La Traversée des apparences (Musée national d'art moderne)
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Exposition originale en ce moment au musée national d'art moderne, au Centre Pompidou, ou plutôt une installation qui à travers tout l'étage supérieur du musée met en dialogue des œuvres et des créations de mode. En 2022 déjà, avec « Yves Saint Laurent aux Musées », le Centre Pompidou initiait une conversation chromatique et conceptuelle entre silhouettes de créateurs et œuvres de la collection du Musée national d’art moderne (notre billet du 9 avril 2022). « La Traversée des apparences » poursuit ce dialogue.
De Christian Dior à Iris van Herpen, d'Azzedine Alaïa à Thebe Magugu, de Jean Paul Gaultier à Issey Miyake en passant par Chanel ou Charles de Vilmorin, le parcours dans le Musée, jalonné par dix-sept modèles, trace des lignes de correspondance entre créateurs de mode et artistes, modernes ou contemporains.
1. Viktor&Rolf
Viktor Horsting, né en 1969 à Geldrop (Pays Bas)
Rolf Snoeren, né en 1969 à Dongen (Pays Bas)
Robe longueur genou à épaules dénudées en toile blanche et finie avec un cadre en bois. (Wearable Art Haute Couture, automne-hiver 2015)
Depuis la création de leur griffe en 1993, Viktor&Rolf n'ont cessé de bousculer les codes de la mode, entre mises en scène conceptuelles et parodies de comédies musicales. Ils envisagent la mode du côté de la distorsion, de la déconstruction, de la remise en question, au nom d'un style « maximal minimal ». Avec cette collection « d'art portable », le duo néerlandais met en abyme les prétentions « plasticiennes » et les paradoxes d'un univers tiraillé entre le bruit et le silence.
2. Thebe Magugu / Ernst Ludwig Kirchner
Thebe Magugu, née en 1993 à Kimberley, (Afrique du Sud)
«Tswana Mother and Child dress», robe en crêpe polyester recyclé, avec motifs originaux signés Phathu Nembilwi ; pièce unique réalisée en 2023 à partir de la collection « Heritage Capsule » 2020
À travers cet échange polychrome et figuratif, et à plus d'un siècle d'intervalle, deux palettes magnifient l'attitude féminine dans ses universelles différences. L'une, à Berlin, l'autre à Johannesburg. Thebe Magugu est le premier lauréat sud-africain du prix LVMH en 2019. « J'ai compris que l'urgence était d'aller chercher au fond de soi-même la lumière, l'espoir, la force », affirme-t-il. À travers l'intensité de ses couleurs, il partage avec le peintre expressionniste Ernst Ludwig Kirchner le feu des souvenirs, l'exploration intimiste du corps féminin, qu'il s'agisse de la solitude face au miroir ou de la figure maternelle glorifiée. Pour le peintre allemand,
« toutes les rencontres de la vie quotidienne ont ainsi été inscrites dans nos mémoires ».
Ernst Ludwig Kirchner (1880, Aschaffenbourg - 1938, Frauenkirch, Davos)
Toilette - Frau vor dem Spiegel [Toilette-Femme au miroir], 1913/1920
Dans la même salle, d'autres toiles de l'école expressionniste allemande :
August Macke (1887-1914) : Lautenspielerin [Joueuse de luth], 1910, huile sur toile
Emil Nolde (1867-1956) : Stilleben mit zwei Tänzerinnen [Nature morte aux danseuses], 1914, huile sur toile
Maria Marc (née Franck, 1876-1955) : Weihnachtengel mit Bethlehemszene, 2. Fassung [Ange de Noël avec scène de Bethlehem, 2e version], vers 1911-1912, huile sur toile
Gabriele Münter (1877-1962) : Drachenkampf [Combat du dragon], 1913, huile sur toile
Vassily Kandinsky (1866-1944) :
Improvisation 3, 1909, huile sur toile
Improvisation XIV, 1910, huile sur toile
3. Yves Saint-Laurent / Henri Matisse
Yves Saint Laurent (1936, Oran - 2008, Paris)
Ensemble du soir, haute couture, automne-hiver 1969, prototype réalisé dans l'atelier de Madame Esther. Robe et étole de crêpe et georgette de soie Abraham; sculpture moulée de Claude Lalanne en cuivre galvanique doré.
« Le plus beau vêtement d'une femme, c'est sa nudité » assurait Yves Saint Laurent, attentif à affranchir la mode de toutes ses entraves et de tous les tabous. En 1969, il poursuit le dialogue avec l'art initié par ses premières robes tableaux (1965) en travaillant directement dans l'atelier de son amie la sculptrice Claude Lalanne. Celle-ci réalise des moulages du corps de la mannequin Verushka. Autour de Luxe 1, la conversation se prolonge avec Henri Matisse, l'un des peintres préférés du couturier, sur le thème du mouvement et de la liberté: une leçon d'épure qui ne cherche pas à imiter la vie, mais modèle le sujet autour de la lumière.
Henri Matisse (1869, Le Cateau-Cambrésis - 1954, Nice)
Le Luxe I, été 1907, huile sur toile
Quelques autres toiles de Matisse dans la même salle :
Tête blanche et rose, 1914, huile sur toile
Marguerite au chat noir, 1910, huile sur toile
Intérieur, bocal de poissons rouges, printemps1914, huile sur toile
Porte-fenêtre à Collioure, 1914, huile sur toile
4. Comme des Garçons / Francis Picabia
Comme des Garçons [Rei Kawakubo, née en 1942, Tokyo (Japon)]
Ensemble issu de la collection Paysage d'Ombres, technique 100% coton. automne-hiver 2021-2022
« Au milieu du débordement incessant de choses diverses, du déluge de couleurs, du flot de sons et du flot d'informations... J'avais besoin de respirer dans la sérénité monochrome » assure Rei Kawakubo à propos de cette collection. Le noir dont elle a fait un étendard devient la matière de toutes les expansions millimétrées. C'est en expérimentant de nouveaux volumes qu'elle se joue de tous les stéréotypes, jusqu'à la démesure. Avec son ensemble bouffant XL, le modèle semble surgi de l'Udnie de Francis Picabia, la transe d'une danseuse dont la silhouette tourbillonne parmi les formes abstraites.
