Nous avons, comme souvent à l'occasion des journées européennes du patrimoine, découvert deux lieux originaux que nos lecteurs auront peut-être plaisir à découvrir.
Le samedi, excursion dans la vallée de Chevreuse jusqu'à Villiers-le-Bâcle, qui abrite la maison-atelier du peintre Léonard Foujita (1886-1968).
C'est en 1959 que le peintre japonais Yasse Tabuchi fait découvrir à son ami Léonard Foujita une petite maison rurale, située au 7 rue de Gif, à l'époque unique rue du village. Datant du XVIIIe siècle, la modeste bâtisse comprend deux logements mitoyens destinés aux ouvriers agricoles. Quasiment en ruine, elle est bâtie sur un terrain en pente et arboré, offrant une vue imprenable sur la vallée. Séduit par le lieu propice à sa créativité, l'artiste en fait l'acquisition en 1960 et y entame d'importants travaux qui dureront près d'une année. Si depuis la rue rien ne distingue cette maison des autres, la façade côté jardin, a été totalement ouverte sur le paysage et de larges ouvertures révèlent les trois niveaux de la maison. L'étage d'habitation initial, pourvu d'une salle avec cheminée et d'une chambre, devient un lieu de vie comprenant une vaste entrée donnant sur la rue, un salon qui s'ouvre largement sur la chambre et une salle de bain. Les combles sont aménagés en atelier, tandis que la cave est judicieusement transformée en cuisine et en salle à manger. Tous ces travaux ont été réalisés par des artisans locaux, guidés par Foujita qui suit attentivement le chantier. En 1991, Kimiyo Foujita, sa veuve, a fait don de ce lieu de mémoire au Conseil Départemental de l'Essonne. Depuis septembre 2011 ce lieu incontournable de Villiers-le- Bâcle, protégé au titre des monuments historiques, détient le label « Maisons des illustres » décerné par le ministère de la Culture et de la Communication.
De l'extérieur :
La maison, sur le parc :
L'intérieur a été conservé très soigneusement dans l'état où le peintre l'avait aménagé, avec ses objets quotidiens et de nombreux objets, chinés ou confectionnés par Foujita
Quelques œuvres ou ouvrages de la main de l'artiste...
Dans le jardin, des ateliers accueillent les enfants
Dans un pavillon attenant, des souvenirs de Foujita et une évocation de la vie très riche de l'artiste, depuis le Montparnasse des années folles où il arriva en 1913, eut pour amis et confrères Picasso, Modigliani et bien d'autres, jusqu'à la fin de sa vie où, naturalisé français en 1955, converti au catholicisme en 1959, il décora une chapelle à Reims. Marié quatre fois (à trois françaises puis à la japonaise Kimiyo), il passa le plus clair de sa vie en France, avec une parenthèse pendant la deuxième guerre mondiale au Japon.
Avant de conclure ce premier volet, une vue de de la petite église Notre-Dame-de-l'Assomption de Villiers-le-Bâcle, près de laquelle se trouve la pierre tombale de Foujita (dont la dépouille a été transférée à Reims en 2003 dans la chapelle qu'il y a décorée, et où les cendres de son épouse Kimiyo décédée au Japon l'ont rejointe)...
...et quelques toiles de Foujita photographiées dans d'autres musées :
Mon intérieur, Paris ou Nature morte au réveille-matin, 1921, huile sur toile collée sur panneau de bois parqueté
(Musée national d'art moderne, Centre Pompidou, Paris)
Nu couché à la toile de Jouy, 1922, huile, encre, fusain et crayon sur toile
(Musée d'art moderne de la Ville de Paris)
Intérieur d'un café, 1958, huile sur toile
(Musée Carnavalet - Histoire de Paris)
Le dimanche, excursion au Vésinet pour visiter la Villa Berthe, construite en 1896 par Hector Guimard.
La façade sud (côté rue) :
Quelques détails
L'entrée principale, située sur la façade latérale droite (est) :
Cette entrée donne sur un escalier qui dessert tous les étages
La façade arrière (nord) et détails
Dans le jardin, une jolie fontaine pas très "guimardienne"...
Des élévations des quatre façades, issues du site très bien fait de la villa :
En guise de conclusion, quelque images de l'immeuble d'habitation parisien "Castel Béranger", construit de 1894 à 1898 rue La Fontaine à Paris par le jeune Hector Guimard (1867-1942), soit à la même époque que la Villa Berthe.
Exposition originale au musée du Louvre : à l'occasion de la rénovation du musée napolitain de Capodimonte, qui nécessite sa fermeture temporaire, le Louvre accueille un grand nombre de ses œuvres, en trois endroits du musée.
Premier accrochage, prestigieux, dans la Grande Galerie de l'Aile Denon :
Chefs d’œuvre
de la peinture italienne
Dans cette galerie proche de la salle où est exposée la Joconde, les peintures du musée de Capodimonte dialoguent avec celles du Louvre : la réunion des deux collections offre un aperçu exceptionnel de la peinture italienne du 15e au 17e siècle.
Tommaso di ser Giovanni di Mone Cassai, dit MASACCIO
(San Giovanni Valdarno, 1401-Rome, 1428) Crucifixion
Tempera et or sur panneau, 1426
Tommaso di Cristoforo Fini dit Masolino DA PANICALE
(Panicale, 1383- Florence, 1440) La Fondation de Sainte-Marie-Majeure
Tempera et or sur panneau, 1427-1429 L'Assomption de la Vierge
Tempera et or sur panneau, 1427-1429
Giovanni BELLINI
(Venise, vers 1430-1516) La Transfiguration
Huile sur panneau, vers 1478-1479
COLANTONIO
(Actif à Naples vers 1440-1470) Retable de saint Vincent Ferrier
Huile sur panneau, 1456-1458
et détails des panneaux du bas
Saint Jérôme dans son cabinet
Huile sur panneau, 1444-1450
Attribué à Jacopo DE' BARBARI
(Venise, 1475-?, vers 1516) Portrait de Luca Pacioli avec un élève
Huile sur panneau, 1495
Lorenzo LOTTO
(Venise, vers 1480-Lorette, 1556) Portrait de Bernardo de' Rossi, évêque de Trévise
Huile sur panneau, 1505
Girolamo Mazzola BEDOLI
(Viadana, vers 1500-Parme, 1569) L'Annonciation
Huile sur toile, 1555-1560
Francesco Mazzola, dit PARMESAN
(Parme, 1503-Casalmaggiore, 1540) Portrait de Galeazzo Sanvitale
Huile sur toile, 1524 Portrait de jeune femme, dite Antea
Huile sur tolte, vers 1535 Lucrèce
Huile sur toile, 1540
Tiziano Vecellio, dit TITIEN
(Pieve di Cadore 1488/90-Venise 1576) Danaé
Huile sur toile, 1544-1545
Giovanni Battista di Jacopo, dit Rosso FIORENTINO
(Florence, 1494 - Paris, 1540) Portrait de jeune homme (peut-être Giampaolo dell' Anguillara da Cerveteri)
Huile sur panneau, 1524-1526
Sebastiano Luciani, dit Sebastiano DEL PIOMBO
(Venise 1485- Rome 1547) Portrait du pape Clément VII de Médicis sans barbe
Huile sur toile, vers 1526
Michelangelo Merisi da Caravaggio, dit CARAVAGE
(Milan, 1571 - Porto Ercole, 1610) La Flagellation
Huile sur toile, 1607
Illustrons une fois le principe de l'accrochage en montrant en regard une œuvre du Caravage appartenant aux collections permanentes du Louvre : La Diseuse de bonne aventure
Huile sur toile, vers 1595-1598
Guido RENI
(Bologne, 1575-1642) Atalante et Hippomène
Huile sur toile, vers 1615-1618
Annibal CARRACHE
(Bologne, 1560 - Rome, 1609) Hercule à la croisée des chemins
Huile sur toile, 1598 Pietà
Huile sur toile, 1599-1600
Artemisia GENTILESCHI
(Rome, 1593-Naples, 1652-1653) Judith décapitant Holopherne
Huile sur toile, vers 1612-1617
Lionello SPADA
(Bologne, 1576-Parme, 1622) Cain et Abel
Huile sur toile, vers 1612-1614
Jusepe DE RIBERA
(Játiva, 1591-Naples 1652) Silène ivre
Huile sur toile, 1626 Saint Jérôme et l'ange du Jugement
Huile sur toile, 1626 Apollon et Marsyas
Huile sur toile, signé daté 1637
Luca GIORDANO
(Naples, 1634-1705) Apollon et Marsyas
Huile sur toile, vers 1660 Notre-Dame du Rosaire ou La Madone au baldaquin
Huile sur toile, vers 1685
Abraham BRUEGHEL
(Anvers, 1631-Naples, 1697)
Giuseppe RUOPPOLO
(Naples, 1630 ?-1710) Nature morte avec fruits et fleurs
Huile sur toile, 1680-1685
Giuseppe RECCO
(Naples, 1634-Alicante, 1695) Nature morte avec poissons et autres créatures marines
Huile sur toile, 1671
Francesco GUARINO
(Sant'Agata Irpina, 1611- Solofra, 1654) Sainte Agathe
Huile sur toile, vers 1637-1640
et les deux derniers tableaux exposés à la Grande Galerie :
Mattia PRETI
(Taverna, 1613 - La Vallette, 1699) Saint Nicolas en extase
Huile sur toile, 1653 Saint Sébastien
Huile sur toile, vers 1656
Une des trois partie de cette exposition disséminée dans le Louvre est située dans la Salle de l’Horloge de l'aile Sully et intitulée
Cartons italiens de la Renaissance, 1500 – 1550
Elle se prête mal à la photographie, et nous n'en donnons qu'un aperçu, avec :
Giulio Pippi, dit GIULIO ROMANO
(Rome, vers 1492/1499 - Mantoue, 1546) Bacchantes, faune, petit satyre et putto dansant
Plume et encre brune, lavis brun, sur deux feuillets de papier beige collés ensemble. Traces d'une mise au carreau (?) à la pierre noire. Piqué pour le report et passé à la ponce avec de la poussière noirâtre.
