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Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

28 Octobre 2023 , Rédigé par japprendslechinois

Nous achevons dans ce billet le parcours de la rétrospective de l'œuvre de Nicolas de Staël débuté dans notre billet du 14 octobre 2023, avec la sixième salle de l'exposition :

Le spectacle du monde 1952-1953
L'attrait de Nicolas de Staël pour le paysage se prolonge dans une fascination pour tout ce qui constitue le spectacle du monde. Entre un concert, un ballet et un match de football, nulle hiérarchie, mais autant d'occasions de se confronter à la vie comme à un jeu de matières colorées et en mouvement. Staël, qui dessinait jusque dans l'obscurité des salles de cinéma, peint en spectateur passionné, recevant sans cesse de nouvelles sensations visuelles, tactiles et auditives. En 1951, déjà, il déclarait : « L'individu que je suis est fait de toutes les impressions reçues du monde extérieur depuis et avant ma naissance [...]. Les choses communiquent constamment avec l'artiste pendant qu'il peint, c'est tout ce que j'en sais. » Sous cet œil ultrasensible, un jardin prend l'allure d'un décor de théâtre, tandis que des bouteilles semblent danser un ballet.
Au mois de mars 1953, Staël est à New York pour préparer son exposition aux Knoedler Galleries. L'exposition remporte un franc succès, tant critique que commercial. En juin, Staël signe un contrat avec le puissant galeriste Paul Rosenberg, qui le pousse à produire davantage pour répondre à la demande des collectionneurs américains.

Dans cette section, peu de toiles mais toutes de grandes dimensions.

Bouteilles dans l'atelier, Paris, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Les Indes galantes, Paris, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

L'Orchestre, Paris, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

L'atelier du Sud 1953
« Tous les départs sont merveilleux pour le travail », écrit Staël en mai 1953. Sur le conseil de René Char, cet été-là, le peintre et sa famille s'installent à Lagnes, un village proche d'Avignon. Ce séjour en Provence engendre deux chocs : celui de la lumière éclatante, et celui de la rencontre avec une jeune femme, Jeanne Polge. Pour décrire ce double coup de foudre, le peintre écrit à Char, qui lui a présenté cette femme et ce paysage : « Quelle fille, la terre en tremble d'émoi, quelle cadence unique dans l'ordre souverain. Là-haut au cabanon chaque mouvement de pierre, chaque brin d'herbe vacillait [...] à son pas. Quel lieu, quelle fille. » Une liaison passionnelle se noue à partir de l'automne.
Le peintre, dont la palette devient éclatante comme la lumière provençale, multiplie les sujets d'atelier: portrait de sa fille Anne, « nus dans les nuages », natures mortes. L'intensité charnelle des sensations vécues par cet homme se diffuse dans toute chose, jusque dans la texture d'une nappe rose posée sur une table.

Nu couché, 1952-1953, pinceau et encre de Chine sur papier
Étude de nu, 1952-1953, pinceau et encre de Chine sur papier
Nu de dos, 1952-1953, pinceau et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Nu, 1952-1953, pinceau et encre de Chine sur papier
Étude de nu, 1952-1953, pinceau et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Portrait d'Anne, Lagnes, 1953, huile sur toile
Femme assise, Ménerbes, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Deux vases de fleurs, Lagnes, 1953, huile sur toile
Table rose, Provence, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Nature morte au tournesol, Lagnes, 1953, huile sur toile
Fleurs blanches et jaunes, Lagnes, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Lumières 1953
Le peintre, après tant d'autres, connaît la fascination pour le Sud et sa lumière : la Provence lui apparaît comme « le paradis, tout simplement, avec des horizons sans limites ». Il rêve de transformer en un point fixe ce qui ne sera qu'une halte entre deux départs et, en novembre 1953, achète une demeure austère et délabrée à Ménerbes - le Castelet.
En Provence, le peintre remet son art en jeu tout en renouant avec le petit format et les joies de la peinture sur le motif - ce qu'il appelle ses « paysages de marche ». Les tableaux du Midi exigent une réinvention : la lumière éclatante du Sud implique un nouveau regard, et donc une nouvelle manière de faire. Au plus près du monde, Staël peint alors les silhouettes alignées des cyprès, les champs labourés, la façade d'une maison, le soleil éblouissant au-dessus de l'horizon. Sculpté par le vent, son Arbre rouge se fait explosion lumineuse. Ici, Staël cherche, à tâtons, en peintre qui n'a que le travail comme possible recours : « Je suis dans un brouillard constant, ne sachant où aller, que faire [...], bouffant ces paysages à longueur de journée de quoi en avoir une nausée définitive, ému malgré tout chaque fois. »