Francis Picabia (1879, Paris - 1953, Paris)
Udnie (jeune fille américaine ; danse), 1913, huile sur toile
Dans la même salle (Naissance de l'abstraction), on trouve :
Vassily Kandinsky : Mit dem schwarzen Bogen [Avec l'arc noir], 1912, huile sur toile
František Kupka (1871-1957) :
Étude pour Amorpha, Fugue à deux couleurs, 1911-1912, huile sur toile
Disques de Newton. Étude pour Fugue à deux couleurs, 1911-1912, huile sur toile
5. Popy Moreni / Georges Rouault
Popy Moreni, née en 1947, Turin (Italie)
Ensemble en velours de coton, applications de satin, organdi, broderies de paillettes et de fils multicolores, automne-hiver 1988-1989.
Arlequins, serpentins et velours multicolores témoignent chez Popy Moreni de l'insouciance des années 1980. Issue d'une famille d'artistes, elle crée à Paris ses premières collections en reprenant, de collerettes en manches bouffantes, l'inspiration de la commedia dell'arte, déjà célébrée par la créatrice Elsa Schiaparelli en 1938, avec une collection sur le thème du cirque. Une danse au-dessus d un volcan, entre lamés et paillettes, dont les écuyères, les clowns et particulièrement le pantin du peintre Georges Rouault, expriment la mélancolie derrière le masque.
Georges Rouault (1871, Paris - 1958, Paris)
Clown, 1910-1913, aquarelle et huile sur papier marouflé sur toile
Quelques autres tableaux de Rouault dans la même salle :
Passion, 1929-1945, huile, encre, gouache sur toile
L'Apprenti ouvrier, 1925, huile sur papier marouflé sur toile
Acrobate, vers 1913, encre, gouache et huile sur papier marouflé sur toile
Nu de dos, 1929-1939, huile, encre, gouache sur papier marouflé sur toile
6. Charles de Vilmorin / Sonia Delaunay
Charles de Vilmorin, né en 1996 à Saint-Germain-en-Laye
Ensemble « Robe à la française » composé d’une veste oversize à épaulettes asymétriques en taffetas peint à la main à l’acrylique, jupe à panneaux en taffetas peint à la main, crinoline en crin et baleines, bottes en collaboration avec Francesco Russo en cuir peint à la main, Haute Couture printemps été 2021
L'œuvre textile de Sonia Delaunay aurait, selon certains, disqualifié sa peinture. Et l'approche trop artistique de l'un des plus jeunes créateurs de mode français l'éloigne des standards d'un monde dans lequel il a fait irruption, sur Instagram, en plein confinement. Entre les motifs simultanéistes de l'une et les personnages « non genrés, sans origine » de l'autre, la couleur hausse le ton, libérant l'énergie d'une vision singulière, hors de toute assignation à une école. « Il faut revenir à l'essentiel de ce que nous sommes.
C'est plus frontal, plus brutal. J'ai voulu faire quelque chose de coloré. Je ne me suis pas demandé si c'était trop criard... » assure Charles de Vilmorin.
La robe de Charles de Vilmorin est placée au centre de la salle où sont accrochées des toiles de Sonia Delaunay et de son mari Richard Delaunay, sans référence à une toile particulère.
Sonia Delaunay, née Terk (1885, Gradizhsk - 1979, Paris) :
Rythme, 1938, huile sur toile
L'Hommage au donateur, 1916, peinture à la cire sur toile
Exilée au Portugal depuis le début de la Première Guerre mondiale, Sonia Delaunay reçoit cette commande au cours de l'été 1916. Il s'agit d'une étude pour le décor de la chapelle d'un couvent jésuite, la Misericordia à Valença do Minho (Portugal) jamais réalisé.
Robert Delaunay (1885, Paris - 1941, Montpellier)
Rythme, Joie de vivre, 1930, huile sur toile
Manège de cochons, 1922, huile sur toile
7. Iris van Herpen / Marc Chagall
Iris van Herpen, née en 1984 à Wamel (Pays-Bas)
Galactic Glitch' Dress, robe en organza transparent teint en dégradé dans des motifs aqua bleu ciel modélisés en trois dimensions dans un logiciel de CAO, puis découpés à la main en une centaine de fines vagues, cousues individuellement sur une tulle extensible.
Dans l'atelier d'Amsterdam, des mains découpent et simulent un corps en éclosion, en plein envol, à travers une robe. Sous ses ailes d'organza, cette « silhouette sculpturale frémissante » ainsi décrite par Iris van Herpen fait écho au tableau de Marc Chagall, Les Mariés de la Tour Eiffel : un autoportrait du peintre avec Bella, l'amour de sa vie, flottant parmi les souvenirs de Russie. Entre métamorphose et mémoire, illusion et exil, une double expression du bonheur et de sa fragilité.
Marc Chagall (1887, Vitebsk - 1985, Saint-Paul de Vence)
Les Mariés de la Tour Eiffel, 1938-1939, huile sur toile
Quelques autres Chagall dans la même salle :
L'Âme de la ville, 1945, huile sur toile
Les Toits rouges, huile sur papier marouflé sur toile de lin
Dimanche, 1952 - 1954, huile sur toile de lin
Autour d'elle, 1945, huile sur toile
A ma femme, 1933 / 1944, huile sur toile
8. Azzedine Alaïa / Marcel Breuer
Azzedine Alaïa (1935, Tunis - 2017, Paris)
Robe longue en jersey de laine noire, manches longues, col bateau, fermeture éclair en métal argenté, Azzedine Alaia haute couture 2003
Azzedine Alaïa, c'est une vie entière consacrée à un travail de coupe, associant le temps de l'Orient aux rythmes de l'Occident, dans une redéfinition anatomique du métier de couturier. Tout en collectionnant les maîtres, il observe, capte instinctivement les désirs de son temps, sculpte de ses propres mains des robes à fleur de peau. Pour sa collection automne- hiver 1981-1982, il s'inspire du modèle porté par Arletty dans Hôtel du Nord pour une robe au zip en spirale. Il revisite ce modèle vingt ans plus tard, dans un même élan. Cette démarche fait écho au Manifeste du Bauhaus par Walter Gropius en 1919: « Le monde des dessinateurs doit se tourner vers le bâtir. Il n'existe aucune différence, quant à l'essence, entre l'artiste et l'artisan. »
Marcel Breuer (1902, Pècs -1981, New York)
Salle à manger, 1926, 1 table, 3 chaises, bois laqué, acier chromé, textile
9. Chanel / Christian Schad
Gabrielle Chanel (1883, Saumur - 1971, Paris)
Haute Couture, entre 1925 et 1930. Robe du soir en dentelle de soie et taffetas de soie.
