Signac collectionneur (1/2)
/image%2F1508962%2F20220128%2Fob_04e3d8_74495-xl.jpg)
Encore une très belle exposition au musée d'Orsay, avec des œuvres d'une grande variété, et qui donne l'occasion de revoir quelques chefs d'œuvre.
Paul Signac (1863-1935) collectionne surtout les œuvres de ses contemporains. Figure de proue du néo-impressionnisme, membre fondateur du Salon des Artistes indépendants créé en 1884, grand organisateur d'expositions, il est en effet au cœur de l'actualité artistique. L'amitié jouant un grand rôle dans sa vie, les échanges entre peintres et les cadeaux contribuent largement à l'enrichissement de sa collection. Issu d'une famille de commerçants aisés, Signac achète aussi auprès d'artistes souvent moins favorisés que lui ou sur le marché de l'art. En 1906, son ami le journaliste et critique d'art Félix Fénéon est engagé par la célèbre galerie parisienne Bernheim-Jeune et devient son marchand. Dès lors, Signac acquiert régulièrement des tableaux auprès de cette galerie. Sans surprise, ses choix reflètent une prédilection pour la couleur pure. Militant de la cause « néo », Signac aime convaincre ses interlocuteurs, et les tableaux qu'il accroche aux murs de ses résidences, à Paris comme à Saint-Tropez, illustrent ses idées. Il reçoit chez lui peintres, marchands et critiques d'art. Parmi eux. les premiers historiens de l'impressionnisme, Julius Meier-Graefe et surtout John Rewald, qui retiennent que la filiation entre l'impressionnisme et le fauvisme s'opère via le néo-impressionnisme.
L'exposition ouvre sur quelques œuvres de Paul Signac :
Route de Gennevilliers, huile sur toile, 1883
Herblay. Brouillard. Opus 208, huile sur toile, 1889
Femmes au puits. Opus 238, huile sur toile, 1892
Les Andelys. La Berge, huile sur toile, 1886
Saint-Tropez. La Bouée rouge, huile sur toile, 1895
Avignon. Soir (le château des Papes), huile sur toile,, 1909
La Voile verte (Venise), huile sur toile, 1904
Les maîtres
Autodidacte et admirateur de Monet, Degas, Caillebotte et Guillaumin, Signac tente dès l'adolescence de convaincre sa famille d'acheter de la peinture impressionniste. Il se forme en regardant leurs œuvres, dont certaines trouveront place dans sa collection. À l'issue de la vente posthume d'Édouard Manet en 1884, il ne peut s'offrir qu'un dessin mais, dès qu'il reçoit, à 21 ans, une somme mise de côté pour lui, il achète La Plaine de Saint-Ouen-l'Aumône, vue prise des carrières du Chou, un Cézanne qu'il conservera toute sa vie. Si l'art de Claude Monet déclenche la vocation de peintre de Signac, ses œuvres entreront dans sa collection tardivement, pour des raisons financières, avec Le Village de Lavacourt et Pommier en fleurs au bord de l'eau, acquis respectivement vers 1930 et 1932. Armand Guillaumin, qu'il rencontre en 1884, est le premier peintre à le conseiller, Signac acquiert sa peinture Quai de la Rapée. Grâce à lui, il entre en relation avec Camille Pissarro qui sera un maître bienveillant. Il lui achète notamment une œuvre néo-impressionniste, Le Troupeau de moutons, Éragnysur-Epte (1888). C'est par son intermédiaire qu'il achète son premier Degas en 1887, Avant le lever de rideau : plusieurs dessins rejoindront ensuite sa collection, notamment après les ventes qui suivent le décès de l'artiste en 1918. Parmi les maîtres collectionnés, il faut citer encore Eugène Boudin (6 œuvres) et Johan Barthold Jongkind (1 peinture 15 dessins, 2 eaux-fortes et 26 aquarelles) ainsi que les artistes japonais (une quinzaine d'estampes et une vingtaine d'albums illustrés) dont l'art est pour Signac une source majeure d'inspiration.
Eugène Delacroix (1798-1862) : Mazeppa, plume et aquarelle sur papier, non daté
Johan Barthold Jongkind (1819-1891) :
Anvers, aquarelle et crayon sur papier, 28 septembre 1866
Le Chaland, canal de Willebroek, aquarelle et crayon sur papier, 1866
Eugène Boudin (1824-1898) :
Étude de ciel, pastel, non daté
Bateaux de pêche par temps gris, huile sur bois, 1888-1890
Armand Guillaumin (1841-1927) : Quai de la Rapée, huile sur toile, vers 1880-1881
Camille Pissarro (1830-1903) :
Paysannes au bois, huile sur toile, 1881
Paysanne assise, pastel sur papier, vers 1880-1882
Paysans, retour de marché, aquarelle et crayon sur papier, vers 1880-1885
Enfants jouant, dit aussi Enfants au jardin, aquarelle, 1887
Le Troupeau de moutons, Éragny-sur-Epte, huile sur toile, 1888
Paul Cézanne (1839-1906) :
Trois poires, dit aussi Les Trois Poires : Nature morte, huile sur toile, 1878-1879
La Plaine de Saint-Ouen-l'Aumône vue prise des carrières du Chou dit aussi Auvers-sur-Oise, huile sur toile, vers 1880
Pierre-Auguste Renoir (1841-1919) ; Deux paysages et une nature morte, huile sur toile, non daté
Claude Monet (1840-1926) : Pommier en fleurs au bord de l'eau, huile sur toile, 1880
Edgar Degas (1834-1917) :
Deux danseuses en maillot (Arlequin et Colombine), fusain gras sur papier, 1892
Plusieurs autres dessins de la même période
Edouard Manet (1832-1883) : La Belle Polonaise, lavis d'encre de Chine et crayon sur papier, vers 1878
Cette section se termine sur les artistes japonais :