Terre du Nord, vers 1953, huile sur toile
Grignan, 1953, huile sur toile
Paysage, esquisse, Provence, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Paysage, Ménerbes, Ménerbes, 1953-1954, huile sur toile
Paysage, Provence, 1953, huile sur toile
Arbres, Provence, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Paysage, Provence, 1953, huile sur toile
Arbre rouge, Provence, 1953, huile sur toile
Paysage de Provence, Lagnes, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Grignan, 1953, huile sur toile
Le Soleil, Provence, 1953, huile sur toile
Les Cyprès, Provence, 1953, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Sicile 1953-1954
En août 1953, Nicolas de Staël, qui s'est acheté une camionnette, embarque sa famille dans un voyage en Italie, direction la Sicile. Il y a là sa femme Françoise, enceinte de Gustave, ses enfants, Anne, Laurence et Jérôme, mais aussi Jeanne Polge et Ciska Grillet, une amie de René Char.
En Sicile, il dessine au feutre les ruines antiques d'Agrigente et Syracuse : « À part la nage dans toutes les mers, je ne fais rien, sinon quelques croquis », écrit-il alors. La peinture viendra plus tard, comme en écho différé à cette expérience vécue. En 1951, déjà, il affirmait: « On ne peint jamais ce qu'on voit ou croit voir, on peint à mille vibrations le coup reçu. » C'est donc en Provence, où il retourne seul, après l'Italie, que Staël peint ses tableaux siciliens.
À Jacques Dubourg, son marchand parisien, il confie : « Aussi atroce que soit la solitude, je la tiendrai parce qu'il [me faut] prendre une distance que je n'ai plus à Paris aujourd'hui et que je veux pour demain. » Les paysages d'Agrigente et Syracuse sont le fruit de cette mise à distance. Radicalisation de la palette et des contrastes, construction réduite à l'élémentaire : Staël invente son paysage.

Sicile (dessiné sur le motif), 1953, stylo-feutre sur papier
Colonnes de temple à Agrigente, 1954, plume et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Agrigente, 1954, plume et encre de Chine sur papier
Composition, 1953-1954, collage de papiers déchirés sur papier kraft
Composition, 1953-1954, collage de papiers découpés et déchirés sur papier kraft

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Temple sicilien, Lagnes, 1953, huile sur toile
Paysage, vers 1953, huile sur toile
Sicile, Ménerbes, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Agrigente, Ménerbes, 1953-1954, huile sur toile
Agrigente, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Sicile, Ménerbes, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Agrigente, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Syracuse, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Paysage, Ménerbes, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Sur la route 1954
L'année 1954 est marquée par de constants déplacements : toujours à la recherche de sensations nouvelles, Staël se remet en route. Alors qu'il vient d'emménager à Ménerbes, son quotidien est rythmé de diverses incursions à Uzès, Marseille, ou encore à Martigues, sur les bords de l'étang de Berre, comme autant de détours propres à engendrer dessins et tableaux. Il retourne aussi rue Gauguet : « J'ai commencé à travailler dans le Midi, écrit-il, mais je viens à mon atelier de Paris régulièrement, cela me change de lumière et renouvelle un peu la conception des choses. » Il dessine alors sur les bords de Seine, et peint des paysages parisiens. Il séjourne également quelque temps sur la mer du Nord, dessinant sur le motif avant de peindre plusieurs tableaux évoquant le phare de Gravelines ou la plage de Calais.
Staël travaille « plus que jamais » : l'exposition chez Paul Rosenberg à New York en février 1954 est un succès, et l'artiste prépare pour juin une nouvelle exposition parisienne chez Jacques Dubourg, la première depuis trois ans. Dans cette urgence, sa peinture s'allège, renonçant à l'épaisseur au profit de la fluidité. Dans ses dessins, nombreux en ces temps de voyage, l'artiste va vers l'épure, donnant toujours plus d'importance, et de présence, au blanc du papier.

Bateaux sur la plage, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Deux Marseille, Ménerbes, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Barques, 1953-1954, stylo-feutre sur papier
Bateaux en Méditerranée, 1953-1954, stylo-feutre sur papier
Barques aux Martigues, 1953-1954, stylo-feutre sur papier
La Barque, 1953-1954, stylo-feutre sur papier
Bateaux, 1953-1954, stylo-feutre sur papier
 