« Des centaines d'hommes en vêtements de femmes et de femmes en habits d'hommes dansaient sous les regards bienveillants de la police » : dans Le Monde d'hier, Stefan Zweig témoigne ainsi de l'atmosphère des années 1920, qui s'électrisent au rythme du jazz et de tous les travestissements. À Berlin, capitale des arts et de la fête, l'illusion de paix et de prospérité enfièvre les nuits de l'Apollo Theater ou de l'Eldorado, entre smokings et robes de lingerie. Comme échappée du tableau de Christian Schad, écrivain, peintre et poète allemand, organisateur du premier grand bal dada, une robe de Chanel la pionnière semble refléter ces nuits de champagne...
Christian Schad (1894, Miesbach - 1982, Stuttgart)
Le Comte St-Genois d'Anneaucourt, 1927, huile sur bois
Dans la même salle (Figurations Allemagne-France) :
Otto Dix (1891-1969) : Errinerungen an die Spiegelsäle von Brüssel [Souvenirs de la galerie des glaces à Bruxelles], 1920, huile et glacis sur fonds d'argent sur toile
Roger de la Fresnaye (1885-1925) : Portrait de Guynemer, 1922, huile sur toile
Max Beckmann (1884-1950) : Der kleine Fisch [Le Petit poisson], 2 juillet 1933, huile sur toile
10. Marine Serre / Marcel Duchamp
Martine Serre, née en 1991 à Brive-la-Gaillarde
Awakened Icon, défilé Marine Serre printemps-été 2021
« En inventant un langage, en privilégiant le regard porté sur l’objet trivial et banal, bicyclette, roue, urinoir, silhouettes de moulages flottant entre deux plaques de verre, Marcel Duchamp a initié de nouvelles relations entre l’art et le quotidien transfiguré en œuvre. "La collection Amor Fati est une invitation à embrasser concrètement tous les plaisirs et les adversités de la vie..." semble lui répondre la jeune créatrice française Marine Serre dans ce readymade expérimental que j’ai choisi parce qu’il associe en mode dada, le survivalisme et le recyclage. » (Laurence Benaïm, commissaire de l'exposition)
Marcel Duchamp (1887, Blainville-Crevon - 1968, Neuilly-sur-Seine)
Porte-bouteilles, 1914/1964
Marcel Duchamp :
Neuf Moules Mâlic, 1914-1915, verre, plomb, peinture à l'huile
Fontaine, 1917/1964, faïence, peinture
Fresch Widow, 1920/1964, bois peint, cuir
Le titre de cette œuvre tient à l'un de ces calembours qu'affectionne Duchamp. De French Window à Fresh Widow, cette fenêtre devient une « veuve effrontée » en référence au cuir noir de ses carreaux.
11. Jean-Paul Gauthier / Wilhelm Freddie
Jean Paul Gaultier, né en 1952 à Arcueil (France)
Corset de métal et dentelle plongé dans un bain d'argent, prêt à porter automne-hiver 1988-1989
Dans l'imaginaire surréaliste, l'anatomie se met à l'épreuve de tous les découpages qui sacralisent l'hybridité et la transgression. Ainsi en va-t-il du corps de la religieuse mis à nu par Wilhem Freddie autant que du corset « aux nénés pointus comme des cornets à la crème » celui dont Jean Paul Gaultier fera un emblème, en transformant ce vêtement de dessous en vêtement de dessus. Corset fétiche, corset talisman, perdant son image contraignante pour s'affirmer comme une arme de pouvoir. Un de ceux qu'arborera sur un costume masculin Madonna lors de sa tournée « Blond Ambition » (1990) : « La poitrine transperce la veste: c'est le pouvoir et la sensualité réunis » dira Jean Paul Gaultier.
Wilhelm Freddie (1909, Copenhague - 1995, Copenhague)
Nonnens bøn [La Prière de la religieuse], 1937, huile sur toile
12. Martin Margiela / Giorgio De Chirico
Martin Margiela, né en 1957 à Louvain (Belgique)
Robe imprimée de cheveux blonds, satin de viscose, Maison Martin Margiela, prêt à porter automne-hiver 2004-2005.
Cape artisanale» faite de 19 chapeaux en feutre récupérés, Maison Martin Margiela, prêt à porter automne-hiver 2004-2005.
Il a bâti sa propre identité, incognito, à l'image de sa griffe sans nom et blanche : « j'aime les vêtements que je n'ai pas inventés », dit-il. En mettant en avant les étapes de la fabrication (bâti, non fini, Stockman transformé en bustier), en jouant avec les tailles comme avec l'envers du décor (doublures, habits récupérés), Martin Margiela s'est imposé comme un chef de file dont la ligne artisanale a révélé l'envers de l'endroit, les jeux de trompe-l'œil. L'imaginaire se soumet à la précision anatomique, telle « l'écriture du songe » évoquée par le poète Ardengo Soffici à propos du peintre Giorgio de Chirico et de ses clairs obscurs.