Carton pour une composition de la frise de la Sala delle Metamorphosi ou
Sala d'Ovidio au Palazzo Te à Mantoue (1527) exécutée, non par Giulio Romano, mais par ses collaborateurs Anselmo Guazzi et Agostino da Mozzanica.
Au passage, un bleau tableau de RAPHAËL (et son atelier)
(Urbino, 1483 - Rome, 1520) La Madone de l'Amour divin
Huile sur bois
Terminons avec la troisième partie, située dans la Salle de la Chapelle de l'Aile Sully :
Des Farnèse aux Bourbons, histoire d’une collection
Des objets d’art, des peintures et des sculptures relatent les grandes étapes de la constitution des collections du musée de Capodimonte autour de deux temps forts : l’héritage des Farnèse et le mécénat des Bourbons de Naples.
L'origine de la collection du musée est la collection de la famille Farnese, dont l'unique héritière, la princesse Élisabeth Farnèse (1692-1766) fut reine d'Espagne de 1714 à 1746, a tout légué à son fils Charles (1716_1788), duc de Parme puis roi de Naples et de Sicile puis roi d'Espagne.
Joos VAN CLEVE (Clève, 1485 - Anvers, 1540) Triptyque : L'Adoration des Mages
Huile sur panneau, vers 1525
Bartolomeo SCHEDONI (Modène, 1578-Parme, 1615) L'Aumône de sainte Élisabeth de Hongrie
Huile sur toile, 1611
Giovanni LANFRANCO (Parme, 1582- Rome, 1647) Madeleine portée au ciel par des anges
Huile sur toile, 1616-1617 (détail)
Tiziano Vecellio dit TITIEN :
Portrait du pape Paul III, tête nue, huile sur toile, 1543 Portrait de Paul III avec ses petits-fils, huile sur toile, 1545 Portrait du cardinal Alexandre Farnèse, huile sur toile, 1545-1546
Dominikos Theotokopoulos dit GRECO (Candie, 1541- Tolède, 1614) Portrait de Giulio Clovio, huile sur toile, 1571-1572
Des objets :
Jacob MILLER L'ANCIEN (Augsbourg, 1548?- 1618) Diane chasseresse chevauchant un cerf, argent doré, fin du XVI - début du XVII° siècle
Guglielmo DELLA PORTA (Porlezza, 15157 - Rome, 1577) Buste de Paul III avec chape, marbre, albâtre égyptien, 1546-1549
CEYLAN, fabrication cingalo-portugaise 2e moitié du XVIe siècle
Paire d'éventails, ivoire, argent, saphir
Manno di BASTIANO SBARRI (Florence, 1536 - Florence, 1576)
Giovanni BERNARDI (Castelbolognese, 1494 - Faenza, 1553) Cassette Farnèse
Argent doré, repoussé et ciselé, cristal de roche gravé, émail, lapis-lazuli, 1548-1561
Anton Raphael MENGS et atelier (Aussig, 1728 - Rome, 1779) Portrait du roi Charles III de Bourbon, huile sur toile, vers 1774
Le fils et héritier d'Isabelle Farnese est à l'origine de la construction du palais de Capodimonte, conçu notamment pour abriter la collection Farnese.
Charles III est aussi à l'origine de la création de la fabrique de porcelaine :
Real Fabbrica della porcellana di Capodimonte (1743-1759)
Giuseppe GRICCI (Florence, 1719 - Madrid, 1771) Bassin en forme de coquille, porcelaine tendre blanche de Capodimonte, 1745-1750
Real Fabbrica della porcellana di Napoli (1771-1806)
Filippo TAGLIOLINI (Fogliano di Cascia, 1745- Naples, 1809) La Chute des Géants, biscuit de porcelaine, 1785 et années suivantes
et diverses pièces produites par la manufacture.
Antonio JOLI (Modène, vers 1700 Naples, 1777) Départ de Charles de Bourbon pour l'Espagne vu de la mer, huile sur toile, 1759 Ferdinand IV à cheval avec la cour, huile sur toile, vers 1760-1761
Pierre Jacques VOLAIRE (Toulon, 1729 - Naples, 1799) L'Éruption du Vésuve depuis le pont de la Madeleine, huile sur toile. 1782
Alexandre Hyacinthe DUNOUY (Paris, 1757-Jouy-en-Josas, 1841) Vue de Naples depuis Capodimonte, huile sur toile, 1813
En guise de conclusion, cette explosion pop invite à méditer avec Warhol sur la silhouette iconique du Vésuve inlassablement reproduite. Cette peinture est aussi un hommage à la politique d'enrichissement des collections du musée et à la place que l'art contemporain continue à occuper à Capodimonte.
Andy WARHOL (Pittsburg, 1928 - New York, 1987) Vesuvius, acrylique sur toile, 1985
Nous terminons dans ce billet le parcours amorcé dans notre billet du 4 septembre d'une des expositions phares du printemps dernier, consacrée aux pastels du musée d'Orsay.
Avant de reprendre le parcours, quelques éléments sur un évènement organisé autour de l'exposition : PASTEL XXL.
Huit étudiants des Beaux-Arts de Paris (Mathias Bensimon, Juliette Duchemin, Rusné Gocentaité, Li Jinshuai, Kraus, Hakim Sahiri, Alexandra Willis et Misha Zavalnyi) ont créé, devant les visiteurs, un vaste dessin panoramique au pastel de 10 mètres de long. Cette performance en direct s'est déroulée pendant l'exposition au rythme d'une séance par semaine. Ci-dessous l'état de l'œuvre - par nature inachevée - au 17 mai 2023, lors de notre visite (de gauche à droite)
Reprenons notre parcours avec la section Intérieurs
Parmi les nouveaux sujets investis par les pastellistes dans les dernières décennies du XIXe siècle figure l’univers domestique. Le portrait devient aussi plus intime, plus informel, reflétant un état d’âme. Le foyer et la vie familiale étant au cœur des valeurs bourgeoises, les artistes se tournent vers les scènes de genre et les intérieurs. Ces sujets semblent particulièrement privilégiés par les artistes femmes qui, dans le contexte de l’époque, restent encore largement associées à cette sphère. Ce phénomène est accentué par la réputation de « propreté » et de facilité d’usage du pastel, considéré encore comme un art d’agrément convenant tout particulièrement aux femmes, jusqu’aux années 1880 – moment où il jouit d’une popularité sans précédent chez les artistes, tous sexes confondus : « Le pastel peut se prendre et se quitter, gardant tout au long du travail toute la fraîcheur de son éclat et la fleur de son velouté » (la Grande Encyclopédie, 1885). Il devient le médium de choix pour créer des instantanés de la vie quotidienne.
