Irving Penn (1917-2009)

Encore un grand photographe à découvrir ou revisiter en ce moment au Grand Palais, non pas dans la galerie photographique mais, insigne honneur, sous les cimaises habituellement réservées à la peinture et partageant la vedette avec Gauguin.
Célèbre surtout pour sa collaboration de plus de soixante ans avec la magazine Vogue, son oeuvre dépasse de loin les pages glacées des magazines de mode : portraits de personnalités ou de petites gens d'Europe, d'Amérique ou d'Afrique, nus, natures mortes : toutes les facettes en sont présentes dans la rétrospective que nous proposons au lecteur de suivre avec nous en en parcourant les salles.
1. Natures mortes et premières photographies de rue
Avec son premier Rolleiflex acquis en 1938 à l'issue de ses études d'art graphique en travaillant comme assistant au Harper's Bazaar, il s'exerce à la photo de rue ou d'enseignes à la manière de Walker Evans, et réalise ses premières natures mortes pour Vogue où il entre en 1943.
Ta Tooing (The Bowery) (vers 1939), Optician Shop Window (1939), Young Man with Cigarette (1941), 99-Year Old House (1947)
La première couverture de Vogue pat Irving Penn (1943), Girl with Fruit, Shoe and Butterflies (1946), Still Life with Watermellon (1947), New York Still Life (1947), After-Dinner Games (1947), Glove and Shoe (1947)
2. Portraits existentiels (1947-1948)
Âgé d'à peine trente ans et quasi-inconnu, il est chargé par Vogue de photographier des célébrités : ses portraits dépouillés et clairvoyants feront sa notoriété.
1947 : Dali, Max Enrst et Dorothéa Tanning ; 1948 : Marcel Duchamp, Edith Piaf, Igor Stravinsky, la duchesse de Windsor, Martha Graham, Miro et sa fille Dolorès.
1948 : Truman Capote, Cocteau, TS Eliot, Balthus, Marlene Dietrich
3. En vogue 1947-1951
Premières photos de mode, rencontre avec Lisa Fonssagrives, première véritable top-model, qui deviendra sa femme et avec qui il fera ses plus belles photos du genre.
4. Cuzco, 1948 et 8. Le Monde dans un studio
Nous regroupons ici deux salles de l'expositions, celle consacrée à son premier voyage de reportage à Cuzco en 1948, et celle consacrée à ses autres reportages, qui s'inspireront des mêmes modus operandi développés à Cuzco et qui donnent à ses portraits "ethniques" un caractère si particulier.
Les deux premières photos sont de Cuzco (1948), puis Estrémadure (1964), Népal (1967), Dahomey (1967), Maroc (1971)...
...et Nouvelle Guinée (1970)
5. Petits métiers 1950-1951
Ces portraits de professionnels, à Paris, Londres, New-York, parus dans les éditions américaine, française et britannique de Vogue, s'inscrivent dans une tradition ancienne mais sont traités par Penn dans sa manière si particulière...
6. Portraits classiques 1948-1962
Tout au long de sa carrière, Penn continua à faire des portraits qui sont restés uniques...
1950 : Giacometti ; 1951 : Colette, Picasso, Jouvet, Audrey Hepburn ; 1957 : Yves Saint-Laurent
1960 : Frederick Kiesler et Willem De Kooning ; 1962 : Ingmar Bergman ; 1968 : Mme Martin Luther King ; 1971 : Anaïs Nin.
7. Les nus, 1949-1950
Ces recherches personnelles, assez éloignées de ses productions habituelles, ne susciteront aucun intérêt dans les années 50, et la série n’intéressera le public que lorsqu’elle sera exposée en 2002 au Metropolitan Museum of Art à New York.
9. Les Cigarettes (1972)
Comme les nus, ces photos se heurteront à l’incompréhension du public : ces recherches personnelles pourraient avoir pour origine sa réaction à son obligation professionnelle de réaliser des photos de fumeurs à caractère publicitaire, alors qu’on commençait à prendre conscience des méfaits du tabac et que lui-même détestait le tabac.