Giorgio De Chirico (1888, Volos (Grèce) - 1978)
Il Ritornante, hiver 1917-1918, huile sur toile
13. Issey Miyake / Hans Hartung
Issey Miyake (1938, Hiroshima - 2022, Tokyo)
Mutants Pleats, polyester plissé, collection automne-hiver 1989-1990
À travers ses volumes poids plume issus de recherches technologiques, Issey Miyake suggère des formes primordiales et poétiques qui renvoient le futur à la nuit des temps, à l'éternel retour. Toute la mémoire se condense, fixant en apesanteur les peurs d'un enfant âgé de sept ans quand la bombe atomique explose à Hiroshima. Un temps hérissé de pointes auquel font écho les palmes noires de Hans Hartung, lui qui, petit, dessinait des éclairs. Deux corps ailés se côtoient, offrant au monde leurs blessures respectives.
Hans Hartung (1904, Leipzig - 1989, Antibes)
T 1956-14, 1956, huile sur toile
14. Yohji Yamamoto / Kazuo Shiraga
Yohji Yamamoto, né en 1943 à Tokyo (Japon)
Long manteau de drap noir doublé de soie sur un faux cul de taffetas de sole rouge, automne-hiver 1986-1987, répétition patrimoniale réalisée en exclusivité par le studio et l'atelier de Yohji Yamamoto, Tokyo pour l'exposition ; chapeau de laine, chaussures de cuir, entièrement confectionnés au Japon.
Si pour Kazuo Shiraga, la peinture est un combat physique avec la couleur, c'est dans le noir extrême et « enveloppant » que Yohji Yamamoto a trouvé l'essence de son expression. Lorsqu'il présente à Paris pour la première fois sa collection en 1981, ses mannequins sont pieds nus, les étoffes semblent usées. À la « poursuite d'une silhouette », et très inspiré par les photographies d'August Sander, il privilégie les vêtements utilitaires et ce « noir enveloppant » pour mieux les calligraphier. Relevée par un faux cul rouge, une redingote très androgyne semble se refléter dans l'une des « performance paintings » de Shiraga, peignant avec son corps.
Kazuo Shiraga (1924, Amagasaki (Japon) - 2008, Amagasaki)
Chizensei Konseimao [Planète nature], juillet 1960, huile sur toile
15. Kevin Germanier / Ulrike Ottinger
Kevin Germanier, né en 1992 à Granges (Suisse)
« Alien brodé », recyclage de trois silhouettes Germanier, printemps-été 2022, perles de plastique upcyclées de Hong- Kong, fil de pêche
À l'image des visions mosaïques d'Ulrike Ottinger, les silhouettes de Kevin Germanier sont des apparitions. L'artiste observe et raconte le Paris des années 1960 dans ses peintures comme dans ses films (Paris Calligrammes). De son côté, le créateur « surcycle » tous les déchets de la société de consommation, chutes de tissus, invendus, plumes, strass, jouets, perles, gadgets, pour raconter «la vie dans tout son éclat » La ligne se courbe, électrisant l'anatomie dégenrée dans une fiction qui se joue de l'époque et de ses tabous moralisateurs. Entre jeu d'enfant et apocalypse au bazar,
sa signature est une ode déjantée au surcyclage qui rappelle les perles d'amour multicolores et pop d'Ulrike Ottinger.
Ulrike Ottinger, née en 1942 à Constance (Allemagne)
Liebesperlen [Perles d'amour], 1967, huile sur toile
16. Lanvin / Martial Raysse
Lanvin - Alber Elbaz (1961, Casablanca - 2021, Paris)
Robe droite sans manches en soie imprimée buste antique blanc, passage 13, printemps-été 2013
« Essayer de travailler avec le corps, pas contre lui », telle est la volonté d'Alber Elbaz, directeur artistique de Lanvin de 2001 à 2015. Qu'il s'agisse de ses robes drapées, de ses vestes à bords francs, de ses robes de soie à zip industriel, l'obsession est la même : célébrer non pas une femme, mais toutes les femmes, mères, épouses, sœurs, dans un hommage renouvelé à leurs attitudes. Se jouer ici d'un corps de déesse en l'exhibant dans un imprimé trompe-l'œil. Cette déconstruction de la féminité infroissable, de la recherche de l'anatomie parfaite et refaite vient ici faire écho aux compositions de Martial Raysse et à sa critique de la société de consommation, un demi-siècle plus tôt.
Martial Raysse (né en 1936 à Golfe-Juan, vit et travaille à Issigeac)
Tableau métallique : portrait à géométrie convexe, 1964, flocage, peinture industrielle sur toile avec encadrement de bois peint
et le dernier dialogue :
17. Dior / Ellsworth Kelly
Christian Dior (1905, Granville - 1957, Montecatini)
«Bar», tailleur d'après-midi, veste en shantung naturel, jupe corolle en lainage plissé, haute-couture printemps-été 1947, ligne Corolle
Le 12 février 1947, Christian Dior lance au 30 avenue Montaigne à Paris, sa première collection. Quatre-vingt-dix modèles, taille fine et cintrée, buste souligné. Parmi tous les modèles, le tailleur Bar marque le « retour du joli, et du seyant » mais également « d'un idéal de bonheur civilisé » selon le couturier. Avec Dior, la haute couture se condense dans une science de l'aplomb, des volumes. Tout semble opposer cet artificier de la ligne et le peintre américain minimaliste Ellsworth Kelly. Tout sépare le couturier du bonheur et celui qui, en 1951, expose des tableaux qui « ne décrivent plus rien ». Il reste qu'au-delà des formes, figuratives ou impersonnelles, chacun défend à sa manière l'éloquence du silence, celui des lignes.
Ellsworth Kelly (1923, Newburgh (États Unis) - 2015, Spencertown)
White Over Black III, 2015, huile sur toile, deux panneaux joints
Chana Orloff - sculpter l'époque
Le musée Zadkine, un des plus petits de Paris, installé dans l'ancienne maison du sculpteur et son atelier, rue d'Assas, abrite en ce moment une grande (par le nombre et la qualité des œuvres) exposition consacrée à une autre sculptrice, Chana Orloff (1888-1968), dont l'atelier était à deux pas, dans la même rue, au début des années 1920.
Nous avions déjà eu l'occasion de découvrir certaines de ses œuvres dans l'exposition Pionnières au Musée du Luxembourg en 2022 (nos billets des 23 avril et 30 avril 2022).
