L'Âge d'or de la peinture anglaise, de Reynolds à Turner

Commençons la série des billets consacrés aux expositions de l'automne avec celle consacrée par le Musée du Luxembourg à la peinture anglaise, en liaison avec la Tate Britain.
Elle vise à "mettre à l'honneur un moment phare de la peinture anglaise, peu représentée dans les collections publiques françaises", et se concentre sur le règne de George III (1760-1820), "période décisive de l'évolution de la société, d'affirmation du pays sur la scène internationale et d'essor artistique et culturel." Nous en suivrons le parcours à travers ses 7 salles.
1. Reynolds et Gainsborough, face à face
Pour le non spécialiste, l'opposition sur laquelle insistent les commissaires de l'exposition reste ténue...
Joshua Reynolds : Autoportrait, vers 1775
Johan Zoffany : Portrait de Thomas Gainsborough, vers 1772
Joshua Reynolds : Lady Bampfylde, 1776-1777
Thomas Gainsborough : Lady Bate-Dudley, vers 1787
Thomas Gainsborough : Gainsborough Dupont, vers 1770-1775
Joshua Reynolds : Mr. Huddesford et Mr. Bampfylde, vers 1778
Joshua Reynolds : L'Honorable Miss Monckton, 1777-1778
Thomas Gainsborough : John Needham, 10ème vicomte Kilmorey, vers 1768
Thomas Gainsborough : Un officier de dragons du 16ème régiment de cavalerie légère, vers 1765
Joshua Reynolds : L'Amiral vicomte Keppel, 1780
Joshua Reynolds : Frederick Howard, 5ème comte Carlisle, 1769
2. Portraits, images d'une société prospère
Apparaissent Francis Cotes, malheureusement disparu précocement, Johan Zoffany, "d'origine allemande et très en grâce auprès de la reine Charlotte", et surtout George Romney qui "bâtit sa réputation sur son indépendance", contrairement à ses prédécesseurs plus courtisans. La mort de Gainsborough (1788) et de Reynolds (1792) va laisser le champ libre à une nouvelle génération : John Hoppner, William Beechey et surtout Thomas Lawrence...
Johan Zoffany : Mrs Woodhall, vers 1770
Francis Cotes : Portrait de dame, 1768
George Romney : Mrs Robert Trotter of Bush, 1788-1789
Gilbert Stuart : Benjamin West, futur président de la Royal Academy, probablement exposé à la Royal Academy en 1781
William Beechey : Thomas Law Hodges, probalement exposé à la Royal Academy en 1795
John Hoppner : Jane Elizabeth, comtesse d'Oxford, 1797
Thomas Lawrence : Mrs Siddons, 1804
3. Dynasties et familles, images d'un entre-soi
"L'évolution du portrait traduit l'importance accrue donnée à l'espace privé, à la vie intérieure..."
Joshua Reynolds : Master Crewe, en Henry VIII et Miss Crewe, vers 1775
George Romney : Mr et Mrs William Lindow, 1772
Francis Cotes : Anna Maria Astley, à l'âge de sept ans, et son frère Edward, à l'âge de cinq ans et deli, 1767
Joseph Wright of Derby : Trois enfants de Richard Arkwright avec une chèvre, 1791
Joseph Wright of Derby : Trois enfants de Richard Arkwright avec un cerf-volant, 1791
Ramsay Richard Reinagle : Garçon lisant, vers 1795
John Hoppner : Miss Harriet Cholmondeley, exposé à la Royal Academy en 1804
Francis Wheatley : Famille dans un paysage, vers 1775
Johan Zoffany : Mr et Mrs Dalton avec leur nièce Mary de Heulle, vers 1765-1768
4. le spectacle de la nature
On assiste à cette époque à la remise en question radicale de la position subalterne qu'occupait jusqu'alors le paysage par rapport au portrait. Par ailleurs, la période des guerres contre la France révolutionnaire, puis napoléonienne, restreignant les possibilités de séjour sur le continent et aux "trésors de l'art classique" donne aux vues champêtres, aux scènes de la vie rurale anglaise, une importante inédite...