Katsushika Hokusai (1760-1849) :
La Manga, deux des quatorze volumes d'illustrations publié de 1814 à 1878
Deux œuvres hautes en couleurs dont nous n'avons pas relevé l'auteur ni la date
et quatre belles gravures sur bois en couleurs nishiki-e, ôban tate-e, triptyque :
Utagawa Hiroshige (1797-1858) : Épisode de la vie de Minamoto no Yoshitsune (1159-1189), non daté
Utagawa Kusinada (1786-1865) :
Scène nocturne sur la terrasse d'un restaurant, non daté
Un prince, une princesse et des dames de la cour naviguant sur l'étang d'un jardin sous une pleine lune en juin, illustration probable d'un épisode du Dit du Genji, 1849-1850
Utagawa Yoshitsuya (1822-1868) : Yoshitsune et ses dix-neuf serviteurs dans un bateau (Yoshitsune jûku shin), 1847-1852
Georges Seurat
Signac rencontre Georges Seurat en 1884 lors du premier Salon des Artistes indépendants. Malgré des formations et des tempéraments radicalement différents, ils se lient d'amitié et s'intéressent ensemble aux thèses scientifiques contemporaines autour de la perception de la couleur (Charles Blanc. Eugène Chevreul, Charles Henry et Ogden Rood). À cette époque, Signac admire l'art de Monet et peint de façon impressionniste. Mais tout change au cours de l'hiver 1885-1886, quand Seurat reprend son œuvre Un dimanche après-midi à l'île de la Grande Jatte (1884-1886). Il ponctue la toile de petites touches de couleurs pures, laissant à l'œil du spectateur le soin d'opérer, à distance, la fusion des tons. D'emblée, Signac adopte cette nouvelle technique, bientôt baptisée « néo-impressionniste », et qui ne tarde pas à faire de nombreux adeptes. Quand Seurat meurt brutalement en 1891, Signac devient le chef de file du mouvement et défend la mémoire de son ami disparu. Très tôt, il collectionne ses œuvres, réunissant un ensemble exceptionnel de plus de 80 dessins, études, esquisses et tableaux, recouvrant tous les aspects et toutes les périodes de l'art de Seurat.
Georges Seurat (1859-1891) : Portrait de Paul Signac, crayon Conté sur papier, 1890
Le Cirque, huile sur toile, 1891
Quand Seurat meurt en 1891, son dernier tableau, Le Cirque, apparaît comme son testament artistique. Bouleversé, Signac s'efforce dès lors d'honorer la mémoire de son ami, collectionne ses œuvres avec passion et achète Le Cirque en 1900. Obligé de se séparer en 1923 de ce fleuron d'un ensemble de plus de 80 peintures et dessins de Seurat, il n'accepte de le céder à John Quinn, un collectionneur américain, que sous la promesse de le léguer au Louvre. En 1924, Le Cirque est ainsi le premier Seurat à entrer dans les collections nationales.
Chahut, esquisse, huile sur toile, 1889
Si Signac s'intéresse de près aux travaux préparatoires de ses confrères, c'est notamment parce qu'il y trouve un enseignement. Ici, son choix s'est arrêté sur la seconde esquisse de Chahut (1889-90), une grande toile de Seurat empreinte d'un humour caricatural. Tous les éléments de la composition finale sont déjà présents dans cette esquisse de moyennes dimensions, jusqu'à la bordure et au cadre peint, auxquels Seurat prête toujours un soin particulier.
La Seine à Courbevoie, huile sur toile, 1895
Le Tas de pierres, dit aussi Casseurs de pierre, huile sur toile, vers 1884
et trois petites esquisses de tableaux :
Poseuse debout, esquisse, dit aussi De face
Petite esquisse des Poseuses
Aman-Jean en Pierrot
Trois études de paysages de petite dimension :
Le Fort Samson à Grandcamp
Abords du village
Gravelines : un soir
et trois autres petites études pour Un dimanche après-midi à l'île de la Grande Jatte (1884-1885)
Trois dos
Couseuse
Paysage, homme assis, femme étendue
Nous invitons le lecteur à patienter jusqu'à un prochain billet pour la fin du parcours de cette si riche exposition.
Au pays du diamant noir
/image%2F1508962%2F20220121%2Fob_8b9b7e_img-4343.jpg)
Un billet touristique aujourd'hui : un week-end en Périgord où nous sommes allés "caver" chez nos bons amis.
Tout d'abord, quelques aspects de cette si belle région.
Lalinde, au bord de la majestueuse Dordogne
Son petit port sur le canal, avec la statue de la Coulobre, le dragon local qui figure sur les armes de Bergerac.
Une troupe d'oies (sauvages ?) au bord du fleuve
Le barrage et la centrale hydroélectrique de Mauzac
Le beau pont ferroviaire de Mauzac, construit en 1878 par la Compagnie du Paris-Orléans pour la ligne Bordeaux-Sarlat, seul pont à arches elliptiques sur la Dordogne.
Un pèlerinage au village de Trémolat, lieu de tournage du film de Claude Chabrol Le Boucher, avec Jean Yanne et Stéphane Audran.
La belle mairie-école, où Stéphane Audran jouait l'institutrice, et la cour où jouaient ses élèves
Un hôtel au restaurant étoilé, et ses spécialités aux truffes du chef Vincent Arnould
avec sa salle à manger aménagée dans un ancien séchoir à tabac
son fumoir pour les amateurs de havanes
et des salons plus cosy pour les dames
Dans l'élégant jardin,
vue d'un côté sur le bourg...
et de l'autre sur la charmante petite église Saint-Hilaire (12ème siècle), qui était autrefois l'église paroissiale, l'église Saint-Nicolas étant l'église monastique...