Née dans une localité ukrainienne actuellement occupée par la Russie depuis l'invasion de février 2022, elle l'avait quittée avec sa famille en 1905 pour la Palestine, qui faisait alors partie de l'Empire ottoman, à la suite de pogroms. Venue à Paris en 1910, à vingt-deux ans, pour étudier et travailler dans la haute couture, elle se tourna vers la sculpture et devint une membre active des cercles artistiques de l'époque, aux côtés de Marc Chagall, Chaim Jacob Lipchitz, Amedeo Modigliani, Pascin, Chaïm Soutine, Ossip Zadkine. Naturalisée française en 1926, elle mena une brillante carrière en France et aux USA, jusqu'à la deuxième guerre mondiale où elle échappa à la rafle du Vel d'Hiv et put se réfugier à Genève. Elle revint en France en 1945 pour y trouver son atelier dévasté et pillé. Elle partagea ensuite sa vie entre la France et Israël, où elle mourut en 1968 lors d'un séjour à Tel Aviv.
Salle 1 : La portraitiste de Montparnasse
Maria Lani, modèle et actrice, 1928, plâtre doré
Auguste Perret, architecte, 1923-1924, bronze
Pierre Chareau, architecte et décorateur, 1921, plâtre
Madame Fleg, épouse de l'écrivain Edmond Fleg, 1920, bois
Maria Lani
Andrée (Andrée Justman, née André Marie, belle-fille de l'artiste), 1948, bronze
Anaïs Nin, écrivaine et poétesse, 1934, plâtre
Francis Jourdain, architecte, 1927, plâtre
Lucien Vogel, éditeur, 1922, ciment teinté
Le Peintre juif, portrait présumé de l'écrivain Abraham Resin, 1920, bronze
Femme au turban, portrait de la peintre, sculptrice et décoratrice Sarah Lipska, 1925, plâtre
Didi (Élie Justman, fils de l'artiste), 1919, bronze doré
Alexandre Iacovleff, 1921,ciment
Gaston Picard, 1920, bois
Georges Lepape, dessinateur, affichiste et illustrateur, 1924, plâtre
Victor Rey, fondateur du journal Le Chat noir, administrateur colonial et père du critique d'art Robert Rey, 1924, plâtre
M. Kundig, libraire, 1943, plâtre
Otto Rank, psychanalyste, 1927, plâtre peint
Le Peintre Reuven Rubin, 1926, bronze
Autoportrait, 1940, plâtre
Portrait de l'auteur, 1919, gravure sur bois sur papier vélin
Au milieu de la pièce :
Per Krohg, 1924, bronze
Le peintre et musicien norvégien Per Krohg (1889-1965) est représenté ici en train de jouer de l'accordéon.
Nadine, 1921, bois
Ce portrait de Nadine Vogel fut commandé à Orloff par son père, l'éditeur Lucien Vogel, en même temps que le sien et celui de son épouse.
Le Peintre Widhopff ou L'Homme à la pipe, 1924, plâtre peint
Né à Odessa (actuelle Ukraine), le peintre et dessinateur David Ossipovitch Widhopff (1867-1933) émigre en 1887 à Paris. Il se fait surtout connaître pour sa collaboration avec Le Courrier français, quotidien dont il est, à partir de 1896, le principal illustrateur.
Deux portraits par Amedeo Modigliani :
Chana Orloff, vers 1916, plume et encre brune
Ary Justman (mari de Chana Orloff), 1918, graphite
En dialogue :
Ossip Zadkine : La Sainte Famille, 1912-1913, mortier de plâtre, pigments
Chana Orloff : Le Baiser ou La Famille, 1916, bronze
Chana Orloff : Sérénité, 1916, bois
en regard de :
Ossip Zadkine : Tête d'homme, 1922, bois doré à la feuille et Masque, 1924, bois de buis
et sous le regard de la même tête en bois doré de Zadkine : Torse, 1912, ciment.
Composé de façon frontale et tout en sinuosité, le Torse est l'une des premières sculptures de Chana Orloff et montre son penchant pour la simplification des formes. Il rappelle l'art des Cyclades et la statuaire égyptienne, pour laquelle la sculptrice éprouve un « coup de foudre ». Le Torse est néanmoins d'une grande modernité car Orloff a choisi de le réaliser en ciment, matériau plutôt associé à l'architecture et encore très peu utilisé pour la sculpture.
Salle 2 : Femmes en mouvement
Femme à la cruche ou Porteuse d'eau, 1923, bois de noyer
Ruth et Noémie, 1928, plâtre peint
Georgette Gagneux, 1931, plâtre
Le premier monument commandé à Orloff est consacré à Georgette Gagneux. Aussi précoce que talentueuse, la jeune athlète s'illustre dans différentes disciplines: sprint, saut en longueur et lancer de poids. Six fois championne de France, elle bat plusieurs records, mais, épuisée par la tuberculose et la compétition, elle meurt à l'âge de 23 ans. Sur sa stèle funéraire, Orloff lui fait reprendre vie en la représentant en plein élan et la bouche ouverte, comme si elle voulait prendre une grande inspiration ou crier.
Ida Chagall, 1923, bronze
L'artiste représente ici la fille du peintre Marc Chagall, Ida, à l'âge de 7 ans. Chana Orloff connaissait la famille Chagall, et Ida était l'une des compagnes de jeu de son fils Élie. Volontairement, la sculptrice accentue ici la rondeur des formes du corps de la fillette, saisie dans un moment d'intimité et dont le visage poupin et joufflu respire la joie de vivre. Sa chevelure bouclée, traitée en masse triangulaire, évoque la statuaire égyptienne.
Madone, 1914, terre cuite
Pauline Lindelfeld, amie polonaise d'Orloff, a servi de modèle pour ce buste. Bien qu'exécuté à sa sortie de l'École des arts décoratifs, il témoigne déjà de la maturité du langage plastique de la sculptrice.