Odilon Redon : Camille Redon brodant, 1880, pastel sur papier
Eugène Loup (1867-1948) : Mélancolie, vers 1901, pastel sur toile
Georges Le Brun (1873-1914) : Le Vestibule, 1909, fusain et pastel
Auguste Renoir (1841-1919) : Portrait de jeune fille brune, assise, les mains croisées, 1879, pastel sur papier
Daniel de Monfreid (1856-1929) : Portrait de sa fille Agnès à trois ans, 1902, pastel sur papier vergé
Étienne Moreau-Nélaton (1859-1927) : Portrait de Raymond Koechlin, 1887, pastel et crayon noir sur papier
Mary Cassat (1844-1926) :
Portrait de Mademoiselle Louise-Aurore Villebœuf, 1902, pastel sur papier beige et châssis
Mère et enfant sur fond vert, 1897, pastel sur papier beige collé sur châssis entoilé
Femme et enfant devant une tablette où sont posés un broc et une cuvette, 1889, pastel sur papier beige collé sur châssis entoilé
Paul-César Helleu (1859-1927) :
Femme accoudée à une table, 1889, pastel sur papier chamois collé sur châssis entoilé
Portrait de Madame Paul Helleu, 1894, pastel sur papier bleu
Édouard Vuillard (1868-1940) :
Bouquet de soucis sur la cheminée, vers 1930, pastel sur papier beige
La Table servie, vers 1915, pastel sur papier beige
Marguerite Carpentier (1886-1965) : Marguerite Cahun dans l'appartement du boulevard Raspail, 1910, pastel sur papier marouflé sur toile avec cadre
Armand Guillaumin (1841-1927) : Intérieur, 1889, pastel sur papier vergé crème
Eva Gonzalès (1847-1883) : La Matinée rose, 1874, pastel sur papier et châssis entoilé
Intimités
Le pastel semble plus apte que tout autre médium à rendre le velouté de la peau et les teintes subtiles de sa carnation. Cette qualité explique naturellement sa grande popularité dans l’art du portrait, mais aussi dans celui du nu. Édouard Manet, Maurice Denis et Émile-René Ménard jouent de l’estompe pour donner un aspect poudreux et lumineux à la chair de leurs modèles, tandis que Degas utilise une grande variété de traits et des couleurs franches pour donner du relief à ses baigneuses aux postures prosaïques, sans idéaliser de leur corps.
Édouard Manet (1832-1883) : Buste de femme nue, vers 1875, pastel sur toile et châssis
Émile René Ménard (1863-1930) : Étude de nu dans un intérieur, sans date, pastel sur papier collé sur châssis entoilé
Edgar Degas (1834-1917) :
Femme nue debout, vers 1880-1883, pastel et fusain sur papier bleu-vert
Danseuse en maillot, vers 1896, pastel sur papier
Baigneuse allongée sur le sol, vers 1886, pastel sur papier beige
Edgar Degas :
Baigneuse s'essuyant, vers 1900-1905, fusain et pastel sur papier
Femme à sa toilette essuyant son pied gauche, 1886, pastel sur carton
Après le bain, femme nue s'essuyant la nuque, 1898, pastel sur papier vélin fin collé sur carton
Femme se coiffant, 1887-1890, pastel sur papier beige collé sur carton
Maurice Denis (1870-1943) : Nu, femme assise, de dos, 1891, pastel et fusain sur papier
Edmond Aman-Jean (1858-1936) : Farniente dit aussi Étude de femme drapée les mains levées, vers 1895, pastel sur papier gris-beige collé sur toile
Arcadies
Le XIXe est un siècle d’instabilité politique et de profonds changements sociétaux. La révolution industrielle et l’expansion rapide des chemins de fer bouleversent le rapport au temps et à l’espace. Vers la fin du siècle émerge la crainte d’un effondrement de la civilisation, comparable à celui de l’Empire Romain. En réponse à cette crise des valeurs et en réaction contre le matérialisme ambiant, certains artistes rejettent les sujets contemporains pour se tourner vers un idéalisme arcadien, rêve antique d’une vie simple, en harmonie avec la nature, hors du temps.
Un artiste comme Osbert développe une vision panthéiste et mystique peuplée de muses sur laquelle s’édifie son œuvre. Dans l’art de Degas, au contraire, le thème des baigneuses dans l’herbe et d’une possible symbiose avec la nature est une véritable rareté. Enfin, chez Desvallières et Rothenstein, la terre idyllique de l’Arcadie n’est pas sans présenter un caractère étrange voire menaçant, comme ébranlée par les secousses du XXe siècle approchant.
Alphonse Osbert (1857-1939) :
Au bord de la mer, 1926, pastel sur papier gris contrecollé sur carton
Muse allongée sous les arbres, vers 1910, pastel sur papier gris
Henri Fantin-Latour (1836-1904) : Les Filles du Rhin ou L'Or du Rhin, 1876, pastel et fusain sur lithographie sur papier
Pierre Puvis de Chavannes (1824-1898) : Le Berger ou L'Orage, 1887, pastel sur papier beige collé sur châssis entoilé
Léon Lhermitte (1844-1925) : Deux baigneuses au bord d'un étang, vers 1893, pastel et fusain sur papier brun
Ker-Xavier Roussel (1867-1944) : Scène mythologique, dit aussi Silène et l'Enfant, vers 1916, pastel sur papier
Édouard Vuillard : Deux femmes dans un bois, vers 1890, pastel sur papier
Edgar Degas : Deux baigneuses sur l'herbe, 1896, pastel sur papier brun
William Rothenstein (1872-1945) : Femme nue assise, 1892, pastel et peinture dorée
George Desvallières (1861-1950) : Les Tireurs à l'arc, 1895, pastel sur papier gris-beige
La dernière section de l'exposition présente des œuvres de deux artistes seulement :
Âmes et chimères
La voie menant à une Arcadie utopique n’est pas la seule qu’aient empruntée les artistes peu enclins à tendre un miroir au monde transfiguré du XIXe siècle. Odilon Redon et Lucien Lévy-Dhurmer, tous deux en quête d’une réalité intérieure, adoptent le pastel pour donner corps à un imaginaire foisonnant, avec un vocabulaire visuel propre à chacun. Après Millet et Degas, ce médium « caméléon » est une nouvelle fois renouvelé par ces deux grands pastellistes symbolistes à la fin du siècle.
Pour Lévy-Dhurmer, l’exploration de la vie intérieure passe souvent par le portrait et la figure humaine, y compris dans la représentation d’êtres hybrides comme sa célèbre Méduse.
Lucien Lévy-Dhurmer (1865-1953) :
Portrait de Georges Rodenbach, vers 1895, pastel sur papier gris-bleu
La femme à la médaille, dit aussi Mystère, 1896, pastel et rehauts d'or sur papier contrecollé sur carton
La Sorcière, 1897, pastel sur papier
Lucien Lévy-Dhurmer :
Florence, vers 1898, pastel sur papier
Méduse, dit aussi Vague furieuse, 1897, pastel et fusain sur papier beige contrecollé sur carton
Le Silence, 1895, pastel sur papier
Redon exploite quant à lui l’extraordinaire plasticité du pastel pour donner forme à son imaginaire et insuffler une dimension personnelle au mythe, loin de l’allégorie. Son art repose sur l’indéterminé, avec une volonté de se laisser guider par le matériau.
Odilon Redon (1840-1916) :
Parsifal, 1912, pastel sur papier
Femme voilée, sans date, pastel, détrempe, graphite et transferts carbone sur papier beige
Le Bouddha, vers 1906-1907, pastel sur papier beige
La Visitation ou Entretien mystique, sans date, pastel sur papier beige, mise au carreau partielle à la mine de plomb
Odilon Redon :
Char d'Apollon, vers 1910, pastel et détrempe sur toile
Fleur de sang, 1895, pastel sur papier gris
Vision sous-marine, vers 1900, pastel sur papier gris
La Coquille, 1912, pastel sur papier
Au début de l'été, une belle exposition a fermé ses portes au musée d'Orsay. N'en ayant pas encore rendu compte, nous en proposons un aperçu.