Les deux dernières salles (Natures mortes tardives, Moments du passé) présentent des recherches personnelles plus tardives et des portraits et photographies de mode des années 60 à la première décennie du XXIème siècle qui témoignent à la fois de la continuité de l’artiste dans sa démarche et de l’évolution de son regard.
Deli Package (1975), Still Life with Shoe (1980), Still Life with Triangle and Red Eraser (1985), Mouth (for L'Oréal), 1986 ; Ripe Cheese (1992), Two Miyake Warriors (1998), Three Tiered Vessel (2007)
Cottage Tulip 'Sorbet' (1967), Single Oriental Poppy, Poppy 'Barr's White', Poppy 'Burgondy (1968), Three Poppies 'Arab Chief (1969), Persan Violet Cyclamen (vers 1973)
Hippie Family (Kelly) 1967, Hell's Angel (Doug) 1967, Naomi Sims in Scarf (vers 1969), Richard Avedon (1978), Issey Miyake (1988), Yves Saint-Laurent Blouse (2005).
Journées d'études vosgiennes : Martigny-les-Bains

Nous consacrons un nouveau billet à la sympathique manifestation que constituent les journées annuelles des études vosgiennes (cf. notre billet du 14 octobre).
Il relatera le passionnant exposé de notre ami Jean-Pierre Doyen, de la Société d'émulation des Vosges, sur l'histoire tourmentée du thermalisme à Martigny, en vous présentant le diaporama qui a servi de support à sa conférence et qu'il nous a comme à son habitude aimablement communiqué.
Sous le titre "L'éphémère Versailles thermal", il comporte trois parties :
- La fièvre thermale (1859-1903)
- La Belle Epoque (1905-1914)
- Une station fantôme
La première partie présente les personnes à l'origine des premiers investissements, les avatars des sociétés d'exploitations et se sont succédé les unes aux autres au fil des faillites, les équipements primitifs, la création du parc sur le modèle des grands jardins réalisés à Paris par Alphand sous le second Empire, enfin l'Hôtel International, palace qui par la médiocre qualité de sa construction et de ses équipements, s'avéra être un désastre financier...
Le début du siècle, jusqu'au déclenchement de la Grande guerre, fut au sens propre la "Belle époque" de la station, enfin gérée de façon efficace et parvenant à trouver son public.
Les équipements sont modernisés, complétés, les loisirs s'y développent avec les clubs sportifs, le casino, le parc thermal...
...jusqu'au déclenchement du conflit mondial qui porte à la station un coup fatal dont elle ne se relèvera pas : dans sa dernière partie, le conférencier évoque l'activité de l’hôpital installé dans les hôtels de la station thermale, qui verra passer quelques 14 000 malades et blessés, les vaines tentatives de redémarrage de l'après-guerre, quelques épisodes comme l'accueil de réfugiés juifs d'Allemagne à la fin des années 30.
Il conclut en présentant le très beau patrimoine que conserve Martigny, avec le pavillon des Sources, chef d'oeuvre d'architecture métallique et le parc qui a conservé tout son charme.
Journées d’études vosgiennes : autour de Lamarche
Comme chaque année, la fédération des sociétés savantes des Vosges organise à l’automne les Journées d’Études Vosgiennes. Dans une localité du département, quatre jours de conférences réunissent les érudits locaux et un public avide de s’instruire. Elles se tenaient cette fois à Lamarche : nous rendons compte dans ce billet de l’après-midi de la visite organisée par notre ami Jean-Pierre Doyen : Paysages et patrimoine au Sud-Est de Lamarche : Aureil-Maison, Serécourt, Isches.
Première étape ; la charmante petite église d’Auteil-Maison
À ’intérieur, une belle architecture rénovée avec peut-être un trop d’ardeur mais où l’harmonie des volumes reste très belle.
...avec deux intéressantes statues, une vierge assise du XIIème siècle et une mater dolorosa du début du XVIème.
Deuxième étape : Isches avec son église...
...l’intérieur et son beau mobilier du XVIIIéme siècle ...