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Arbres, 1954, pinceau et encre de Chine sur papier
Étude de fleurs, 1954, stylo-feutre sur papier
Table à palette, 1954, fusain sur papier
Étude de profils, 1954, pinceau et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Trois poires, Paris, 1954, huile sur toile
Les Martigues, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Agrigente, Ménerbes, 1954, huile sur toile
La Route, Ménerbes, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Paysage sur fond rose, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Étang de Berre, Ménerbes, 1954, huile sur toile
Le Pont des Arts la nuit, Paris, 1954, huile sur toile
Plage de Calais, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
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Calais, 1954, huile sur toile
Nature morte au billot, Paris, 1954, huile sur toile
La Palette, Paris, 1954, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

et la dernière salle de l'exposition :

Antibes 1954-1955
En septembre 1954, pour se rapprocher de Jeanne Polge, Nicolas de Staël s'installe seul dans une maison sur les remparts d'Antibes, face à la mer. La vie s'organise autour de son atelier et de sa liaison passionnelle, bouleversante. Alors que Jeanne prend peu à peu ses distances, Staël travaille avec acharnement: « Les tableaux foncent, écrit-il, il faudra bien leur donner tout ce que j'ai, le reste m'est odieux à présent. »
Cherchant la fluidité et la transparence, le peintre utilise du coton et des tampons de gaze pour étaler la couleur. Marines et natures mortes 
se succèdent, Staël peignant alternativement les bateaux zébrant la Méditerranée ou les objets de l'atelier. Ses tableaux accueillent la vie, sa quotidienneté, son intimité, son immensité. Si l'homme privé est désespéré par un amour impossible, l'artiste demeure, dans sa peinture, intact malgré tout. Les tableaux d'Antibes témoignent de la permanence de son émerveillement devant le monde.
Le 16 mars 1955, Staël se tue en se jetant du toit-terrasse de son atelier, laissant derrière lui de nombreux tableaux en cours. Dans la lettre qu'il laisse à son marchand, Jacques Dubourg, il écrit: « Je n'ai pas la force de parachever mes tableaux. »

Étude de nu, Antibes, 1955, fusain sur toile
Nu de profil, Antibes, 1955, fusain sur toile
Nu couché bleu, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Nature morte en gris, Antibes, 1954, huile sur toile
Coin d'atelier fond bleu, Antibes, 1955, huile sur toile
La Bouteille noire, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Le Saladier, Antibes, 1955, huile sur toile
Le Bocal, Antibes, 1955, huile sur toile
L'Étagère, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Nature morte en gris, Antibes, 1955, huile sur toile
Pots et pinceaux dans l'atelier, Antibes, 1955, huile sur toile
Nature morte au pot et pinceaux, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Les Poissons, Antibes, 1955, huile sur toile
Bateau de guerre, Antibes, 1955, huile sur toile
Le Fort carré d'Antibes, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)

Bouteilles grises, Antibes, 1955, huile sur toile
Marine la nuit, Antibes, 1955, huile sur toile
Le Bateau, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
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Et pour clore ce beau parcours :

Les Mouettes, Antibes, 1955, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (II/II)
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Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023

21 Octobre 2023 , Rédigé par japprendslechinois

Une pause dans les expositions parisiennes de l'automne avec un sujet abordé à plusieurs reprises dans ce blog depuis une dizaine d'années (cf notre billet du 4 juin 2013), et pour la dernière fois il y a quatre ans.

Le festival international des jardins, dans le parc du château de Chaumont-sur-Loire, avait cette année pour thème Jardin résilient :

"Dérèglement climatique, dégradation du monde vivant, telles sont les nouvelles données auxquelles les zones naguère tempérées du globe sont désormais confrontées. Fragilité, déséquilibre, incertitude sont aujourd’hui au cœur des préoccupations et impliquent pour chacun d’entre nous la nécessité de s’adapter à un climat qui change, en minimisant les effets délétères de températures élevées, en repensant nos comportements, en luttant contre les îlots de chaleur, en utilisant des solutions nouvelles ou traditionnelles, face à la raréfaction de l’ombre et de l’eau.

Sobriété, autosuffisance grâce à la permaculture, aux forêts comestibles, aux corridors verts… tout est à mettre en œuvre pour renforcer la résilience de nos jardins, pour anticiper, agir, rebondir, réduire les vulnérabilités.

Tel est le défi proposé aux concepteurs des jardins de l’édition 2023 qui ont su proposer des projets tentant d’ouvrir des pistes permettant au jardin, condensé de vie et de biodiversité, de résister aux outrances de l’Anthropocène."

Premiers visiteurs de la journée, nous sommes accueillis dans le jardin N°1 (Le Jardin de sous-bois - jardin pérenne conçu par les étudiants de l'École Nationale Supérieure du Paysage de Blois) par un représentant de la faune locale. 