Ni véritablement dessin, ni peinture, le pastel est une technique graphique à part unissant la ligne et la couleur. La vibration de la « fleur» des pigments formée à la surface du support offre un rapport direct à la matière et à la couleur pure qui stimule l’œil et en appelle aux sens. L’art du pastel est multiforme, le trait se faisant ondulation, zébrure, strie, hachure, lorsque le pigment n’est pas concentré en aplat ou fondu par l’estompe. Sa souplesse d’utilisation le rend particulièrement apte à rendre les effets de matière ou le velouté de la peau et à créer des effets de trompe-l’œil. Triomphante au XVIIIe siècle, la technique passe de mode avant de connaître une véritable renaissance au milieu du XIXe siècle. Elle s’affranchit du portrait et s’étend à tous les sujets, comme le montrent la centaine d'œuvres exposées, joyaux de la collection du musée qui en compte plus de 500.
Sociabilités
Dans cette section, des portraits, thème de prédilection du pastel.
Louise Breslau (1856-1927) : La petite fille au chien blanc ou portrait de Mlle Adeline Poznanska, 1891, pastel sur papier
Émile Lévy (1826-1890) : Jeune fille en robe rouge sur fond de fleurs ou Portrait de Marie de Heredia, 1887, pastel sur papier beige
Marie Bashkirtseff (1860-1884) : Portrait de Madame X, 1884, Pastel et fusain sur papier
Édouard Manet (1832 1883) :
Portrait d'Irma Brunner dit aussi La Femme au chapeau noir, vers 1880-1882, pastel sur toile et châssis
Portrait de Madame Émile Zola, vers 1879, pastel sur toile et châssis
Berthe Morisot (1841-1895) : Portrait de Madame Edma Pontillon, née Edma Morisot, 1871, pastel sur papier
George Desvallières (1861-1950) : Portrait d'homme, 1891, pastel sur papier collé sur châssis entoilé
Pascal Dagnan-Bouveret (1852-1929) : Portrait de jeune femme en deuil, 1889, pastel sur papier gris bleu collé sur châssis entoilé
Antonio de La Gandara (1861-1917) : Portrait de Marie-Louise Revillet, dite Sarah Valanoff, vers 1888, pastel sur papier marouflé sur toile
Karl Bennewitz von Loefen (1856-1931) : Portrait d'Yvette Guilbert, 1899, pastel sur carton
Jacques-Émile Blanche (1861-1942) : Portrait de femme, 1887, pastel sur toile
Charles Milcendeau (1872-1919) : Bretonne devant l'église de Pont-l'Abbé, 1897, crayon et pastel sur papier gris-beige
Paul Gauguin (1848-1903) : La Petite Gardeuse de porcs, 1889, pastel sur papier beige
Terre et mer
Au milieu du XIXe siècle, l'usage du pastel s'étend à tous les genres. Jean-François Millet l'utilise pour représenter la noblesse de la vie rurale, comme dans ses peintures. Certains critiques, comme Joris-Karl Huysmans, préfèrent d'ailleurs ses pastels à ses huiles.
S'il est un pionnier, Millet n'est toutefois pas seul à s'intéresser aux paysans. Le choix de ces sujets nouveaux coïncide avec une période d'accélération de l'exode rural dans le sillage de la révolution industrielle. Emerge alors la nostalgie d'un mode de vie ancestral qui jusqu'alors semblait éternel. Le travail des moissonneurs et des pêcheurs est tantôt héroïsé, tantôt traité avec pittoresque. Les costumes des bretonnes et leurs coiffes frappent de nombreux pastellistes, qui chercheront à les immortaliser dans tout leur éclat de bleu roi, de jaune vif, et de blanc.
Odilon Redon (1840-1916) : Jeune fille au bonnet bleu, début des années 1890, pastel sur papier
Giovanni Segantini (1858-1899) : Le Dernier Labeur du jour, dit aussi Porteurs de fagots, 1891, pastel et fusain sur papier
Léon Lhermitte (1844-1925) : Moissonneurs, sans date, pastel sur carton
Jean-François Millet (1814-1875) :
La Femme au puits, vers 1866-1868, pastel et crayon noir sur papier
La Baratteuse, vers 1866, pastel et crayon noir sur papier brun et châssis entoilé
Fernand Legout-Gérard (1856-1924) : Port de pêche, vers 1905, pastel sur papier
Piet Mondrian (1872-1944) : Départ pour la pêche, vers 1900, pastel, aquarelle et fusain sur papier
Modernités
Le XIXe siècle est pour le poète Émile Verhaeren celui des « Villes tentaculaires », qui se développent à mesure que les campagnes se vident. La population et le paysage urbains, la vie ouvrière, la société de loisirs et le monde du spectacle offrent autant de nouveaux sujets aux impressionnistes. Le pastel devient une technique privilégiée pour saisir ce monde en mouvement. Eugène Boudin leur montre la voie avec ses études en plein air.
Degas, s’il a laissé des paysages au pastel, s’intéresse plus encore au travail des femmes, ce qui fait dire aux frères Goncourt que cet « enamouré du moderne » a jeté « son dévolu sur les blanchisseuses et les danseuses ».
Jean-Marie Faverjon (1823-1873) : Autoportrait en trompe-l'œil, vers 1868, pastel, graphite, peinture dorée sur papier gouaché
Edgar Degas (1834-1917) :
La Repasseuse, 1869, fusain, craie blanche et pastel sur papier beige
Chez la Modiste, vers 1905-1910, pastel sur papier
Étude d'un nœud de ruban, 1887, pastel bleu et fusain sur papier gris-bleu
Claude Monet (1840-1926) : Le Pont de Waterloo à Londres, 1900, pastel sur papier vergé beige rosé
Gustave Caillebotte (1848-1894) : Le Nageur, 1877, pastel sur papier
Eugène Boudin (1824-1898) :
Plage, 1862-1870, pastel sur papier
Quai, sans date, pastel sur papier beige
Plage, 1862-1870, pastel sur papier bleu
Degas Pastelliste
Le pastel est fondamental pour Degas: il utilise presque exclusivement ce médium à partir de 1888-1890, comme un aboutissement de ses recherches assidues sur le dessin et la couleur. Le pastel lui permet également de reprendre ses compositions de manière plus aisée que la peinture. Degas avait abordé la technique dans le respect des traditions avant de l'employer de manière radicale: le pastel est utilisé à sec ou délayé à l'eau, écrasé ou travaillé à la vapeur, par gommage, et avec des types de tracés multiples.
L'un de ses principaux apports au renouveau du pastel réside dans les techniques mixtes. Il n'est pas rare que Degas combine pastel et détrempe, ou peinture à l'huile.
Portrait d'amis sur scène (Ludovic Halévy et Albert Boulanger-Cavé dans les coulisses de l'Opéra), 1879, détrempe et pastel sur papier beige
Danseuse assise : penchée en avant, elle se masse le pied gauche, vers 1881-1883, pastel sur papier marron contrecollé sur carton
Danseuses, entre 1884 et 1885, pastel sur papier
Deux danseuses au repos, vers 1910-1912, pastel et fusain sur papier chamois
Essence de la nature
Le faible encombrement du pastel le rend facilement transportable et adapté au travail en plein air. Réunissant, dans un même outil, la possibilité de la ligne et de la couleur, il est idéal pour transcrire les changements atmosphériques et les effets de lumière en toute rapidité. Des pastellistes comme Pierre Prins, Ernest Duez, ou encore Henri Gervex se mettent à l’école de la nature, sur le motif, dans un même souci de vérité que Boudin et les impressionnistes. Ils produisent des pastels très enlevés, traités avec vigueur. Mais la matière même de ce médium, fragile, éphémère, et sa propension à créer des surfaces aériennes peut aussi conférer au paysage un caractère étrange et éthéré qu’exploitent les artistes symbolistes comme Lévy-Dhurmer et Rippl-Ronaï.
Henri Gervex (1852-1929) : Paysage marin (Dieppe), vers 1885, pastel sur papier
Pierre Prins (1838-1913) : Ciel breton au Pouldu, 1892, pastel sur papier gris
Edgar Degas : Un îlot en pleine mer, vers 1890, pastel et monotype sur papier
Ernest Duez (1843-1896) : Paysage, vers 1885, pastel sur papier
André Devambez (1807 1944) : Procession au crépuscule, vers 1902, pastel sur toile
Lucien Lévy-Dhurmer (1865-1953) :
Le Lac Léman, 1925, pastel sur papier
La Calanque, vers 1936, pastel sur papier et châssis entoilé
Maria Botkina (1875 1952) : Paysage d'automne, vers 1900, pastel sur papier collé sur carton
József Rippl-Rónai (1861-1927) : Un parc la nuit, vers 1892-1895, pastel sur papier beige, marouflé sur toile
Ker-Xavier Roussel (1867-1944) : La Barrière, vers 1892, pastel sur papier
Nous poursuivrons dans un prochain billet le parcours de cette exposition.