...au centre du bourg, vers lequel nous dirigeons ensuite nos pas.
L'église monastique Saint-Nicolas est un très intéressant monument, des XIème et XIIème siècle, avec une file de coupoles sur pendentifs.
Le prieuré est mentionné dès 852 dans un diplôme de Charles-le-Chauve comme dépendant de l'abbaye bénédictine de Saint-Cybard, d'Angoulême.
Un intéressant autel du début du XVIIIème siècle, mis en place par Guillaume II, marquis d'Alesme, prieur commendataire.
Les boiseries du fond de l'église ont été déposées en 1979 pour permettre l'examen des peintures médiévales de la dernière travée du chœur.
De l'emplacement de l'ancien cloître, une vue sur le clocher-donjon de cette église fortifiée.
Nous remontons sur les hauteurs pour admirer le cingle de Trémolat, représenté sur le panneau à côté de celui de Limeuil, juste en amont.
Le cingle, vu du contrefort qui le domine au nord.
La petite église Saint Pierre Saint Paul de Grand Castang
une intéressante toiture dans le village
et le vieux puits au milieu du village.
Passons à Sainte-Alvère, avec son église Saint-Pierre-ès-Liens (XVIIIème siècle)
et son ancien presbytère, dont on découvre la façade sur jardin après un détour qui offre une belle vue sur le chevet de Saint-Pierre-ès-liens.
Un peu plus loin, le village de Paunat avec sa belle église Saint-Martial, église d'un prieuré fondé au IXème siècle et dépendant de l'abbaye Saint-Martial de Limoges. L'église primitive ayant été détruite par les Normands, l'édifice actuelle, avec son clocher porche, a été construit principalement au XIIème siècle.
Au couchant, nous passons par Limeuil,
qui domine le confluent de la Vézère et de la Dordogne.
Passons à la partie "cavage", dans la propriété de nos amis.
La truffe se repère à la mouche, sulliae gigantea. Il faut aussi y mettre le nez, si la mouche a déserté les lieux. Si le froid décourage l'insecte, le chien Félix prend le relais...
Il faut ensuite creuser délicatement - ici, avec une corne de chevreuil - pour voir sa quête récompensée...
Le soir venu, il faut soigneusement débarrasser le champignon de sa gangue de terre et vérifier la fraîcheur de la gléba par un léger coup de canif
Terminons avec le coeur battant de l'activité truffière de la contrée, le marché de Sainte-Alvère, qui se tient tous les lundi matins à la saison.
Après un coup d'œil sur l'espace pédagogique,
Nous descendons vers le marché qui se tient devant l'église Saint-Pierre-ès-liens. La foule des acheteurs, au premier rang desquels chefs et courtiers, attend l'ouverture des portes à 10H précises ; les apporteurs ont eux été convoqués à 9H pour que chaque tubercule proposé à la vente soit contrôlé et classé en 1ère ou 2éme catégorie - ou refusé!
Ce lundi, seulement une quarantaine de kilos étaient proposés à la vente, et le marché s'est achevé assez rapidement...
Baselitz - La rétrospective (2/2)
/image%2F1508962%2F20220112%2Fob_7f9e9e_img-7319-1.jpg)
Nous terminons la visite de la rétrospective Baselitz au Centre Pompidou (cf. notre billet du 8 janvier 2022). En guise de frontispice, une version géante de la sculpture Zero Dom, bronze, 2021, érigée pour la durée de cette rétrospective sur le parvis de l'Institut de France. En effet, Georg Baselitz a été élu le 23 octobre 2019 à l'Académie des Beaux-Arts, en qualité de membre associé étranger et y a été installé le 27 octobre dernier.
Nous débuterons avec une des grandes salles installées autour d'une sculpture de l'artiste,
Au-delà de l'abstraction
Dès 1977, Baselitz réunit une collection d'art africain qui compte aujourd'hui parmi les plus importantes au monde et qui l'a considérablement inspiré pendant la naissance de son travail de sculpteur, ainsi qu'au fil de ses différents motifs. En 1980, pour représenter la RFA à la Biennale de Venise, il expose sa première sculpture Modell für eine Skulptur [Modèle pour une sculpture], seule au centre du hall du pavillon allemand. Inspiré de figures lobi qui lèvent le bras pour tendre la paume de la main vers le ciel, le geste représenté, trop proche du salut hitlérien, déclenche un nouveau scandale médiatique. Cette fois cependant, l'inventivité dans la manière de créer un lien entre la sculpture tribale, l'art brut et la sculpture en bois de l'Allemagne médiévale apporte à l'artiste une renommée internationale. Ses motifs picturaux variant entre des autoportraits et des représentations de corps dans diverses positions (à la plage, buvant) s'inscrivent sur des fonds abstraits dont la palette évoque celle des peintres expressionnistes.
Autour de Modell für eine Skulptur [Modèle pour une sculpture], bois de tilleul et tempera, 1979-1980, sept grandes toiles :
Gebeugter Trinker [Buveur penché], huile sur toile, 1982
Bucklinger Trinker [Buveur bossu], huile sur toile, 1981
Frau am Strand [Femme à la plage], huile sur toile, 1981
Die Mädchen von Olmo II [Les Filles d’Olmo II], huile sur toile, 1981
Mein Vater blickt aus dem Fenster IV [Mon père regardant par la fenêtre IV], huile et tempera sur toile, 1981
Mein Vater blickt aus dem Fenster I [Mon père regardant par la fenêtre I], huile et tempera sur toile, 1981
Adieu, huile sur toile, 1982
La poésie du quotidien
Parallèlement à la peinture, Georg Baselitz crée des dessins et gravures à travers lesquels il explore davantage les motifs qui le préoccupent périodiquement. Au début des années 1980, il s'intéresse à la représentation du corps dans des actions volontairement banales, dévoilant ses maladresses. L'artiste expose ainsi sa vision théâtrale et poétique de la vie quotidienne et de la condition humaine.