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023

2. Le Corridor végétal (Ashley MARTINEZ, concepteur paysagiste, et Julie COTE, paysagiste designer - France)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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3. Le Jardin du Verstohlen (Cynthia FLEURY, philosophe et psychanalyste, et Antoine FENOGLIO, designer - France)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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4. Une (presqu') île vertueuse ou Néo-Chinampas (Louise QUINTANA, paysagiste DPLG, et Guillaume COLLAUDIN, chef jardinier-Compagnon du Devoir - France)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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4 bis. Le Jardin patchwork (Annelies DIJKMAN, plasticienne, conceptrice de jardins, jardinier, et Lau HEEMSKERK, jardinière, conceptrice de jardins, productrice de vivaces - Pays-Bas)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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5. Le Jardin de tuiles (风物营造 (Landtek Group) -Jingshi DIAO, Shilei LU, Shuwen SU, Jiawei LIANG et Kangtai FENG, architectes paysagistes - Chine)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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6. Le Jardin des chênes (Nicola HILLS, paysagiste-conceptrice, et Anthony HILLS, architecte - Grande-Bretagne)

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7. Oasis fissurée (Kairi MEOS, architecte-paysagiste, Svetlana LAVRENTYEVA, conceptrice de jardins, et Hilla KARPPINEN, paysagiste-conceptrice - Finlande)

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8. Cendres fertiles (Robin EYMIEUX, urbaniste, Antoine DEBRAY, paysagiste concepteur, et Xuan Tuan NGUYEN, architecte/concepteur paysagiste - France)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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9. Brèche (Collectif Brèche - Sébastien LATXAGUE, architecte jardinier, Louise GRALL-VIGNERON, artiste illustratrice, Lorraine LEFORT, artiste pluridisciplinaire, et Elisabeth BOSCHER, architecte HMONP - France)

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10. Le Jardin de la fontaine anémone (Jean-Philippe POIRÉE-VILLE, architecte et paysagiste - France) - jardin pérenne.

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11. Jardin kintsugi (Grégory SIMON, étudiant, Haute École Lucia de
Brouckère - Belgique)

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12. Écouter, voir (Emmanuelle CAPITAIN, paysagiste, et Magali BERTRON, coloriste paysagiste - France)

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13. Demain tout ira bien (Fabien CAUMONT, paysagiste concepteur et Atelier Arzinc -Françis ARSENE, Thomas MARCEL, Arthur NAVECTH, Duncan SIDIBE, Camille VILLEMIN et Alexandre WELLERS - France)

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14. Le Chant du sel (Félix DE ROSEN, architecte-paysagiste et auteur, Éric FUTERFAS, architecte, et Bruno DEROZIER, pépiniériste - États-Unis / France)

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15. De derrière les fagots (Association Les Animé.e.s -Manuel JOUAULT et Tom SENECAL, paysagistes DPLG, Leane DELICOURT, architecte, et Pierre BRONGNIART, designer plasticien et charpentier en formation-Compagnons du Devoir - France)

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17. Jardin kintsugi - Pansons (pensons ?) nos blessures (Sarah BREGEON, Loïse GUIBERTEAU, Pierre-Henri BLANDINEAU RICHARD, Armand PINOT et Ewen LE THOMAS, étudiants, Institut Agro Rennes-Angers - France)

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19. L'Alliance des courants (Adrien DEFOSSE, paysagiste concepteur, et Commune de Loire-Authion -Emeline DUPLANT, Raphaëlle GUITTEAU-NORMAND, Olivier BOURGET, Amélie JEUNIER, Joël LEFUR et Didier HAMARD, agents Espace Verts - France)

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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20. La Petite serre (installation pérenne)

Après le Jardin de la Serre, confié à Patrick Nadeau à l’entrée de la Cour de la Ferme, et la collection de cactées présentée dans la Serre extraordinaire, la Petite Serre est le troisième espace consacré aux plantes tropicales de manière pérenne au Domaine de Chaumont-sur-Loire.

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21. Terre de Feu (Serra Paysage -Franck SERRA, paysagiste - France)

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22. Hortus Spei - Jardin de l'espoir (Evor, artiste plasticien, et l'association “Nantes est un Jardin” - France)

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23. L'Arbre de vie (Laurence AUREJAC, architecte DPLG, paysagiste-conceptrice et enseignante, Rachel ROUZAUD, architecte DE, et Jean-Cosme ROUZAUD, étudiant ingénieur - France)

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24. Nids d'humains (Catherine COCHEREL - France)

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Le lecteur attentif aura remarqué que quelques jardins ont été omis, le parcours complexe du festival les ayant dérobé à notre attention. Pour se faire pardonner, quelques gros plans de fleurs, compensant le peu de couleurs vives du parcours, dû à la fois au l'austérité du thème du jardin résilient, et à la saison avancée au moment de notre visite.

Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
Festival international des jardins à Chaumont - édition 2023
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Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

14 Octobre 2023 , Rédigé par japprendslechinois

Très belle rétrospective, au Musée d'art moderne de Paris, de l'œuvre de Nicolas de Staël (1914-1955) : deux billets ne seront pas trop pour en parcourir les 11 salles qui retracent les périodes de sa vie artistique, tragiquement écourtée par  son suicide à 41 ans mais si riche et variée.

Le voyage d'un peintre 1934-1947
Les années de formation de Nicolas de Staël sont faites de voyages et de rencontres. S'il étudie l'art à Bruxelles, le jeune peintre cherche vite à élargir ses horizons: après deux étés passés à sillonner le sud de la France puis l'Espagne, il parcourt pendant un an le Maroc où il rencontre Jeannine Guillou, une peintre qui deviendra sa compagne. Il travaille avec ardeur, détruisant beaucoup et hésitant sur la voie à suivre. « Je sais que ma vie sera un continuel voyage sur une mer incertaine, écrit-il, c'est une raison pour que je construise mon bateau solidement. »
Faites de déplacements et de haltes, ces années de maturation sont à la fois dures et exaltantes, sur fond d'ambition et d'extrême pauvreté. Staël l'apatride s'engage en novembre 1939 dans la Légion étrangère ; démobilisé en septembre 1940, il vit pendant trois ans. à Nice puis s'installe à Paris. En 1942, il se tourne vers l'abstraction, tendance alors en plein essor. Le peintre explore ce nouveau langage dans des œuvres dominées par des tons sombres, que Jeannine décrit comme « sans fin torturées, repeintes, massacrées, bousculées. »
Au sortir du conflit, Staël expose à la galerie Jeanne Bucher: sa carrière est lancée. En 1946, la mort tragique de Jeannine suite à un avortement thérapeutique signe la fin de cette première époque.

Vue de Cassis, 1934, plume, encre de Chine et rehauts d'aquarelle sur papier
Musiciens arabes, Maroc, 1936-1937, mine de plomb sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Étude, visage de femme, vers 1939, fusain sur papier
Étude, visage de femme, Jeannine, vers 1939, fusain sur papier
Portrait de Jeannine, Nice, 1941, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Deux Étude de bateaux, vers 1939, crayon gras sur papier
et une des rares peintures figuratives des débuts de Staël qui nous soient parvenues,
Pont de Bercy, Paris, 1939, huile sur contreplaqué

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Composition, Nice, 1942, pastel sur papier
Composition, Nice, 1942, fusain et pastel sur papier
Composition (Les Mouettes), Paris, 1947, pinceau et lavis d'encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Composition en noir, Paris, 1946, huile sur toile
Composition, Paris, 1946, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

De la danse, Paris, 1946-1947, huile sur toile
Le Cube, Paris, 1946, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Trois Composition, Paris, 1946, pinceau et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Rue Gauguet 1948-1949
Située près du parc Montsouris, la rue Gauguet devient dès 1947 le point d'ancrage du peintre : le lieu où Staël, qui s'est marié avec Françoise Chapouton, va trouver un véritable atelier et un toit pour sa famille. Avec ses huit mètres de hauteur sous plafond, l'atelier « tient du puits, de la chapelle et de la grange », écrit le critique Patrick Waldberg, qui décrit « sa blancheur austère et son atmosphère d'activité intense, mais recluse ». Adossant ses toiles contre le mur, Staël conçoit plusieurs œuvres en même temps, passant de l'huile à l'encre de Chine, de la toile au papier.
À la fin des années 1940, dans ce lieu inondé de lumière, sa palette s'éclaircit. Aux élans obscurs des toiles précédentes succède une manière de peindre moins violente, plus organique. Peu à peu, ses compositions se desserrent: les faisceaux dynamiques et enchevêtrés laissent place à des formes plus amples, plus stables et aériennes.
Renouvelant constamment sa pratique, Staël se méfie de la répétition comme des étiquettes. Ce peintre que l'on dit abstrait déclare alors, à rebours de l'époque, que « les tendances non figuratives n'existent pas », affirmant que « le peintre aura toujours besoin d'avoir devant les yeux, de près ou de loin, la mouvante source d'inspiration qu'est l'univers sensible ».