Un dernier billet sur l'été breton en cette fin du mois d'août. Il sera consacré à deux îles accessibles à pied à marée basse.
Commençons par l'Île Wrac'h (en breton Roc'h Gored) qui accueille une exposition de deux artistes en résidence sur l'île, prétexte à une balade depuis la plage de Saint-Cava à Plouguerneau.
En chemin sur le fonds découvert vers l'île, on aperçoit le sommet du phare de l'île Vierge à notre droite. En prenant pied sur l'île, nous découvrons son nom breton.
La vue est belle quoiqu'un peu austère...
On monte vers le phare par un chemin bordé de fougères - et de ronces garnies de mûres..
et après avoir bordé le potager abrité du vent par de hauts murs...
...on peut découvrir les installations autour du vieux phare...
certaines d'entre elles ne sont pas aussi grandioses que ne laissait espérer l'affiche !
Devant l'entrée du phare, encore une installation...
et à l'intérieur, l'autre partie de l'exposition
et quelques données historiques sur le phare, où l'on découvre que son architecte, directeur des phares et balises de 1846 à 1878 où il a succédé à Léonor Fresnel, frère d'Augustin, célèbre pour les lentilles qui équipent la plupart des phares, est aussi l'architecte, entre autres, du phare du Four et du phare d'Ar-men.
Période de construction: 1843-1845.
Architecte: Léonce Reynaud.
Entrepreneur: Briand, de Nantes.
Mise en service: 15 août 1845.
Électrification : 1973.
Automatisation : 1993.
Gardienné de 1845 à 1993.
Hauteur : 14 m.
Élévation: 23 m (focale 20 m).
Portée : 7 milles nautiques (13 km).
Feux: 3 éclats rouges /7 secondes.
Alimentation électrique : panneaux photovoltaïques et éolienne.
Encore quelques belles vues depuis le phare,
avec notamment l'île Stagadon toute proche, ancienne propriété du peintre Bernard Buffet, puis de Pierre Bergé qui en avait fait don à l'association Les Amis de Jeudi Dimanche du Père Jaouen.
Retour au rivage :
Un dernier regard sur ce site si attachant
avec une carte artistiquement dessinée, achetée sur l'île.
Une autre île, plus petite, à visiter à pied par marée basse : l'île Carn, sur la commune de Ploudalmézeau.
En longeant la côte vers le nord depuis les hauteurs de Portsall, d'où ce jour-là le paysage est inhabituel, avec une sorte de brume de chaleur...
on aperçoit bientôt l'île Carn (en breton Enez-Karn).
Après un cheminement dans le sable et les rochers, on arrive au pied du cairn, ainsi décrit par Wikipedia :
Le cairn primaire comporte trois dolmens à couloir et à voûte en encorbellement. La construction des deux premiers a lieu vers 4200 av. J.-C., celle du troisième vers 3600. Ce cairn primaire, trapézoïdal, est enseveli au Néolithique final sous un « massif d'interdiction » : un grand cairn circulaire, dépourvu d'entrée.
En 1959, le dolmen central est le premier dolmen à couloir d'Europe daté par le carbone 14. L'annonce de sa grande antiquité (1 600 ans de plus que la plus ancienne pyramide d'Égypte) produit un choc dans la communauté scientifique : jusque-là, les archéologues voyaient bien plus récentes les constructions mégalithiques.
Terminons ce billet avec quelques vues prises depuis le "toit" du cairn.
Comme souvent à cette période de l'année, nous rendons compte de l'exposition organisée par le Fonds Hélène et Edouard Leclerc pour la culture, à Landerneau (voir par exemple notre billet du 1er août 2020).
Le titre de celle de cette année est un peu long : tout en étant centrée sur un artiste, John Howe, illustrateur canadien né le 21 août 1957 à Vancouver, elle veut aussi évoquer l'univers de J.R.R. Tolkien (1892-1973), auteur du Hobbit (1937) et de sa suite Le Seigneur des anneaux (1954-1955) et plus généralement de l'iconographie liée à l'imaginaire médiéval à travers diverses œuvres. Nous n'aurons pas l'ambition de retracer le parcours des 12 sections de l'exposition, mais nous essaierons d'en faire partager au lecteur quelques images...
Dans la section L'Imaginaire médiéval :
Dans la section Je suis un Hobbit !
La section Ca existe vraiment ! mérite une explication particulière :
Le dessin constituant la principale occupation de sa jeunesse, John Howe postule à dix-neuf ans pour entrer à l'école des Arts décoratifs de Strasbourg. Son arrivée dans la ville alsacienne constitue une véritable révélation, lorsqu'il découvre l'impressionnante architecture de la cathédrale de Strasbourg. « Ça existe vraiment ! » s'exclame-t-il alors. « J'ai découvert pour la première fois l'architecture gothique en France, explique John Howe, le Canada est un pays jeune, en particulier l'ouest du Canada, par conséquent ma connaissance de l'histoire de l'architecture, sans être totalement absente, restait théorique et issue des livres. Contempler réellement une cathédrale constitua un immense choc culturel. Cela m'a sans aucun doute ouvert les yeux, et depuis lors, je me suis efforcé de les garder ouverts.»
Dans la section Les racines de l'imaginaire médiéval :
La section La Nature joue le rôle principal est particulièrement développée :
Pour les initiés, une section La Clé est la terre du milieu :
La section Dessiner les cités et les châteaux est plus accessible au commun des mortels :
La section Monstres et créatures est naturellement très riche :
En regard des dessins et aquarelles de John Howe, l'exposition présente des œuvres "de contexte" :
Attribué à Grégoire Guérard : Saint Georges terrassant le dragon, France, vers 1520, bois, Musée du Louvre
Yan' Dargent : Les Lavandières de la nuit, 1861, huile sur toile, Musée des Beaux-Arts de Quimper
Des motifs :
William Frend de Morgan et William Morris : Panneau de revêtement mural, entre 1876 et 1877, carreaux de faïence émaillée, Musée d'Orsay
William Morris : Peacock, 1878, tenture, Musée d'Orsay
des équipements militaires :
Armure maximilienne, Allemagne, vers 1520-1525, fer repoussé, attaches en cuir, Musée de l'Armée, Paris
Chanfrein à tête de dragon, France - Italie, vers 1490-1500, redécoré vers 1535, fer forgé, repoussé et gravé, œillet de fixation et charnières en cuivre, Musée de l'Armée, Paris
La fin du parcours de l'exposition expose comment Howe est intervenu auprès du réalisateur Peter Jackson pour l'adaptation au cinéma des livres de JRR Tolkien : la trilogie cinématographique du Seigneur des anneaux, puis celle du Hobbit. Elle évoque aussi son intervention dans la série d'Amazon Prime Les Anneaux du pouvoir, épopée censée se dérouler des milliers d'années avant les récits du Hobbit et du Seigneur des anneaux, pour laquelle John Howe a réalisé plus de 1500 dessins pour en définir la direction artistique.
La période estivale est l'occasion de faire partager au lecteur des expositions mineures qui n'avaient pu trouver leur place dans le fil de ce blog.
À l'occasion de la sortie de son livre Augustin Rouart : Entre père et fils, l'académicien Jean-Marie Rouart a organisé en mai dernier, à la mairie du 8e arrondissement de Paris, une exposition d'œuvres de son père le peintre Augustin Rouart (1907-1997). Issu d'une lignée de peintres (les plus connus étant son grand-père Henri (1883-1912) et son oncle Ernest (1874-1942) - époux de Julie Manet, la fille de Berthe Morizot, il est à l'écart des grands courants mais sa peinture a un charme certain.