Dame à l'éventail, 1920, bronze
Ce buste représente la peintre Ivanna Lemaître (1893-1973), aristocrate russe réfugiée en France lors de la révolution de 1917, qui épouse le peintre André Lemaître et réalise avec lui de nombreux décors monumentaux
Les Danseurs, 1923, bronze
Chana Orloff a sculpté des danseuses toute sa carrière, presque toujours seules, parfois en duo ou en trio. Le couple de Danseurs, qui connaît un grand succès au Salon d'automne de 1923, fait exception. La tenue de marin évoque les bals costumés prisés à l'époque. Les deux corps imbriqués miment les nouvelles danses comme le tango ou le fox-trot qui arrivent d'outre-Atlantique et rythment les soirées parisiennes, dans l'entre-deux-guerres.
Danseuse au voile, 1960, bois
Danseuse au disque, 1914, bois
Amazone, 1915, bronze
En intitulant sa sculpture Amazone, Orloff désigne la posture de la cavalière avec les deux jambes sur le même flanc. Elle fait aussi référence au peuple de guerrières de la mythologie grecque, qui seraient originaires d'une région correspondant à l'Ukraine, d'où vient sa famille.
Deux danseuses, 1914, bois
Buste de femme, 1918, bois
et en regard, d'Ossip Zadkine :
Buste de jeune femme, 1914, ciment
Virginité ou Hermaphrodite, 1926, bronze
Salle 3. Maternités
Grand-mère et petite-fille, 1918, bois
Maternité, 1924, bois
Dame enceinte, 1916, plâtre peint
La Dame enceinte, Revue SIC, no 14, février 1917, pl. VIII
Moi et mon fils, 1927, bronze
Femme allongée et Didi sur la plage, 1919, bois gravé
Maternité allaitant, 1949, bronze
Maternité, 1924, bronze
Mère d'un fils né en 1918, Orloff revendique l'importance de la maternité dans sa création : « Je suis convaincue que pour une créatrice, la maternité est nécessaire, puisque tout art trouve dans la vie sa source profonde. » Sur ce thème traditionnel, elle propose de nombreuses variations. La Renaissance italienne inspire ici la sculptrice, qui fréquente le Louvre depuis ses études et connaît l'art ancien. Le style d'Orloff demeure néanmoins reconnaissable, notamment dans les traits ronds de l'enfant qui ressemble à son fils Élie, surnommé Didi.
Portrait de Didi, 1919-1920, bois gravé
Maternité, 1922, plâtre
Guenon avec son petit, 1922, plâtre
et en majesté dans le bow-window :
Grande baigneuse accroupie, 1925, bronze
En contrepoint, d'Ossip Zadkine :
Maternité, 1919, marbre partiellement peint
Sculpture ou Femme debout, 1922, bronze
4. Bestiaire
Sauterelle, 1939, bronze
Le corps de cette Sauterelle rappelle les chars d'assaut allemands, et ses ailes le symbole des divisions d'infanterie SS, en forme de crochet. Mais l'insecte est aussi porteur d'un sens symbolique puisque la nuée de sauterelles est, dans la Bible hébraïque, l'une des sept plaies infligées à l'Égypte par le dieu des Hébreux, retenus en esclavage. La propagande antisémite nazie recourt à l'image du nuage de sauterelles pour assimiler les juifs à des insectes ravageurs. Orloff renverse ici la métaphore, en désignant la machine de guerre nazie comme le véritable danger.
Poisson fontaine, 1929, bronze doré
Poisson, 1922, plâtre
avec en contrepoint, d'Ossip Zadkine :
Poisson, 1927, albâtre, verre
Dindon, 1925, bronze doré
Inséparables II, 1955, bronze doré
Oiseau 14-18, 1923-1924, plâtre peint
avec, en contrepoint, d'Ossip Zadkine :
Oiseau d'or, 1924, plâtre peint et doré à la feuille
Près de la porte de sortie de la maison, donnant accès au jardin où se trouve l'atelier de Zadkine, une vitrine avec encore quelques statues d'animaux :
Autruche, 1941, plâtre
Caniche assis, 1941, plâtre
Caniche debout, 1941, plâtre
Dans le jardin, encore quelques statues de Chana Orloff :
Chèvre, 1958, bronze
Oiseau en marche, 1958, bronze doré
Héron, 1957, bronze doré
Monina Farr, 1926, ciment
Mon fils marin, 1927, pierre
Terminons ce billet avec l'atelier de Zadkine, qui accueille pour cette exposition quelques œuvres de Chana Orloff, autour d'un exemplaire en plâtre grandeur nature de Maternité Ein-Gev (1952), monument en mémoire de Chana Tuckman morte durant la guerre d'indépendance d'Israël.
Oiseau blessé, 1955, plâtre peint
Recueillement, 1963, bois
David Ben Gourion, 1949, plâtre
Le Retour, 1945, bronze
Chana Orloff réalise cette sculpture au retour de son exil suisse. Inspirée de portraits de survivants du camp de Buchenwald, elle incarne la désillusion et la blessure d'Orloff, qui vit alors - comme de nombreux artistes - un moment de profonde remise en question. La sculptrice s'interroge sur la possibilité de sculpter le néant » et cherche une façon de le faire pour se libérer ». La matière accidentée du Retour, comme déchiquetée, est en complète rupture avec le style d'avant- guerre de l'artiste. Il s'agit de l'une des rares expressions de douleur dans son œuvre.
Trois études pour Le Retour, vers 1945, plume et encre brune.
et enfin des carnets de Chana Orloff et des photographies de l'artiste avec des amis autour du modèle du monument Ein-Guev.