Composition, Paris, 1948, encre de Chine et lavis sur papier
Deux Composition, Paris, 1948, pinceau et encre de Chine sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Histoire naturelle, Paris, 1948, huile sur toile
Eau de vie, Paris, 1948, huile sur toile
Hommage à Piranèse, Paris, 1948, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Composition, Paris, 1949, plume et pinceau, encre de Chine et lavis d'encre de Chine sur papier
Composition, Paris, 1948, pinceau et encre de Chine sur papier, collé sur carton

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Composition, Paris, 1949, huile sur toile
Composition grise, Paris, 1949, huile sur toile
Composition, Paris, 1949, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Condensation 1950
En 1950, le travail de Staël se densifie : des masses plus amples et ramassées s'agencent à la surface de la toile. Des études sur papier jusqu'au tableau dans sa version définitive, il multiplie les étapes, travaille longuement et sans relâche ses compositions. Les tableaux racontent leur propre genèse : les couches de couleur se superposent, laissant apparaître, sur les bords de formes énigmatiques, d'autres couleurs sous-jacentes, tel un secret entrevu. La peinture se fait étalement, recouvrement, travail de la matière. « Je manie le couteau et la brosse de plein fouet », dit-il alors. L'ambition est claire : «faire de mieux en mieux et toujours plus simple ».
Bien qu'abstraites formellement, ses toiles semblent habitées par une présence physique du monde : Staël parle à leur sujet des « images de la vie » qu'il reçoit « en masses colorées », « à mille vibrations ». Il se tient fièrement à l'écart de ce qu'il désigne comme le « gang de l'abstraction avant » par allusion ironique au « gang des Tractions avant », célèbre bande de malfaiteurs de l'après-guerre.
Cette année-là, le Musée national d'art moderne acquiert une première toile du peintre, tandis que Jacques Dubourg devient officiellement son marchand et que des toiles commencent à se vendre aux États-Unis.

Composition, Paris, 1950, huile sur panneau
Composition, Paris, 1950, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Deux Composition, Paris, 1950, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Trois Composition, Paris, 1949-1950, plume et pinceau, encre de Chine et gouache sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Deux Composition, Paris, 1950, stylo-feutre sur papier

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Oiseau noir, Paris, 1950, huile sur toile
La Procession, Paris, 1950, huile sur toile
Grande composition bleue, Paris, 1950-1951, huile sur isorel

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Fragmentation 1951
Les tableaux de l'année 1951 apparaissent, rétrospectivement, comme une réaction à ceux de l'année 1950, Staël remettant en jeu les acquis de l'année précédente. Après la condensation, ce sera donc la fragmentation : après les formes concentrées, vient le règne des formes fragmentées, faites de tesselles colorées que l'on dirait empruntées au monde de la mosaïque. Ce nouveau vocabulaire offre à l'artiste une grande liberté. Tantôt il construit, par accumulation de ces formes en pavés, tantôt il ouvre son tableau à une spatialité nouvelle et dynamique, quasi aérienne.
Les références au monde extérieur, déjà là, à l'état latent, dans les tableaux de 1950, émergent plus nettement. Staël, malgré l'époque, malgré la critique, revient courageusement vers la figuration : au tout début de l'année 1952, une simple tesselle, forme abstraite s'il en est, devient une pomme, tandis que le jaillissement vertical des petits pavés de couleur évoque soudain un bouquet de fleurs. À son nouvel ami René Char, pour lequel il réalise un ensemble de gravures sur bois, il écrit : « Tu m'as fait retrouver d'emblée la passion que j'avais, enfant, pour les grands ciels, les feuilles en automne et toute la nostalgie d'un langage direct. »

Composition, Paris, 1951, huile sur toile
Le Mur, Composition, Paris, 1951, huile sur toile
La Ville blanche, Paris, 1951, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Composition, Paris, 1951, huile sur toile
Fugue, Paris, 1951-1952, huile sur toile
Composition, Paris, 1951, huile sur contreplaqué

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Les Toits, Paris, 1951, huile sur bois
Composition fond blanc, Paris, 1951, huile sur isorel
Fleurs grises, Paris, 1952, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Fleurs, Paris, 1952, huile sur toile
Trois pommes en gris, Paris, 1952, huile sur toile
Fleurs, Paris, 1952, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Terminons ce premier billet par la cinquième section de cette rétrospective :

Un an dans le paysage 1952
En 1952, les références au monde sensible deviennent explicites. Staël élargit alors son champ visuel, sortant de l'atelier pour s'adonner au paysage et travailler en plein air, sur le motif. Entre joie et urgence, « des couleurs plein les mains à ciel ouvert », il peint plus de deux cent quarante œuvres. La majorité sont des petits ou moyens formats sur carton, travaillés directement face au paysage, en Île-de-France, en Normandie et dans le Midi. Chaque lieu, chaque région engendre ses propres impressions et ses manières de faire. À Mantes-la-Jolie ou Gentilly, l'art de Staël atteint un équilibre entre observation et abstraction. Au Lavandou, il peint sur la plage et s'émerveille de la lumière « vorace » et « fulgurante » du Sud, qui lui procure des sensations nouvelles : « À force d'être bleue, la mer devient rouge. » En Normandie, ses paysages se font plus atmosphériques et traduisent les subtiles nuances de la mer et du ciel.
À Paris, le 26 mars, Staël assiste au match de football France-Suède au Parc des Princes. Le tableau magistral qu'il en tire est exposé au Salon de mai et fait sensation. Pas de côté dans une année largement consacrée au paysage? Approfondissement, plutôt, comme si ses paysages d'Île-de-France trouvaient là leur destin monumental.