Enfant aux anges, 1946, peinture à l'œuf sur toile Garçon au tricot bleu, 1968, huile sur toile Enfant au citron, 1946, peinture à l'œuf sur toile
Adolescent lisant, 1948, crayon et pastel sur papier Garçon lisant, gravure Enfant devant son tableau noir, 1946, crayon
Essai de bande dessinée : Les aventures du nounours
Lagrimas y Penas, 1943, huile sur toile Le Nageur, 1943, peinture à l'œuf sur carton
Jonquilles et narcisses, 1954, huile sur toile Glaieuls et livre rouge, 1943, peinture à l'œuf sur toile Jonquilles dans un bocal, 1954, huile sur carton
Jonquilles, livre et bronze, 1982, huile sur carton Mimosas, 1945, peinture à l'œuf sur bois Nature morte
Maison dans les marais salants, 1976, huile sur carton La Plage par temps gris, 1974, huile sur carton Adolescent sur la plage, 1973, huile sur carton
Les Faneuses, 1942, peinture à l'œuf sur carton
Enfant dormant avec ours en peluche, 1948, peinture à l'œuf sur carton Cinq portraits d'enfant dormant, 1948, peinture à l'œuf sur carton Enfant dormant n°1, 1948, peinture à l'œuf sur carton Enfant endormi, 1946, peinture à l'œuf sur carton
Pour finir, des portraits d'Augustin Rouard :
Par sa tante Julie Manet : Portrait d'Augustin enfant, huile sur toile
Par lui-même : Autoportrait au béret, 1933, peinture à l'œuf sur carton Autoportrait aux lunettes, 1980, huile sur panneau
...et celui de Jean-Marie Rouard, par son père, à 5 ans :
L'enfant au gilet rouge, 1948, peinture à l'œuf sur carton.
Nous avons déjà eu l'occasion du présenter au lecteur il y a quelques années, alors que commençait son réaménagement, l'Atelier des Capucins à Brest (voir notre billet du 2 septembre 2018). La transformation de cet immense atelier de l'Arsenal de Brest, cédé en 2009 à la Ville par la Marine nationale qui occupait ce plateau depuis 1791, en un gigantesque centre culturel est à présent achevée et sa fréquentation est impressionnante - surtout les jours assez nombreux cet été où le temps est plus que maussade...Nous donnerons d'abord un aperçu d'une intéressante exposition qui s'y déroule, proposée par l’Université de Bretagne Occidentale.
"L’une était un port militaire, l’autre était un joyau baroque de la Saxe. Leur destruction lors de la Seconde Guerre mondiale leur donne une destinée commune, mais leurs situations géopolitiques après 1945 les entrainent dans des logiques de reconstruction distinctes. Comparant trois siècles de projets réalisés ou rêvés, Brest-Dresde invite à réfléchir sur la singularité de chaque ville face aux enjeux d’aujourd’hui."
Le passé
Deux belles images des deux villes au XVIIIe siècle
La naissance de l'urbanisme - Die Geburt der Stadtplanung
À Brest, l'avènement de l'âge industriel entraîne des modifications importantes dans le port militaire qui cherche à s'accroître au détriment du commerce et de la pêche. Les aménagements paysagers sans précédent, la construction de gigantesques ateliers navals et les équipements modernes de la Marine auront raison de la ville qui se replie progressivement. En 1865, la Penfeld devient un port définitivement fermé aux civils.
Jusqu'en 1861 Brest est comme coupée en deux : l'accès à Recouvrance est difficile car aucun pont ne relie les deux rives de la Penfeld. Des projets audacieux qui essayent de réconcilier l'usage militaire du port et l'usage civil du passage d'une rive à l'autre aboutiront à la construction d'un pont tournant.
Pendant un siècle, les Brestois, conscients des atouts géographiques de leur ville, caressent le rêve d'un port transatlantique qui contrebalancerait l'emprise maritime de l'armée. Ce projet du « port le plus vaste du monde » qui aurait nécessité des comblements importants ne resta qu'une utopie face à la concurrence d'autres villes françaises. Néanmoins il complète la mosaïque de l'imaginaire océanique de Brest.
Du côté de la terre, Brest commence à étouffer dans l'intra-muros. L'afflux de la main d'œuvre rurale nécessite l'agrandissement de la ville au-delà de ses fortifications qui sont de plus en plus subies par la population. Le quartier de Saint-Martin (dit d'abord Annexion) résulte du désir de la municipalité de créer une extension dotée de tous les équipements indispensables (non seulement l'église, mais aussi l'école, les halles, le lavoir). Brest commence sa croissance fragmentaire et tentaculaire sur les terres agricoles où se construisent les fabriques et les habitations. Se posera aussi la question de la jonction avec la ville de Quimper (siège de la préfecture) et donc du franchissement de la rivière Elorn qui se jette dans la rade de Brest.
Le XIXe siècle, marqué par des progrès scientifiques et technologiques importants, voit le développement des villes s'accélérer. L'industrialisation provoque l'exode rural : les villes attirent une population de plus en plus nombreuse. Cet exode est facilité par le développement des chemins de fer qui ont un fort impact sur l'anatomie urbaine. À Dresde, l'énergie constructive de la noblesse est remplacée par celle des entrepreneurs fabricants de tabac, chicorée, sucre, chocolat, mécanique de précision, caméras, produits cosmétiques... Ils imposent une nouvelle vision de la ville : celle de la ville efficace. L'économie florissante est tributaire de la main d'oeuvre nombreuse et des échanges multiples. La mobilité devient alors un thème récurrent des discussions urbanistiques car elle ne cessera de modeler la ville en augmentant son périmètre construit. Pour freiner la croissance chaotique, la nécessité de planification urbaine concertée s'impose aux décideurs municipaux. La discipline qu'on allait appeler l'urbanisme est née au XIXe siècle précisément.
Quoique Dresde possède déjà un pont remarquable, d'autres devront être construits pour faire face aux défis de la modernité. Les travaux d'ampleur colossale imposent de se battre contre les éléments de la nature avec les moyens techniques innovants, deviennent un nouveau sujet de représentation pour générer peu à peu l'image d'une ville en construction permanente.
L'esthétique de ces réalisations hardies est résolument tournée vers l'avenir. Le pont suspendu qui relie les quartiers Blasewitz et Loschwitz recevra le nom admiratif de « Miracle bleu », la couleur étant celle de sa structure métallique apparente. Non loin de lui, la Schwebebahn - un des premiers monorails suspendus du monde - voit le jour en 1901. Le quartier qui se développe sur les collines environnantes (désormais facilement accessibles) est celui des sanatoriums où on soigne la tuberculose - le mal du siècle favorisé par les taudis urbains. Ces établissements de santé font la nouvelle renommée de Dresde, ville où l'hygiène sera bientôt célébrée à l'échelle internationale grâce à l'entremise de l'industrie chimique florissante.
La modernité à l'œuvre - Die Moderne am Werk
À Brest, la ville par laquelle le jazz arrive en Europe, la modernité architecturale pénètre à petits pas, parfois de façon agressive comme le tram qui s'invite dans l'étroite rue de Siam. De l'entre-deux guerres, on peut retenir quelques belles réalisations isolées insérées dans le dense tissu urbain, et empreintes souvent de l'esthétique Art déco : la gare, le vaste hôpital ou encore trois immeubles d'habitation construits par Aimé Freyssinet. Son frère Eugène, l'ingénieur inventeur du béton précontraint, marquera les esprits en réalisant sur l'Elorn un pont qui permettra enfin de relier Brest au sud de la péninsule bretonne par une voie terrestre appropriée. Une prouesse technique d'esthétique moderne qui semble sonner le glas au pittoresque historique ! Aux yeux des civils de passage, Brest apparaît comme une ville paradoxale à l'image de ses grandes marées : une ville aux mille possibilités mais » assoupie dans un sommeil provisoire », une ville déchirée entre le souvenir d'un glorieux passé marin matérialisé par d'inaccessibles terrains militaires et les impératifs futurs qui se font déjà sentir dans tous les domaines.
Dans cette ville qui souffre d'insalubrité, les efforts se multiplient pour améliorer la qualité de vie des ouvriers. La construction des logements sociaux (Habitations à Bon Marché) démarre timidement pour donner naissance à un nouveau quartier populaire.