Picasso : dessiner à l'infini (II/II)
Nous poursuivons dans ce billet la déambulation parmi les près de mille œuvres rassemblées dans l'exposition qui vient de se terminer au Centre Pompidou (cf. notre billet du 21 janvier dernier)
Étude pour Femme en chemise dans un fauteuil, Paris, automne 1913, gouache, aquarelle, crayon graphite et crayon Conté dur papier
Olga à la couronne de fleurs, Paris, 1920, fusain sur papier
Deux jeunes saltimbanques ou danseurs, 1917-1919, crayon graphite sur papier
Olga dans un fauteuil, Paris, fin 1919, encre sur papier
Tête d'Arlequin, Paris, 1916, crayon graphite sur papier
Grande baigneuse couchée, Juan-les-Pins, 1920, crayon sur papier
Femme se reposant, 1931, pointe sèche sur papier vergé
Sur la plage II (trois nus), Paris, 8 Mars 1921, crayon lithographique sur papier report décalqué sur pierre
Trois nus, Antibes, été 1923, encre sur papier à entête de l'« Hôtel du Cap d'Antibes »
Deux nus, Antibes, 1923, encre sur papier à entête de l'« Hôtel du Cap d'Antibes »
Homme endormi et nymphe debout, Antibes, 1er novembre 1946, crayon graphique sur papier
Jean Cocteau, 8 avril 1917, crayon graphique sur papier
Portrait de Guillaume Apollinaire de profil, la tête bandée, Paris, 1916, crayon graphique et crayon Conté sur papier
Portrait de Jacques Prévert, 26 septembre 1956, crayon de couleur sur papier
Portrait de Francis Poulenc, 13 mars 1957, crayon graphique sur papier
Le Peintre et son modèle, Paris, 12 février 1928, encre sur papier
Femme assise dans un fauteuil, 1926-1927, encre sur papier
Atelier de la Californie, Cannes, 29 octobre 1955, crayon graphique sur papier
L'Arbre, Paris, 4 janvier 1944, encre et grattages sur papier
Minotaure aveugle guidé par une fillette, Boisgeloup, 5 octobre 1934, encre sur papier
L'Atelier, 22 février 1933, crayon graphite sur papier
Nature morte devant une fenêtre, Paris, 1919, papiers gouachés et papier imprimé découpes et collés sur papier
La Salle à manger de l'artiste rue La Boétie, Paris, 1918-1919, gouache, encre et crayon graphite sur papier
Nature morte devant une fenêtre, 1919, aquarelle sur papier
Fenêtre ouverte sur la mer et avion dans le ciel, Saint-Raphaël, 12 Octobre 1919, gouache
Compotier, partition, bouteille et guitare devant une fenêtre, Saint-Raphaël, 1919, pochoir en couleurs
Picador et taureau, 1921-1923, encre sur papier
Cheval et son dresseur, Paris, 23 novembre 1920, crayon graphite sur papier (trois dessins)
Coq, 1918, gouache sur papier
Coq, vers 1945, encre sur carton, verso d'un carton d'invitation
Études pour un projet d'illustration du Bestiaire de Guillaume Apollinaire et études de nus aux bras levés pour Les Demoiselles d'Avignon, Paris, mai-juin 1907, feuillets extraits du carnet FCPN 2037-103, encre sur papier
Portraits de Michel Leiris, 1963, crayon graphite sur papier, crayon graphite et pastels gras sur papier
Portrait d'Erik Satie, Paris, 19 mai 1920, crayon graphite et fusain sur papier
Portrait de Léon Bakst, Paris, 1er avril 1922, crayon graphite sur papier
Un des 40 dessins de Pablo Picasso réalisé dans l'exemplaire de Buffon de Dora Maar
La Chèvre, octobre 1946, peinture oléorésineuse et fusain sur contreplaqué
Arlequin, 1923, huile sur toile
La Minotauromachie, 1935, eau-forte, grattoir et burin sur cuivre, VII" état, épreuve sur papier
L'Atelier. Le Peintre et son modèle, Nice, été 1955, encre feutre sur papier
Danse sur la plage, Nice, été 1955, encre feutre et crayon de couleur sur papier
Tête de Faune, Nice, été 1955, encre feutre sur papier
Étude pour La Fermière, La Rue des Bois, été 1908, crayon Conté sur papier
Trois études de femme de dos au chignon aux bras levés [La Rue des Bois], été 1908, crayon graphite, fusain et encre sur papier
Étude pour Les Demoiselles d'Avignon. Nu de dos aux bras levés, Paris, printemps 1907, fusain, gouache et craie blanche sur papier marouflé sur toile
Études de nu debout les bras au-dessus de la tête, Paris, 22 juin 1946, crayon de couleur sur papier
Études. Femme au vase de fleurs assise devant une table [Golfe-Juan], 7 août 1946, gouache et crayon graphite sur papier
Femme sur un canapé, Paris, 22 juin 1946, crayon de cire et crayon graphite sur papier
Intérieur à l'armoire à glace, Paris, novembre 1941, aquarelle, encre et crayon graphite sur papier
L'Aubade, Paris, 4 mai 1942, huile sur toile
Femme nue étendue les bras derrière la tête, Paris, 12 décembre 1941, pastels gras, fusain et crayon graphite sur papier
Femme nue étendue, Paris, 12 décembre 1941, pastel sur papier
Deux femmes nues, Paris, 1941, gouache et encre sur papier
Étude pour L'Aubade. Trois femmes nues, Paris, 5-6 janvier 1942, gouache sur papier
Grand nu dansant, 1962, linogravure en couleurs
Nu assis se coiffant, 7 mars 1954, crayon graphite sur papier (I et II)
Nu se coiffant, 17 mars 1954, encre sur papier
Un ensemble d'études (1906-1907-1908), notamment en préparation des Demoiselles d'Avignon et de Trois Femmes.