Profilkopf [Tête de profil], xylographie à partir de deux plaques, 1982
Gebeugter Kopf [Tête penchée], xylographie, 1982
Lesender Mann [Homme lisant], xylographie, 1982
Zeichnungen zu den Strandbildern [Dessins pour les Tableaux de plage], ensemble de dessins craie noire, mine graphite, encre bleue sur papier, 1981
Orangenesser (KON-GO KON-GO) [Mangeur d'orange (KON-GO KON-GO)], linogravure à partir de deux plaques, 1981
et au fond de cette petite salle, une sculpture Ohne Titel [Sans titre], bois de peuplier, 1982-1983
Zeitgeist
En 1982, Baselitz crée Le Joueur de tambour (1982) montrant un homme nu tambourinant (ou luttant ?) entre des aplats de couleurs, le noir, le rouge et l'or évoquant le drapeau allemand. La même année, pour l'exposition « Zeitgeist » au Martin-Gropius-Bau, alors situé à proximité immédiate du mur de Berlin, Georg Baselitz crée la série Mann im Bett [Homme au lit] (1982). Installées en hauteur lors de leur présentation initiale, ces peintures monumentales semblent flotter dans l'espace telles des fenêtres inaccessibles montrant des individus isolés, menacés et exclus de la société. Les titres et motifs des tableaux correspondent librement avec Plainte (II) (1914), l'un des derniers poèmes du poète expressionniste austro-hongrois Georg Trakl.
Cette salle est organisée autour d'une grande statue Ohne Titel [Sans titre], bois de tilleul et peinture à l'huile, 1982-1983
Kopf in der Sonne [Tête au soleil], huile sur toile, 1982
Mann im Bett [Homme au lit], huile sur toile, 1982
Sterne im Fenster [Étoiles dans le fenêtre], huile sur toile, 1982
Der Trommler [Le joueur de tambour], huile sur toile, 1982
Franz im Bett [Franz au lit], huile sur toile, 1982
Weg vom Fenster [S'éloigner de la fenêtre], huile sur toile, 1982
Adler im Fenster [Aigle dans la fenêtre], huile sur toile, 1982
Hommage à Munch
Georg Baselitz entame avec cette autre série créée en 1982 une correspondance picturale avec les silhouettes peintes par Edvard Munch, réinterprétant notamment ses tableaux Autoportrait en enfer (1903) et Le Noctambule (1923-1924)
Das letzte Selbstbildnis II [Le Dernier Autoportrait II], huile sur toile,1982
Deux huiles sur toile Ohne Titel [Sans titre], 1982
Rotschopf [Rouquin], huile sur toile,1982
Mahler mit Segelschiff [Peintre avec voilier], huile sur toile,1982
Edvard form Spiegel [Edvard devant le miroir], huile sur toile,1982
L’espace des souvenirs
En novembre 1989, alors que le mur de Berlin vient de tomber, Baselitz plonge dans ses souvenirs d'enfance, ceux de la ville de Dresde détruite après les bombardements de 1945, qu'il découvre à l'âge de sept ans. Pendant l'année 1990, il poursuit ce travail de mémoire en rendant hommage aux Trümmerfrauen, ces femmes qui ont déblayé les villes pierre par pierre et activement participé à leur reconstruction, avec la série de sculptures intitulée Dresdner Frauen [Femmes de Dresde] (1990). Entre 1991 et 1995, l'artiste cherche à traduire son ressenti et crée un ensemble de 39 tableaux monumentaux, Bildübereins [Tableau-sur-un-autre). Il y superpose des têtes, bustes ou corps de facture toujours plus abstraite, parfois réduits à des tâches de couleurs, à des grilles de motifs abstraits - que l'artiste appelle des « ornements ». Ces grands formats nécessitent un travail au sol, pratique que l'artiste utilise encore aujourd'hui.
Dresdner Frauen - Besuch aus Prag [Femmes de Dresde - Visite de Prague], bois de frêne et tempera, 1990
Dresdner Frauen - Die Elbe [Femmes de Dresde - L'Elbe], bois de frêne et tempera, 1990
Dresdner Frauen - Die Wendin [Femmes de Dresde - La femme wende], bois d'érable et tempera, 1990
Bildneunundzwanzig [Tableau-vingt-neuf], huile sur toile,1994
Bildsechsundzwanzig [Tableau-vingt-six], huile sur toile,1994
Bildnzwölf [Tableau-douze], huile sur toile,1992
et le plus coloré, dont je n'ai pas noté le numéro...
Des Tableaux russes à Remix
Choqué par la découverte des dossiers le concernant établis par la Stasi en RDA, Baselitz écrit en mars 1997 le texte Wir besuchen den Rhein [Nous visitons le Rhin]. Il y évoque la façon dont cette expérience influence son état d'esprit comme son travail. À partir de 1998 et jusqu'à 2005, il revisite les souvenirs de sa jeunesse est-allemande et l'imagerie de propagande diffusée en RDA dans un cycle intitulé Russenbilder (Tableaux russes).
Braunung [Brunissement], huile sur toile, 2009
In the Works Canteen (Kobozev) [Dans la cantine des travailleurs (Kobozev)], huile sur toile, 1999
Irgendwann vergessen - Sandteichdamm [Oublié un jour - Digue du Sandteich], huile sur toile, 2009
Anxiety I (Korzhev) [Anxiété I (Korzhev)], huile et fusain sur toile, 1999
En 2006, Georg Baselitz et sa femme vendent le château de Derneburg et emménagent sur les rives de l'Ammersee, en Bavière. Cette nouvelle étape inspire à l'artiste un travail d'introspection sur ses sources d'influences et ses propres tableaux qui donne naissance au cycle Remix - selon le terme utilisé en musique. Baselitz joue avec les compositions existantes, y ajoute des références nouvelles et rend hommage à des artistes qu'il vénère, tel Otto Dix (1891-1969).