Pour l'architecte municipal Georges Milineau l'articulation de ces extensions avec la ville ancienne représentait un véritable casse-tête. Son plan de 1920 prévoyait la destruction des remparts afin de créer un nouveau centre-ville et des zones de verdure qui auraient permis à la ville de respirer. Il ne se faisait pas d'illusions quant à la faisabilité rapide de ce projet car détruire l'œuvre solide de Vauban représentait un coût très important pour la municipalité. La guerre se chargera d'accélérer cette opération urbanistique compromise. Ironiquement,
Le début du XXe siècle est caractérisé par l'élan optimiste de la Belle Époque jusqu'à ce que la Grande Guerre le brise. Les deux décennies suivantes, vécues différemment en Allemagne (pays vaincu) et en France (pays célébrant la victoire), sont capitales pour la réflexion sur la ville moderne qui est menée collectivement par les architectes et les urbanistes de l'Europe entière. Le mouvement hygiéniste né au XIXe siècle rencontra un accueil très favorable dans les milieux de l'architecture moderne. À Dresde, plus encore que dans d'autres villes allemandes, on prône l'accès à la lumière dans les logis, à l'air frais et à la présence de la verdure dans les rues, aux stades et aux piscines. La planification urbaine intègre ces exigences dans les nouveaux quartiers, mais il est plus difficile d'y répondre dans la ville déjà construite où, de surcroît, se pose la question épineuse de la gestion du trafic et de l'articulation de l'ancien et du moderne. Dans les années 1920 se dessine une ville périurbaine fonctionnelle à l'aspect uni, avec verdure, axes droits et façades alignées, lisses, sans ornements et dotées parfois de surfaces vitrées importantes. Dresde, par son activité artistique continue, séduit les architectes renommés et inventifs. Certains, comme Peter Birkenholz, osent des formules inédites, restées cependant au stade du prototype expérimental.
Avant l'avènement du Troisième Reich (1933), Dresde se profile comme une ville moderne qui a su tirer profit de son attractivité historique et de sa compétitivité économique pour se réinventer.
La destruction
Après l'Apocalypse - Nach der Apokalypse
Brest se transforme pendant une décennie en un gigantesque chantier. Le port militaire qui n'a pas perdu son intérêt stratégique doit être rapidement remis en service, la ville déblayée des ruines, les anciens ponts réparés ou reconstruits, de nouveaux ponts construits.
La population qui a dû quitter la ville pendant la guerre revient en nombre pour participer à la reconstruction. Le problème du logement est résolu grâce aux baraques livrées pour beaucoup en kit par les pays alliés (notamment les USA). Elles offrent le confort moderne (eau courante, électricité) à un prix de loyer défiant toute concurrence. L'inévitable promiscuité incite à une vie en communauté où la solidarité de voisinage apporte une valeur ajoutée au quotidien.
Une ville provisoire, sans noms de rues mais avec un système de numérotation des logis, s'est ainsi développée autour de la ville historique et dans ses interstices. Solution temporaire, elle devient le décor de vie de toute une génération. Les habitants des baraques auront souvent du mal à s'en aller pour s'installer dans les « fleurs en béton » (tours et barres d'immeubles) qui poussent autour de la ville reconstruite. Les dernières baraques seront détruites en 1976 seulement, bien au-delà de la date officielle de la fin de la Reconstruction en France. Elles font désormais partie d'un souvenir qui s'estompe : celui d'une deuxième ville détruite.
Baraques du Polygone à Brest (Archives municipales de Brest)
À Dresde, la population est hostile à l'idée de raser la ruine de la Frauenkirche qui s'élève au milieu de la ville anéantie par les bombes. Sous la houlette du maire Walter Weidauer, les efforts sont déployés par les soldats de l'armée rouge pour reconstruire à l'identique le Zwinger (attraction touristique majeure), mais le reste du centre-ville historique restera pendant quatre décennies à venir un vaste terrain abandonné à la pelouse.
Un concours d'idées est pourtant lancé dès 1946 pour imaginer la ville nouvelle (« Das neue Dresden ») où les projets d'architectes renommés côtoient ceux des amateurs qui rêvent leur ville future. Un geste idéologique précoce qui veut faire croire aux habitants du pays et aux observateurs étrangers qu'une concertation est à l'œuvre dans la reconstruction...
Dans la ville historique, les années 1950 donneront surtout lieu à un aménagement urbain dans le goût du réalisme socialiste (doctrine officielle de la période stalinienne) : la place du Vieux marché (Altmarkt) sera bordée d'imposants « palais des travailleurs » et longée d'une large avenue conçue pour les défilés qu'affectionne le nouveau régime, un élément urbanistique obligatoire pour toutes les grandes villes de la RDA.
Remises en cause - In Frage gestellt
Au cours des années 1980 émerge l'idée d'une reconstruction du cœur de la ville historique de Dresde (la place du Marché neuf - Neumarkt). Des séminaires internationaux et des concours sont organisés qui font rêver de la possibilité d'une reconstruction « à l'identique », c'est-à-dire d'une architecture qui rappellerait celle de l'illustre époque historique: baroque (XVIIIe siècle) et éclectique. (XIXe siècle). C'est une solution qui a été d'emblée adoptée après la guerre dans certaines villes européennes (Varsovie, Gdansk, Saint-Malo par exemple). À Dresde ces projections utopiques se heurtent à la réalité bâtie et aux considérations économiques.
Toutefois, après la chute du mur de Berlin, la donne politique et économique change et la population de Dresde s'organise pour que le rêve devienne réalité. La démolition de l'imposante extension en béton du siège de la police libère la place pour la reconstruction époustouflante de la Frauenkirche dont la première pierre est posée en 1994. Les discussions porteront ensuite sur l'entourage de cet édifice emblématique des heures glorieuses de Dresde qui réactive un imaginaire occulté, adapté aux intérêts économiques actuels (tourisme culturel).
En quête d'un nouvel imaginaire urbain, Brest, empêtrée dans son malaise, cherche à redynamiser son centre-ville, jugé monotone, voire médiocre.
La mauvaise connexion piétonne entre les quartiers proches de la rue de Siam, les problèmes grandissants de circulation et de stationnement, une offre insuffisante de services et d'animation culturelle sont autant de maux identifiés par la municipalité qui lance, en 1980, un concours d'idées sur l'aménagement du centre-ville. À l'exposition qui en découle se côtoient des dessins très sérieux et quelques autres, plus extravagants, qui veulent bousculer l'identité brestoise. La place de la Liberté, point névralgique et symbolique de la ville, concentre tous les regards : un concours pour son réaménagement est organisé en 1992 et remporté par Bernard Huet. À l'occasion des travaux, quelques restes des remparts historiques de la ville sont exhumés.
Un long processus de reconstruction de l'imaginaire qui porte sur la perception topographique de la ville se met en marche : l'opération « Un cœur pour ma ville » lancée en 1979 sera suivie bien des années plus tard par celle de « Coeur de métropole ». L'enjeu est de redonner une image positive de la ville de Brest non seulement auprès de ses visiteurs, mais avant tout auprès de ses habitants qui sont appelés à participer à la réflexion urbanistique.
Cette video "teaser" permet d'avoir un aperçu global de cette intéressante exposition bilingue franco-allemande (avec un peu d'anglais en plus !)
Avant de clore ce billet, quelques images des Capucins, en complément de celles que le lecteur pourra retrouver dans le billet de 2018 évoqué au début :
Quelques vues depuis les terrasses, sous le crachin breton :
À l'intérieur, une très grande médiathèque, aux aménagements très originaux - et au bilinguisme prégnant...
Dans le grand hall, outre les machines qui y sont restées et qui étaient déjà présentées dans notre premier billet, une impressionnante hélice de la Jeanne d'Arc, le navire-école retiré du service en 2010 (fusion d'alliage cuivre et aluminium, 4,9 m de diamètre, 6,3 tonnes)
et le canot de l'empereur. Construit sur les plans de l'ingénieur Guillemard en 1810 à Anvers (alors préfecture du département des Deux-Nèthes), il mesure un peu moins de 19 m et a une hauteur de 545 cm.
Un billet pour faire partager au lecteur quelques moments de notre été breton.
La côte entre Lampaul-Ploudalmézeau et Portsall, près de l'île Cairn.
Le site du Guilliguy, qui domine l'anse de Portsall, avec son dolmen du Néolithique final et son haut calvaire.
Le dolmen est composé d'un couloir de 4 m de long, partiellement détruit par la mise en place d'un caveau à l'Age du Bronze. Par une chatière, on accède à la chambre sépulcrale longue de 6,70 m. Un compartiment fermé complète ce dispositif à l'ouest. Ce monument est en appui sur un affleurement de granite au nord. Il est inclus dans un tertre ceinturé de pierres fichées verticalement en terre et de murettes de pierres sèches, intercalaires. La fouille a livré des fragments de bols hémisphériques et de vases carénés, ainsi que le mobilier en pierres que l'on trouve habituellement dans ce type de monument.