Le Taureau, Paris, 5 décembre 1945-17 janvier 1946, lavis, plume et grattages sur pierre, XI états, épreuves sur papier
Le Peintre et son modèle devant le tableau, Boisgeloup, 30 octobre 1930, encre sur papier
Le Peintre et son modèle, Boisgeloup, 2 novembre 1930, encre sur carton
Le Peintre masqué et son modèle, 1er février 1954, crayons de couleur sur papier
Le Peintre et son modèle, Mougins, 4 juillet 1979, crayon Conté sur carton, crayon de couleur sur carton (8 dessins de I à VIII)
Le Déjeuner sur l'herbe d'après Manet, Vauvenargues, 3 mars-20 août 1960, huile sur toile
Le Déjeuner sur l'herbe, Mougins, 19 juillet 1962, crayon graphite et craies grasses sur papier
Le Déjeuner sur l'herbe d'après Manet. I, Mougins, 26-30 janvier 1962, linoleum gravé a la gouge, I" état, épreuve sur papier réhaussée aux crayons de couleur
Variation sur Le Déjeuner sur l'herbe de Manet, Mougins, 4 juillet 1961, linoléum gravé à la gouge, 1er état, épreuve sur papier
Femme nue assise contemplant un homme endormi, 1943, encre sur papier
Les Deux Femmes nues, Paris, 31 janvier 1946, lavis et grattage sur pierre, XIVe état, épreuve sur papier rehaussée au crayon aquarelle et au vernis
Les Deux Femmes nues, Paris, 13 novembre 1945, lavis sur pierre, Ile état
Sculpteur travaillant sur le motif avec Marie-Thérèse posant, Paris, 31 mars 1933, eau-forte sur cuivre, Ile état
Femme endormie et homme assis [Boisgeloup ou Paris], 22 septembre 1931, crayon graphite sur papier
Sculpteur et son modèle avec un buste sur une colonne, Paris, 31 mars 1933, eau-forte sur cuivre, épreuve sur papier, tirée sur le vernis par l'artiste
L'Atelier du sculpteur, Juan-les-Pins, 8 août 1931, encre sur papier
Terminons sur une série de portraits, avec notamment le portrait de Françoise qui orne l'affiche de cette exposition hors normes.
Études pour autoportraits, Paris, automne 1906, crayon graphite sur papier
Portrait de Paloma, 21 décembre 1952, crayon graphite, crayons de couleur et gommage sur papier
Dora Maar au collier, Paris, 7 octobre 1937, pointe sèche sur cuivre, épreuve sur papier, tirée par l'artiste
Portrait de Dora Maar, Mougins, 15 août 1937, pointe sèche sur cuivre, épreuve sur papier
Buste de femme au chapeau, 1938, crayon graphite, encre et fusain sur papier
Femme assise dans une chaise (Dora), crayon graphite, gouache et craie de couleur sur papier
et sept Portrait de Françoise ou Françoise au bandeau, la plupart de 1946, techniques diverses.
Le souffle de l'architecte - Fondation Cartier
Comme souvent à la Fondation Cartier, une exposition originale autour de l'œuvre d'un architecte, Bijoy Jain, né en 1965 à Bombay, fondateur du Studio Mumbai en Inde. Selon les organisateurs, "il est l’auteur d’une œuvre témoignant d'une profonde préoccupation pour la relation entre l'homme et la nature, et dont le temps et le geste sont des facteurs essentiels. Explorant les liens entre l’art, l’architecture et la matière, Bijoy Jain propose à la Fondation Cartier une création totale : un espace de rêverie et de contemplation en dialogue avec le bâtiment iconique de Jean Nouvel."
Le commissaire de l’exposition et directeur général artistique de la Fondation Cartier a proposé également à Bijoy Jain de convier l’artiste chinoise vivant à Pékin Hu Liu (née en 1982 à Xinyang (Henan) et la céramiste danoise d’origine turque demeurant à Paris Alev Ebüzziya Siesbye (née en 1938 à Istambul). Accordant la même importance à la maîtrise rituelle du geste, à la résonance et au dialogue avec la matière, tous trois partagent le même éthos et la même sensibilité. Les dessins monochromes noirs de HU Liu sont entièrement réalisés au graphite, par l’itération d’un même mouvement, afin de révéler l’essence d’éléments naturels : l’herbe caressée par le vent, le ressac des vagues ou la silhouette des branches d’un arbre. Les céramiques d’Alev Ebüzziya Siesbye, comme en apesanteur, sont également le fruit d’une grande dextérité et d’un dialogue intense avec la terre.
Dans la grande salle du sous-sol, plongée dans la pénombre, les travaux du Studio Mumbai dialoguent avec les poteries d'Alev Ebüzziya Siesbye posées sur deux tables à une extrémité de la pièce.
L'exposition ne propose pour les œuvres aucun titre ni explication sur les matières employées : le lecteur est invité, comme le visiteur de l'exposition, à se laisser prendre par le cadre proposé par Bijoi Jain.
Au mur, des structures géométriques et de petits objets
Des sortes de tableaux, en matières diverses notamment textiles
Au sol, une myriade de petites statues de pierre, principalement des animaux
De très beaux sièges de bambou et de fils de soie, sur lesquels le visiteur est convié à s'asseoir, s'accordent avec les installations
Une grande structure en bambou et ficelle de soie, dite tazia occupe le fond de la salle
Les poteries d'Alev Ebüzziya Siesbye, sur deux tables devant cette structure, dialoguent avec l'ensemble.
Dans la petite salle attenante, les dessins monochromes noirs de Hu Liu, entièrement réalisés au graphite, sont accrochés aux parois
et voisinent avec des pierres sculptées et un siège du Studio Mumbai.
En montant au rez-de-jardin, de petits animaux de pierre accompagnent le visiteur
La grande salle est organisée autour de Prima Materia, réalisée en bambou puis nouée avec un fil de soie pour former une structure facettée diaphane, réfractant la lumière. La cour intérieure offre un lieu de pause et de quiétude.
Dans la cour, divers objets, des sièges et une mystérieuse grosse boule de couleur ocre elle aussi tissée
À l'extrémité de la salle, une sorte de grande tenture est tendue en toile de fond
Le long des parois, à l'extérieur, des objets et sièges divers
Une haute structure tazia
Un gong que le visiteur est invité à faire sonner, et dont le son ponctue la visite de l'exposition, une petite structure en brique, divers éléments architecturaux
L'autre salle du rez-de-jardin est organisée autour de Kayani Abstract Water Drawing, composé de craie des carrières du nord de Paris ainsi que d'un dessin réalisé à l'aide d'un pigment et représentant un plan d'un espace d'eau.
Autour de Kayani Abstract Water Drawing, aux détails harmonieux, des sièges de bambou et diverses pierres sculptées
Terminons ce parcours très zen par un tour du jardin, parsemé de diverses sculptures en matériaux variés, visibles des salles du rez-de-jardin aux parois de verre
Au fond du jardin, dominant l'amphithéâtre, une autre grande structure tazia.