Pauls Hund (Remix) [Le Chien de Paul (Remix)], huile sur toile, 2008
Olmo-Mädchen (Remix) [Filles d'Olmo (Remix)], huile sur toile, 2006
Moderner Maler (Remix) [Peintre moderne (Remix)], huile sur toile, 2007
Modell war ein Roter (Remix) [Le modèle était un rouge (Remix)], huile sur toile, 2008
Elkeporträt (Portrait d'Elke], huile sur toile, 2010
Franz Marc, mine graphite et encre de Chine sur papier, 2018
Sch. R. und seine Frau [Sch. R. et sa femme], mine graphite et encre de Chine sur papier, 2018
F. P., mine graphite et encre de Chine sur papier, 2018
Erich Heckel, mine graphite et encre de Chine sur papier, 2018
Gute Nacht [Bonne nuit], encre de Chine et aquarelle sur papier, 2001
Marcel Duchamp, encre de Chine et aquarelle sur papier, 2001
Ce qui reste
Les silhouettes évanescentes qui se fondent dans la matière picturale obsèdent l'artiste ces dernières années. Leur composition découle du premier double portrait de l'artiste avec sa femme Elke, intitulé Schlafzimmer [Chambre à coucher] (1975), dans lequel le couple est représenté nu assis sur deux chaises. Ces tableaux sont aussi inspirés par le double portrait des parents d'Otto Dix (un peintre que Baselitz vénère) assis sur un canapé (Les Parents de l'artiste II, 1924). Souvent peintes sur de très grands formats, les formes de ces silhouettes sont obtenues à l'aide de matrices dont les empreintes sont appliquées sur des fonds unis préalablement peints.
In der Tasse gelesen, das heitere Gelb [Lu dans la tasse, le jaune enjoué], huile sur toile, 2010
Springtime of the Black Mountain lake [Printemps au lac de Black Mountain], huile sur toile, colle à dispersion et bas nylon sur toile, 2020
Gold drauf und drunter [Or par-dessus et par-dessous], huile et vernis doré sur toile, 2019
Schatten ist nicht drin [Dedans il n'y a pas d'ombre], huile et vernis doré sur toile, 2019
Sandteichapotheke I [Pharmacie du Sandteich I], huile sur toile, 2018
Oberimzinn [Millondansver], huile sur toile, 2010-2013
Wagon-lit mit Eisenbett [Wagon-lit au lit en fer], huile sur toile, 2019
Ein weißes Bild mit Ottos Sofa [Un tableau blanc avec le canapé d'Otto], huile sur toile, 2016
Ach, rosa, ach, rosa [Ah rose, ah rose], huile sur toile, 2015
Cette dernière salle est organisée autour de la sculpture en bronze patiné Winterschlaf [Hibernation] de 2014. Cette sculpture, dont la matrice a été taillée à vif dans le bois, est de même facture que celle érigée devant l'Institut de France, qui figure au début de ce billet.
Pour aller plus loin : cérémonie de réception de Georg Baselitz à l'Académie des beaux-arts.
Baselitz - La rétrospective (1/2)
/image%2F1508962%2F20220106%2Fob_f8a517_img-3073.jpg)
Georg Baselitz, né en 1938 près de Dresde en Saxe, étudie l'art en République démocratique allemande, avant de passer à Berlin-Ouest. C'est là que commence sa carrière avec une première exposition en 1963 qui fait scandale. Réfutant dès ses débuts tout dogme artistique, il met en scène une iconographie sombre et hybride, peuplée de mythes et de légendes. Il se tourne par la suite vers des sujets plus ordinaires et fait de la recherche picturale le véritable objet de son art. Le renversement du motif tête en bas, auquel il aboutit en 1969, est désormais considéré comme la marque de l'artiste. Pour celui qui a connu deux régimes totalitaires, nazi puis soviétique, cette méthode est à la fois un moyen d'affirmer sa liberté artistique, de préserver la présence de sujets qui lui sont chers et de questionner ce que nous cherchons à voir ou à reconnaître. Ce sont les moments forts de soixante années de création que le Centre Pompidou a choisi de présenter.
À la découverte des avant-gardes
G. Antonin, huile sur toile de jute, 1962 (en référence à Antonin Artaud)
G.- Kopf [Tête - G.], huile sur toile, 1960-1961
Hommage à Charles Meryon, huile sur toile, 1962-1963
Ici, l'artiste fait honneur au graveur français Charles Meryon (1821-1868) et s'inspire plus précisément de l'ambiance inquiétante de son dessin Bateau de pêche aux voiles gonflées par mer houleuse (1857, Paris, Musée d'Orsay). Alors que dans l'oeuvre de Meryon, les tons blancs, bleus et gris dominent, Baselitz utilise ici des tons rouges-bruns. Il évoque ainsi le daltonisme de Meryon et transforme le paysage maritime en une scène inquiétante.
Autoportraits d'un vécu
Die große Nacht im Eimer [La Grande Nuit foutue], huile sur toile, 1962-1963
Révolté par la découverte des horreurs commises par Adolf Hitler et le régime national-socialiste, Georg Baselitz exprime ici sa colère. Pour créer ce personnage abîmé, il s'inspire de l'anecdote d'une lecture du poète irlandais Brendan Behan (1923-1964) pendant laquelle celui-ci a ouvert son pantalon. La première exposition de cette œuvre dans une jeune galerie à Berlin-Ouest en octobre 1963 fait scandale et déclenche un procès très médiatisé pour atteinte à la pudeur. Lorsque Baselitz revisitera cette œuvre dans la série Remix en 2005, le personnage prendra plus clairement l'allure du dictateur.