"C'est debout, sur la pointe du Guilliguy, appuyé sur un dolmen et les yeux fixés sur la mer, qu'il faut aller méditer quand la vie étroite du monde vous blesse, on devient fort à cet air de l'océan qui vous coule dans la poitrine. On se sent retrempé et vivace".
Emile Souvestre (avocat, journaliste et écrivain né le 15 avril 1806 à Morlaix et mort le 5 juillet 1854 à Montmorency)
Quelques images du GR 34 entre le petit port d'Argenton et l'estuaire du Penfoul, sur la commune de Landunvez, avec une des guérites du 17e siècle qui parsèment la côte et le phare du Four en arrière-plan.
Au port de l'Aber Wrac'h, rare vision des deux voiliers "historiques" de l'association Les Amis de Jeudi Dimanchedu regretté Père Jaouen, Bel Espoir II et Rara Avis, amarrés ensemble à la tonne de marine.
Nous assistons au départ de Rara Avis, et un peu plus tard, nous apercevons Bel Espoir II qui part à son tour, sous voiles.
Au fond de l'Aber Wrac'h, à Paluden, le port de Lannilis, et un peu en aval sur la rive gauche, le chantier du Père Jaouen au lieu-dit Moulin de l'Enfer.
Terminons par l'Aber Benoît.
Comme chaque année (cf par exemple notre billet du 16 juillet 2022) , une exposition est organisée sur ses rives par la commune de Saint-Pabu. Elle est cette fois un peu complexe, réalisée par plusieurs artistes en résidence à la Maison des Abers - Ti an Aberioù à Saint-Pabu. Nous en donnons quelques exemples :
Près de la cale du passage, l'installation Action de voir de Nesrine Mouelhi.
À divers endroits de la côte, des rituels proposés par Marie-Michèle Lucas, extraits de son livre Rituaire réalisé entre avril 2022 et juin 2023 pour "célébrer l'immensité de la mer."
Encore de Nesrine Mouelhi, des Houses, petites boîtes sculpturales qui accueillent des poèmes écrits par l'artiste. Les textes sont dédiés aux anciennes pêcheries dénommées «korejoù, ar c’horejoù» en breton («kored, ar gored» au singulier). Nesrine s’intéresse à l’histoire de ces pêcheries, leurs origines, leurs fonctionnalités, leurs compositions et ainsi elle se questionne sur la relation qu’entretiennent les humains avec ces pêcheries. En utilisant l’écriture et la peinture elle rend compte de ses propres liens d’attachement avec chaque gored.
(ici, l'installation surplombe la plage de Korn ar Gazel)
Enfin, près de Porz ar Villin, Scoubidou hydraulique, de Marianne Rousseau.
Marianne Rousseau prend pour point de départ un dessin technique d’un scoubidou hydraulique, outil utilisé par les goémoniers pour la récolte des algues marines. Elle présente une sculpture composée de tubes en inox et d’un textile sur lequel elle coud un motif de l’outil mécanique. Cette oeuvre rend hommage au travail des goémoniers et à l’histoire de ce métier qui s’est vu facilité par l’arrivée de la machine.
Naviguons sur l'aber pour voir le canot historique de sauvetage Yvon Salaün ou pour emmener nos petites-filles en pèlerinage vers la maison de la regrettée Jane Birkin, sur la rive droite.
Terminons ce billet en empruntant le sentier qui débouche au dessus de la plage de Béniguet...
...pour des vues sur l'embouchure de l'Aber, à la lumière et aux couleurs jamais semblables d'un jour à l'autre.
Le Centre Pompidou présente cet été dans un de ses grands halls une exposition consacrée à un architecte britannique, Norman Foster. Né en 1935 à Manchester, Foster était un ami de Richard Rogers (1933-2021), architecte italien naturalisé britannique, qui avait conçu avec Renzo Piano le Centre Pompidou. Foster et Rogers, avec leurs épouses respectives, également architectes, Wendy Cheesman Foster et Su Rogers - le milieu de l'architecture est particulièrement endogame - le cabinet Team 4, de 1963 à 1967. En 1967, Rogers s'est associé à Renzo Piano et Foster a monté avec son épouse le cabinet Foster Associates, depuis rebaptisé Foster+Partners. L'exposition débute par une salle pleine de dessins, dont nous retiendrons, en guise de transition avec d'autres billets, deux croquis de la chapelle de Ronchamp, de Le Corbusier, par le jeune Foster...
Nous suivrons ensuite le parcours, en présentant quelques maquettes.
Chapelle du Vatican, pavillon du Saint-Siège à la Biennale de Venise en 2018.
Siège de Bloomberg, Londres, 2009-2017
Apple Park, Cupertino (USA), 2009-2017
Centre de distribution Renault, Swindon (Royaume-Uni), 1980-1982
Table Nomos, 1986, structure en acier et aluminium, plateau en verre
Deux réalisations au Château La Coste, Aix-en-Provence :
- Terrasse d'observation (2019-en cours)
- Maison autonome (2019-en cours)
The Sage Gateshead, Gateshead (Royaume-Uni), 1997-2004
(centre musical régional)
Musée national Zayed, Abu Dhabi (Émirats arabes unis), 2017-2024
Opéra Winspear, Dallas (USA), 2003-2009
Lycée Albert Camus, Fréjus, 1991-1993
Cour suprême de Singapour, Singapour, 2000-2005
La plus belle salle de l'exposition présente de nombreux points d'intérêt :
Des œuvres de la collection de Foster : Ai Weiwei, Brancusi :
Des hommages à ses inspirateurs :
Le Corbusier (1887-1965) avec le nombre d'or et sa voiture, la Voisin C7
et l'américain Richard Buckminster Fuller (1895-1983) :
Richard Buckminster Fuller et Starling Burgess (1878 – 1947) :
- Dymaxion Car #4, 1933-1934 (2010)
Toujours dans le panthéon du design de Norman Foster :
- Glasflügel H-201B Standard Libelle, planeur, 1967
- Rudolf Uhlenhaut (1906-1989) : Châssis tubulaire de la Mercedes-Benz 300 SL Coupé (W 198), 1954
- Colin Chapman (1928-1982) : Chassis de la Lotus Elan, Type 26, 1962
Dans cette grande salle, devant les fenêtres et le panorama de Paris, une séries de tours réalisées (ou non) par Foster+Partners.
Tour Hearst, New York, 2000-2006
Tour Millenium, Tokyo, 1989 (projet non réalisé)
30 St Mary Axe, Londres, 1997-2004
Siège de la Hong Kong and Shanghai Banking Corporation, Hong Kong, 1979-1984
Century Tower, Tokyo, 1987-1991
Siège de la Commerzbank, Francfort (Allemagne), 1991-1997
425 Park Avenue, New York, 2016-2022
Banque Nationale du Koweit, Koweit, 2008-2022
DJI Sky City, Shenzen (Chine), 2016-2022
50 Hudson Yard, New York, 2016-2022
270 Park Avenue, New York, 2018-2025
et de Sol LeWitt (1928-2007) : Quatre tours structure, 2007, bois de balsa, peinture
Sur un côté de la salle, quelques autres projets originaux :
Plan directeur pour la ville de Masdar et Institut Masdar, Abu Dhabi (Émirats arabes unis), 2007-2013
Maison des éléphants du Zoo de Copenhague (Danemark), 2002-2008
Grande serre du Jardin botanique du Pays de Galles, Llanarthney (Royaume-Uni), 1995-2000
American Air Museum, Duxford (Royaume-Uni), 1987-1997
Chesa Futura, Saint-Moritz (Suisse), 2000-2004
Rénovation du Reichstag, siège du Bundestag, Berlin, 1993-1999
Grande cour du British Museum, Londres, 1994-2000
Dans la dernière salle, l'incontournable viaduc de Millau, œuvre la plus connue de Foster en France :
Dans cette salle, également quelques autres projets :
Aéroport de Londres-Stansted (Royaume-Uni), 1981-1991
Technodôme Hancook, Daejeon (Corée du Sud), 2013-2016
Et, en cette période de vacances en bord de mer, trois projets marins de Foster + Partners :
Flotte Yachtplus, 2005-2009
Yacht à voiles Panthalassa, 2007-2009
Yacht à moteur Izanami, 1991-1993
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De tout un peu, au quotidien : l'apprentissage de la langue et de l'écriture chinoise, s'il reste un but de l'auteur, est désormais bien loin des sujets abordés...