Différents Paysage (peint sur le motif), 1952, huile sur carton

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Mantes (peint sur le motif), 1952, huile sur carton
Mantes-la-Jolie (peint sur le motif), 1952, huile sur carton
Gentilly, 1952, huile sur carton

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Les Toits de Paris, 1952, huile sur carton
Gentilly, 1952, huile sur toile
Le Parc de Sceaux, Paris, 1952, huile sur toile
 

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Ciel à Honfleur, Paris, 1952, huile sur toile
Mer et nuages, Paris, 1953, huile sur toile
Le Lavandou (peint sur le motif), 1952, trois huiles sur carton

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

Étude de paysage, 1952, huile sur panneau
Paysage, 1952, huile sur carton
Composition, 1952, huile sur carton

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
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Parc des Princes, Paris, 1952, huile sur carton
Parc des Princes, Paris, 1952, huile sur toile

Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)
Nicolas de Staël - rétrospective au MAM de Paris (I/II)

La fin du parcours de cette belle exposition fera l'objet d'un prochain billet.

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Modigliani - Un peintre et son marchand

7 Octobre 2023 , Rédigé par japprendslechinois

Avec ce billet, la première exposition parisienne de cet automne, au musée de l'Orangerie.

Un peu plus d’un siècle après la rencontre entre Amedeo Modigliani (1884-1920) et Paul Guillaume (1891-1934) en 1914, cette exposition se propose de revenir sur l’un des moments emblématiques de la vie du peintre. Elle s’attache à explorer la manière dont les liens entre les deux personnages peuvent éclairer la carrière de l’artiste et sa renommée posthume.

Toutes les œuvres présentées dans cette exposition ont un rapport étroit avec Paul Guillaume : qu’elles lui aient appartenu, aient été vendues par lui ou aient été commentées dans sa revue Les Arts à Paris.

Amedeo Modigliani et Paul Guillaume

Le galeriste et collectionneur Paul Guillaume aurait découvert Amedeo Modigliani dès 1914 par l’entremise du poète Max Jacob. Il devient vraisemblablement son marchand l’année suivante et constitue l’un de ses premiers soutiens. Le marchand loue pour lui un atelier rue Ravignan sur la butte Montmartre à Paris, resté célèbre par des clichés photographiques où les deux hommes prennent la pose aux côtés des œuvres de l’artiste accrochées au mur.
Modigliani réalise quant à lui des portraits peints et dessinés de son nouveau marchand.
 

Modigliani - Un peintre et son marchand

Paul Guillaume, Novo Pilota, 1915, huile sur carton collé sur contre-plaqué parqueté
Portrait de Paul Guillaume, 1915, huile sur carton

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Portrait de Paul Guillaume, 1916, huile sur toile
Paul Guillaume, 1916, crayon sur papier

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Masques et têtes

Entre 1911 et 1913, Modigliani se consacre presque exclusivement à la sculpture. En parallèle de ces œuvres sculpturales, il réalise plusieurs dessins élégants. Leurs formes simplifiées inspirent le style fragmenté ou allongé de ses peintures ultérieures, telles que les têtes de femmes, également exposées dans cette salle.
Les visites de musées parisiens, dont le Louvre et le musée d’Ethnographie du Trocadéro, incitent Modigliani, et d’innombrables autres artistes européens, à s’intéresser à l’art égyptien, khmer, africain et primitif italien. Paul Guillaume est alors l’un des rares marchands à considérer les statues et les masques africains comme des œuvres d’art, ainsi que l’un des premiers à les exposer aux côtés d’œuvres d’art moderne européen.
Bien que Modigliani ait déjà arrêté la sculpture à l’époque où Paul Guillaume devient son marchand, cela n’empêche pas le jeune Parisien d’acheter ses têtes sculptées et de les vendre à d’importants clients, comme Albert C. Barnes, le collectionneur américain, après la mort de l’artiste en 1920.
 