Oberon (1er salon orthodoxe 64 - E. Neïzvestny), huile sur toile, 1963-1964
Dans cet autoportrait hallucinatoire, Baselitz se représente en Oberon, roi des elfes, démultiplié en quatre têtes au regard vitreux et au cou démesurément long. Le sous-titre fait référence à l'exclusion du sculpteur soviétique Ernst Neïzvestny (1925-2016) de l'Union des artistes, ses œuvres ayant été jugées « dégénérées » par Nikita Khrouchtchev.
Der nackte Mann [L'Homme nu], huile sur toile, 1962
Der Haken [Le Crochet], huile sur toile, 1962
Sur tout un mur de cette salle, une série de pieds et de mains de 1960-1963 dont les titres comportent tous les initiales P. D. pour Pandemonium en référence à la capitale imaginaire des enfers.
Des Héros déchus
En 1965, Georg Baselitz obtient une bourse pour séjourner six mois à la Villa Romana de Florence. Sensible à la démarche volontairement non académique des peintres maniéristes au 16e siècle, c'est pour lui l'occasion d'étudier leurs motifs et la manière dont ils utilisent les distorsions dans leurs compositions. Dès son retour à Berlin, il peint l'œuvre B.j.M.C - Bonjour Monsieur Courbet (1965) qui contribue à la création d'un nouveau corpus d'œuvres intitulé de manière provocatrice Ein neuer Typ [Un nouveau type], plus tard connu sous l'appellation des Helden (Héros). Baselitz prend ici comme point de départ l'iconographie des représentations romantiques, voire pathétiques, de l'« homme parfait ». Cette nouvelle galerie de personnages - partisans, peintres ou poètes - erre dans des campagnes ou forêts dévastées. Avec le tableau-manifeste Die großen Freunde [Les Grands Amis] (1965), l'artiste dit peindre une « parade sociale » où l'individu est toujours seul face à l'Histoire.
S-Bild [S-portrait], huile sur toile, 1965
Fixe Idee [Idée fixe], huile sur toile, 1964-1965
Der Dichter [Le Poète], huile sur toile, 1965 (présentée comme inspirée par la Déposition de croix - 1521 - du peintre maniériste Rosso Fiorentino)
Die Peitschenfrau [La Femme au fouet], huile sur toile, 1964-1965
Die Hand - Die Hand Gottes [La Main - La Main de Dieu], huile sur toile, 1964-1965
Der Baum [L'Arbre], huile sur toile, 1966
Ralf III, huile sur toile, 1965
Georg Baselitz rend souvent hommage à des artistes qu'il admire. Dans la série Ralf, il représente son ami Ralf Winkler, alias A. R. Penck (1939-2017), qu'il rencontre lors de ses études à Berlin-Est. Alors qu'en 1957, Baselitz est exclu de son école et contraint de déménager à Berlin-Ouest, Ralf Winkler choisit de rester en RDA, mais ses œuvres sont censurées dès 1962. Il se trouve ainsi obligé de travailler dans la clandestinité jusqu'à son émigration forcée vers la RFA, en 1980.
Die großen Freunde [Les Grands Amis], huile sur toile, 1965
Ce tableau-manifeste constitue l'aboutissement de la série de peintures réalisées en 1965-1966, environ cinq ans après la construction du mur de Berlin. Intitulée Ein neuer Typ (Un type nouveau), cette série est destinée à créer une nouvelle peinture allemande. Debout dans un champ de ruines, un drapeau rouge rapiécé gisant à leurs pieds, ce couple de survivants blessés incapables de se prendre par la main symbolise la division tragique de l'Allemagne d'après-guerre.
B.j.M.C. - Bonjour Monsieur Courbet, huile sur toile, 1965
En 1965, lors de son séjour à la Villa Romana de Florence, Baselitz lit Les Vies des meilleurs peintres, sculpteurs et architectes de l'artiste et écrivain Giorgio Vasari (1511-1574) et découvre les destins souvent rudes des contemporains de l'auteur, auxquels il s'identifie. De retour à Berlin, il peint ce tableau, s'inspirant du motif du marcheur dans la peinture du 19e siècle. L'oeuvre évoque aussi bien le tableau La Rencontre (1854; collection Musée Fabre, Montpellier) de Gustave Courbet que Teich im Riesengebirge (Étang dans le Riesengebirge) (1839; collection Nationalgalerie, Berlin) d'Adrian Ludwig Richter, artiste peintre et graveur saxon de la période romantique.
Partisan, huile sur toile, 1965
Dans le cadre de la série Ein neuer Typ [Un nouveau type], plus tard connue sous l'appellation de Helden [Héros], Baselitz s'attache à la représentation du « partisan », généralement représenté comme fort et invincible dans les régimes totalitaires. Marqué par ses souvenirs d'enfance de soldats blessés et traumatisés au retour de la guerre, à l'instar de son père, l'artiste choisit ici une iconographie volontairement opposée à celle du réalisme socialiste ou du régime nazi. Le partisan de Baselitz est meurtri, errant et solitaire. Les brodequins ôtés et posés près d'un brasier, il porte à présent une pantoufle, signe du retour dans sa patrie en ruines.
Images fracturées
En 1966, afin de retrouver le calme après le procès qui l'a meurtri, Georg Baselitz déménage avec sa famille à la campagne, à Osthofen, en Rhénanie-Palatinat. Il y réalise une suite de grands tableaux aux motifs ruraux – des forestiers, des chiens, des arbres - où les changements de sens de lecture se multiplient. Ces tableaux le mènent vers un nouveau cycle, celui des Frakturbilder [Tableaux fracturés], dont les motifs brisés évoquent des destins tragiques dans une Allemagne divisée. Ce cycle témoigne d'une volonté de casser les conventions de la figuration, en empruntant au principe du cadavre exquis, une méthode développée par les artistes surréalistes au début du 20e siècle. Il annonce le renversement complet des peintures qui deviendra la marque de fabrique de Baselitz.