...et ses peintures murales du XIVème siècle.
Toujours à Isches, un très beau château dont les courageux propriétaires ont entrepris la restauration.
L’ensemble formé par le corps de bâtiments communs et la maison de maître présente une harmonie subtile.
Dernière étape : Serécourt, avec son étrange église...
...aux contreforts impressionnants et au chevet plat...
...et l’intérieur à deux vaisseaux.
Parmi le mobilier, une belle Vierge du début du XVIème siècle et un autel ancien dédié à Sainte Pétronille.
Terminons la visite de Serécourt avec une petite touche personnelle : la maison où chaque année, enfant, je venais avec mes parents rendre visite à « Nini » Jeandidier, une lointaine parente ou alliée qui y tenait une petite école libre pour les enfants du village.
Société des Cendres

Un mini-blog consacré à la conservation du patrimoine industriel, sujet cher à un de nos fidèles lecteurs - et contributeur à ce blog (cf. notre billet du 10 septembre dernier).
Au 39 de la rue des Francs-Bourgeois, à Paris, une boutiques de vêtements a priori banale accueille le chaland sous un porche où la discrète et un peu inquiétante inscription "Société des Cendres" a déjà de quoi un peu surprendre...
Une fois l'entrée franchie, la boutique se révèle être un impressionnant hall d'usine, où culmine, traversant la verrière, une cheminée de briques de plus de trente mètres
En descendant au sous-sol, entre les espaces de vente, une maquette de l'usine qui occupait ces lieux permet d'en comprendre la transformation. Des vitrines de chaque côté d'un passage présentent des machines et des outils qui s'y trouvaient.
Des panneaux explicatifs à l'entrée du magasin présentent Uniqlo, marque qui appartient à un groupe japonais propriétaire de plusieurs autres marques connues comme le Comptoir des cotonniers et qui occupe aujourd'hui ces locaux...
...et surtout l'histoire des lieux, où l'on apprend que l'usine de la société des cendres, créée en 1859 pour exploiter les déchets des bijoutiers, orfèvres, joailliers, et autres professions utilisant des métaux précieux, a été sauvée d'une destruction qui la menaçait au nom de la préservation du caractère historique du Marais, au prétexte qu'elle était postérieure à l'époque des hôtels aristocratiques qui le parsèment.
Une belle histoire qui contredit la vision d'un Paris se transformant en ville-musée...
Archives nationales

Par cette belle journée d'automne, se promener dans Paris permet de belles découvertes.
En franchissant le porche du domaine des Archives nationales, rue des Francs-Bourgeois pour essayer de s'extraire de la foule des piétons du samedi après-midi, un havre de paix vous accueille, avec, sous le majestueux péristyle qui mène à l'hôtel de Soubise, une exposition de toiles monumentales du jeune peintre colombien José Fernando Munoz, "Sur-Ville", installée dans le cadre de l'année de la Colombie en France.
Pour citer la directrice des Archives nationales, "le péristyle de la cour d’honneur de l’hôtel de Soubise, l’un des plus grands et des plus beaux hôtels princiers construits à Paris au XVIIIe siècle, sert d’écrin à la présentation des reproductions, en grandes dimensions, des toiles d’un jeune artiste de talent inspiré par les paysages et le quotidien de nos villes contemporaines. La mise en perspective proposée aux visiteurs, dans un site construit dans le respect des canons de l’architecture classique, est particulièrement originale".
A gauche de l'entrée : Interseccion, Balance, The Gap, Cientos, The People.
A droite, Utopicos, Grope, Vacios.
Quittant le péristyle, le promeneur accède aux jardins qui agrémentent le domaine des archives entre les différents hôtels ou bâtiments qui composent son site parisien.
Un petit jardin anglais derrière les hôtels d'Assay et de Breteuil..
Un autre petit jardin derrière l'hôtel de Fontenay
et, en longeant l'austère mais élégant bâtiment de conservation qui longe l'ancienne ruelle de la Roche...
...la belle perspective qui s'étend devant l'hôtel de Rohan, apothéose de cette courte visite