Statues et masques africains, transition avec notre billet précédent du 30 septembre 2023  :

Artiste Kota, avant 1941, Gabon, Élément de reliquaire Mbulu-ngulu, bois, cuivre
Artiste Fang, avant 1941, Gabon, Élément de reliquaire eyima byeri, bois, perle

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Artiste Fang, XIXe siècle, Gabon, Masque anthropomorphe Ngon Ntang, bois, pigments dont kaolin, laiton
Artiste Fang, XVIIIe siècle, Gabon, Masque, bois, fromager

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Des têtes sculptées par Modigliani :

Tête de femme, 1911-1913, calcaire
Tête, 1912, pierre
Tête de femme, 1913-1914, marbre de Carrare

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

et des têtes peintes par Modigliani :

Fille rousse, 1915, huile sur toile
Femme au ruban de velours, vers 1915, huile sur papier collé sur carton

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Lola de Valence, 1915, huile sur papier monté sur bois
L'Enfant gras, 1915, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Milieu parisien, affinités artistiques et littéraires

C’est au coeur d’un Paris cosmopolite, capitale des arts, qu’Amedeo Modigliani arrive à l’âge de 21 ans et commence un parcours artistique singulier. Ce carrefour culturel, si vivant au début du xxe siècle, lui fournit des interlocuteurs aussi bien dans le domaine pictural que littéraire et marchand, constituant un terreau fertile à l’épanouissement de son art. Les figures de ses proches peuplent alors ses tableaux et dressent un étonnant panorama des personnalités de cette époque : Brancusi, Soutine, Kisling, Gris, Cocteau, Picasso, Rivera, Max Jacob, Beatrice Hastings... peintes au même titre que des figures connues uniquement par leurs prénoms ou encore des anonymes. 

Portrait de Moïse Kisling, 1915, huile sur toile
Portrait de Max Jacob, 1916, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Portrait de Beatrice Hastings, 1915, huile sur carton
La Belle irlandaise, en gilet et au camée, vers 1917-1918, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Antonia, vers 1915, huile sur toile
Madam Pompadour, 1915, huile sur toile

Intitulé Madam Pompadour, ce tableau est un portrait de Beatrice Hastings. En tant que rédactrice en chef de la revue londonienne The New Age, Beatrice Hastings publie des auteurs importants, dont Ezra Pound. Elle écrit également ses propres poèmes, de la prose, des articles d'opinion politique et des critiques d'art sous d'innombrables pseudonymes.

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Période méridionale

En 1916, avec le soutien d’un nouveau marchand d’art, Leopold Zborowski, Modigliani se remet à peindre des nus féminins. S’il réalise ces tableaux pour des acheteurs masculins, leur sensualité suggère des changements dans le quotidien des femmes, qui deviennent de plus en plus indépendantes dans les années 1910. Grâce à son album d’œuvres de Modigliani, nous savons que Paul Guillaume a acquis et vendu au moins deux nus après la mort de l’artiste.

Nu couché, 1917, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand

Durant les derniers mois de la Première Guerre mondiale, alors que Paris subit des raids aériens et que l’état de santé de Modigliani se dégrade, Leopold Zborowski envoie son artiste sur la Côte d’Azur. Sa nouvelle compagne, la peintre Jeanne Hébuterne, déjà enceinte du premier enfant du couple, l’accompagne. C’est à Nice que Modigliani réalise certaines de ses œuvres les plus fortes, peignant des portraits d’enfants, de domestiques et d’autres anonymes locaux et s’essayant même aux paysages. Paul Guillaume achète et vend plusieurs de ces œuvres phares au cours des années 1920.

Jeune fille au corsage rayé, 1917, huile sur toile
La Chevelure noire, dit aussi Jeune fille brune assise, 1918, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

La Belle droguiste, dit aussi La Belle épicière, 1918, huile sur toile
Le Jeune apprenti, 1917-1919, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Elvire assise, accoudée à une table, 1919, huile sur toile
Portrait de femme, dit La Blouse rose, 1919, huile sur toile, cadre de Pierre Legrain

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

Portrait de Mme Hanka Zborowska, 1918-1919, huile sur toile
Jeune fille rousse au collier, dit aussi Femme rousse portant un pendentif, 1918, huile sur toile

Modigliani - Un peintre et son marchand
Modigliani - Un peintre et son marchand

À la fin du parcours, des vidéos présentent la reconstitution des accrochages de tableaux dans les divers appartements occupés successivement par Paul Guillaume, où figurent en bonne place les tableaux de Modigliano présentés dans l'exposition - et rassemblés pour la circonstance.

Une dernière salle donne l'occasion aux enfants de compléter et colorier des esquisses reprenant les tableaux de l'artiste.

Modigliani - Un peintre et son marchand
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