Erstes Frakturbild - Der neue Typ (Maler im Mantel) [Premier tableau fracturé - Le nouveau type (Peintre en manteau)], huile sur toile, 1966
Ce tableau est parmi les premiers d'une série de grands formats dont les motifs deviennent de plus en plus ruraux et représentent par la suite des ouvriers forestiers, chiens ou arbres.
Drei Streifen - Der Maler im Mantel (Zweites Frakturbild) [Trois bandes - Le peintre en manteau (Deuxième tableau fracturé)], huile sur toile, 1966
Waldarbeiter [Ouvriers forestiers], fusain et peinture à dispersion sur toile, 1969
En 1966, Baselitz se réfugie à la campagne afin de s'éloigner du scandale médiatique déclenché par le procès lié à sa première exposition à la galerie Werner & Katz. Il peint entre 1966 et 1969 une série de tableaux aux motifs ruraux - ouvriers forestiers, chiens, arbres - parmi lesquels se trouve cette représentation de forestiers.
Der Mann am Baum [L'homme contre un arbre], huile sur toile, 1969
Dans ce tableau, Baselitz procède pour la première fois à un renversement complet du sens de lecture du personnage central. Cette œuvre annonce en cela les portraits renversés que peindra l'artiste à partir de photographies, tout en évoquant des images de Saint-Pierre, crucifié la tête en bas.
Zwei Meißener Waldarbeiter [Deux ouvriers forestiers de Meissen], craie de couleur et peinture à dispersion sur toile, 1967
B für Larry [B pour Larry], huile sur toile, 1967
Baselitz peint cette toile en hommage aux œuvres des peintres américains Larry Rivers et Jasper Johns. Il réinterprète ici, à l'aide de ses motifs de prédilection, leurs compositions volontairement disloquées et abstraites. On retrouve dans cette image le motif du héros, mais aussi l'arbre et les chiens qui imprègnent ses oeuvres de 1966-1967
Renverser l'image
Baselitz s'obstine à renouveler la peinture quand les tenants de l'art conceptuel la déclarent morte. À 30 ans, il cherche ainsi le moyen de rompre radicalement avec une représentation fidèle de la réalité : « Pour moi, le problème consistait à ne pas peindre de tableau anecdotique ou descriptif. D'un autre coté, j'ai toujours détesté cet arbitraire nébuleux des théories de la peinture abstraite. Le renversement du motif dans le tableau m'a donné la liberté de me confronter à des problèmes picturaux ». Tout en restant à distance du pop art et du réalisme capitaliste, il produit ses premiers tableaux aux motifs renversés d'après photographies en 1969. Présentés dès 1970 à Cologne par le marchand et collectionneur Franz Dahlem, ils créent l'événement.
Fertigbetonwerk [Usine de béton préparé], peinture à dispersion et peinture bronze d'aluminium sur toile, 1970
En 1968, avec l'aide de Karl Ströher, un de ses premiers mécènes, Baselitz reçoit une bourse du cercle culturel de la Fédération nationale de l'industrie allemande lui permettant de procéder à de nouvelles recherches picturales qui le mènent à l'inversion du motif. Dès 1970, il peint ce paysage représentant de manière schématique une usine en béton préfabriquée, comme pour l'ériger en exemple pour ces bâtiments impersonnels qui rythment les environs et qui sont à la base de la réussite économique allemande.
Industrielandschaft [Paysage industriel], peinture à dispersion sur toile, 1970
Dreieck zwischen Arm und Rumpf [Triangle entre bras et tronc], huile et fusain sur toile, 1973
Si l'artiste conserve toute sa carrière le principe du motif inversé, il lui tient à cœur de changer régulièrement de style, comme dans ce tableau où il expérimente la peinture au doigt. Dans cet autoportrait, Baselitz met l'accent sur l'espace (le triangle) délimité par son torse et son bras tendu, où semble se dessiner une aile d'oiseau, signe du lien étroit de l'artiste avec la nature.
Birke [Bouleau], huile sur toile, 1970
Da. Portrait (Franz Dahlem) [Portrait de Da. (Franz Dahlem)], peinture à dispersion sur toile, 1969
Der werktätige Dresdener - Porträt M.G.B. [Le Travailleur de Dresde - Portrait de M.G.B.], peinture à dispersion sur toile, 1969
Fünfziger Jahre Porträt - M. W. [Portrait des années 1950 - M. W.], peinture à dispersion sur toile, 1969
Wacholderbüsche und Steine [Genévriers et pierres], peinture à dispersion sur toile, 1970
Der Falke [Le Faucon], huile et peinture à dispersion sur toile, 1971
Fingermalerei - Adler [Peinture au doigt - Aigle], huile sur toile, 1972
Ce tableau fait partie de la série des peintures aux doigts (Fingermalerei) qui permet à l'artiste d'expérimenter une nouvelle technique. Baselitz joue ici avec l'ambiguïté induite par l'inversion de la peinture : cet aigle est-il en train de s'envoler ou bien de chuter du ciel ? S'agit-il d'un motif inspiré du blason et symbole de l'Allemagne ou bien d'un souvenir de son enfance à la campagne où, au bord d'un étang, Baselitz observait les oiseaux ? Présent dès ses premières peintures, ce motif emblématique revient régulièrement dans l'œuvre de l'artiste.