Joshua Reynolds : Le colonel Acland et Lord Dudley dit aussi Les Archers, 1769
Francis Cotes : Paul Sandby, 1761
George Stubbs : Couple de Foxhounds, 1792
George Stubbs : Un Hunter gris avec un palefrenier et un lévrier à Creswell Crags, vers 1762-1764
Francis Wheatley : Homme avec un chien, vers 1775
Richard Wilson : La Tamise, près de Marble Hill, Twickenham, vers 1762
George Morland : Intérieur d'une écurie, exposé à la Royal Academy en 1791
Thomas Gainsborough : Paysage boisé avec un bâtiment, vers 1768-1771
Thomas Barker of Bath : Paysage avec des figures et un troupeau de moutons, vers 1815
Joseph Mallord Willam Turner : La Tamise près de Walton Bridges, 1805
John Constable : Malvern Hall, dans le Warwickshire, 1809
5. Peindre à l'aquarelle
Cette technique, jusque là cantonnée à l'apport de couleur aux dessins, va fortement évoluer avec des artistes comme Francis Cowes, Alexander Cozens, John Robert et bien sûr le grand Joseph Mallord Willam Turner. "Mécontents de la manière dont leurs oeuvres étaient accrochées, notamment à la Royal Academy, les aquarellistes se regroupent dans la Society of Painters in Water Colours et organisent leurs propres expositions à partir de 1805.
John Constable : Vue vers l'église de Stratford St Mary, vers 1805
Joseph Mallord Willam Turner :
Lac et Montagnes, vers 1801
Chamonix et le Mont Blanc, depuis les versants de Montenvers, 1801
Partie de la façade de Saint-Pierrede Rome, avec l'Arco delle Campane, 1819
On pourra trouver d'autres aquarelles de Turner dans la collection de Sir Stephen Courtauld (notre billet du 20 avril 2019)
6. Aux frontières de l'Empire
Après le traumatisme qu'a représenté l'indépendance des Etats-Unis, l'Empire se tourne vers l'Est et en particulier vers l'Inde.
Thomas Daniell : Eidgah à Amhora, 1810
Johan Zoffany : Le Colonel Blair avec sa famille et une servante indienne, 1786
John Downman : Sir Ralph Abercromby (?) en compagnie d'un homme, vers 1795-1800
Agostino Brunias : Scène de danse dans les Caraïbes, 1764-1796
William Hodges : Tombe avec une vue au loin sur le massif de Rajmahal Hills, 1782
Thomas Daniell : Ponr près de Rajmahal, dans le Bihar, 1827
7. La peinture d'histoire, contradictions et compromis
Après un déclin de l'intérêt pour la peinture d'histoire, "au sommet de la hiérarchie académique mais qui ne correspondait pas aux besoins de la société marchande britannique", un regain d'intérêt populaire se porte sur les thèmes inspirés du théâtre, avec notamment le peintre d'origine suisse Henry Fuseli, "fin connaisseur de Shakespeare et de Milton, doté d'une imagination fertile".
"C'est dans ce contexte que s'explique le succès de Turner qui repose en partie sur le brillant compromis qu'il sut trouver entre une peinture ambitieuse, résolument construite sur le modèle des grands maître su XVIIème siècle comme Claude Lorrain, et des vues franchement spectaculaires destinées au grand public."
Cette dernière salle débute avec un clin d’œil, cet Autoportrait (1776) de Daniel Stringer, ancien élève de la Royal Academy aspirant à faire de la peinture d'histoire, en attente d'inspiration et de commande devant une toile encore intacte, dans un atelier lugubre qui évoque ses ambitions déçues.
Henry Fuseli : Le Rêve du berger, inspiré du "Paradis perdu" de Milton, 1786
George Romney : Tom Hayley en Robin Goodfellow, 1789-1792
William Blake : Homère et les poètes antiques, 1824-1827
Philippe-Jacques de Loutherbourg : La Vision du Cheval blanc, 1798
Edward Dayes : La Chute des anges rebelles, 1798
Joseph Mallord Willam Turner : La Destruction de Sodome, probablement exposé dans la galerie personnelle de Turner en 1805
L'exposition se termine sur un spectaculaire tableau de John Martin (1789-1854) qui fit sensation lors de sa première exposition personnelle 1822 : La Destruction de Pompéi et d'Herculanum.

Si vous avez une petite faim en sortant de l'exposition, vous pourrez prolonger votre visite au salon de thé Angelina installé dans l'enceinte du Musée, à côté de l'entrée et qui a créé, comme cela devient à présent son habitude, une pâtisserie spéciale pour l'événement...