lithographie, rehauts de gouache et d'aquarelle

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Madone, 1894, pointe sèche et brunissoir

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Femme rousse aux yeux verts. Le Péché, 1902, lithographie (crayon et grattoir)

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

La Broche. Eva Mudocci, 1903, lithographie

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Sur les vagues de l'amour, 1896, lithographie, rehauts d'aquarelle et de pastel

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Salomé, 1903, lithographie (crayon et grattoir)

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Les Mains, 1895, lithographie

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

L'Allée, 1895, lithographie

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Jalousie II, 1896,  lithographie (crayon et grattoir), rehauts de gouache et d'aquarelle
 

Edvard Munch. Un poème de vie, d'amour et de mort (I/II)

Nous poursuivrons comme annoncé le parcours de cette exposition dans un prochain billet.

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