Fingermalerei – Apfelbäume [Peinture au doigt - Pommiers], huile sur toile, 1973
Entre abstraction et figuration
En 1975, Georg Baselitz entreprend son premier voyage à New York et à São Paulo pour participer à la Biennale d'art contemporain avec l'artiste allemand Sigmar Polke. Avec sa femme Elke et ses deux fils, il s'installe dans le château de Derneburg, en Basse-Saxe. Il y débute une série de nus de lui-même et d'Elke qui témoignent, dans un style proche de l'expressionnisme abstrait, d'une approche du corps et d'une intimité nouvelles. Le geste, devenu plus libre et énergique, crée des compositions régies par des jeux de clair-obscur, avec une palette de couleurs volontairement plus réduite.
Männlicher schwarzer Akt [Nu masculin noir], huile sur toile, 1977
Ohne Titel – Weiße Frau [Sans titre - Femme blanche], tempera sur toile, 1980
Weiblicher Akt - liegend [Nu féminin - allongé], huile et tempera sur toile, 1977
Birke - russisches Schulbuch [Bouleau - livre scolaire russe], huile sur toile, 1975
Nous terminerons dans un prochain billet le parcours de cette rétrospective.
Ettore Sottsass - l'objet magique
/image%2F1508962%2F20211227%2Fob_5e2224_img-3593.jpg)
Une belle exposition au Centre Pompidou réunit un ensemble de pièces historiques majeures du designer italien Ettore Sottsass (1917-2007), des années 1940 aux années 1980.
Après ses études d'architecture à Turin, il mena une carrière d'artiste polyvalent, hors du commun, et cette exposition, constituée en grande partie d'œuvres du Centre de Création Industrielle du Centre Pompidou, offre un parcours unique, et proprement magique.
Au début de ce parcours, quelques œuvres de jeunesse, entre 1937 et 1940 : dessin abstrait, composition avec éléments d'ameublement, esquisse de la scénographie théatrale pour Le Convive de Pierre de Pouchkine .
Quelques compositions abstraites de la fin des années 1940 - début des années 1950
Des études graphiques de la même époque
et des objets : Maquette spatiale (1947) et Vaso in filo (1952)
Un premier meuble, un Cabinet (bois laqué, laiton) de 1948-1949
Des études pour l'ameublement de son propre atelier et de son habitation (1958-1959)
Etude pour un tapis à motifs monténégrains, tempera sur papier (1942-1943)
Trois coussins monténégrains (vers 1944)
Plateau, laiton et sérigraphie sur mélémine, 1956
Une installation avec des meubles des années 1950 et 1960:
Composition d'éléments en bois colorés et miroir, 1959
Meuble buffet mural, 1965
Bacs à fleurs, 1961
Suspension Festone (Guirlande), édition Arredoluce, 1957
Barbarella en noyer, aluminium et céramique, édition Poltronova, 1966
Cabinet, bois de hêtre partiellement ébonisé, édition Poltronova, 1964
Une salle principalement consacrée à la céramique, avec au centre des éléments de grande taille :
Deux conservare pillole antifecondative [Grand vase aphrodisiaque pour conserver la pilule contraceptive], terre cuite, 1964-1965
Totem, terre cuite, années 1960
Totem n. 13. Idrante di sangue [Bouche d'incendie de sang], céramique émaillée, 1967
De nombreux petits objets (galets, vases, coupes) en céramiques diverses des années 1950 (céramique "des ténèbres", "de lave", etc.)
Vaso Rocchetto, faïence émaillée tournée à la main, 1956-1986
Assiettes Tondo, céramique, 1958-1959
Une installation de maquettes des mobiliers Superbox réalisés en 1966 par Ettore Sottsass pour Poltronova
Une des réalisations de Sottsass pour Olivetti, la machine à écrire portative Valentine (1959) qui connut un succès mondial et son affiche en acrylonitrile butadiène styrène (1959)
Point d'orgue de l'exposition, la reconstitution de sa première grande exposition personnelle à Stockholm en 1969 Paysage pour une nouvelle planète, avec le grand autel et ses 270 disques rouges en céramique. Autour, des meubles Superbox en stratifié édités en grande dimension, les grands Pilastro en céramique émaillée
Quelques objets du quotidien
Cafetière, 1972
Service à café, 1972
Lampe de table, 1968
Vase Diodata, 1974
Les modules réalisés par Ettore Sottsass pour l'exposition Italy: The New Domestic Landscape au MoMA de New York en 1972.
Module douche, module WC, module fauteuil
Projets d'architecture "utopique" (nonsense architecture), 1976
À la fin du parcours, une belle installation avec des meubles et des objets de la fin des années 1970 et des années 1980
Le strutture tremano [Les structures tremblent], verre, stratifié et acier laqué, éd. Alchimia, collection Bau-haus, 1979
Vetrinetta di famiglia [Vitrine de famille], stratifié uni (motif Bacterio), bois, polyméthacrylate de méthyle, aluminium, métal, 3 tubes fluorescents, éd. Alchimia, 1979
Guéridon Ivory, édition Memphis, 1985
Lampadaire Svincolo [Jonction], plastique laminé, métal chromé, néon rouge et blanc, éd. Alchimia, collection Bau-haus, 1979
Bibliothèque Carlton, bois et formaldéhyde de mélaminé Abet Laminati, 1981
Console Tartar, bois aggloméré et plastique laminé (formaldéhyde) Abet Laminati, 1985
Lampe de table Tahiti, plastique stratifié, bois et métal peint, ampoule halogène, 1981
Lampe de table Ashoka, métal verni et métal chrome, 1981
Mobilier Cargo, stratifié et aluminium, 1993
Coupe à fruits Sol, verre polychrome soufflé, 1982
Vase Saffo, verre, 1986
et d'autres objets
Terminons avec deux objets emblématiques de cette salle :
Meuble de rangement et de conservation Beverly, placage en laminé, imprimé Abet Laminati, structure en multiplis et éclairage extérieur, édition Memphis, 1981
Coupe à fruits Mourmansk, argent, 1982