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La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

27 Juillet 2024 , Rédigé par japprendslechinois

Dans une salle de la médiathèque de Brest, qui ouvre sur le grand hall de l'atelier des Capucins (voir notre billet du 2 septembre 2018), une intéressante exposition sur la Jeanne d'Arc.

En effet, 2024 marque le 60° anniversaire de la 1re mission du porte-hélicoptères Jeanne d'Arc. Navire-école et ambassadrice de la France tout au long de ses 46 années de service, «la Jeanne» a pris sa retraite en 2010 après 45 campagnes autour du monde. Ce navire emblématique de la Marine nationale est indissociable de Brest, son port d'attache. Conçue en partenariat avec la Marine nationale, la Ville de Brest, le Service historique de la Défense, l'École navale, le Musée national de la Marine, Naval Group et les Ateliers des Capucins, cette exposition propose de découvrir la vie de la Jeanne. Elle évoque successivement sa construction au sein de l'arsenal de Brest, sa mission de formation des officier-élèves, son rôle d'ambassadrice de la France et ses liens étroits avec Brest, port base, lieu de son entretien, lieu d'adieux et de retrouvailles, et aussi ville mise en valeur lors de certaines escales de la Jeanne. Le choix des Ateliers des Capucins pour héberger cette rétrospective est symbolique du lien qui unit la ville de Brest à ce navire entré dans la légende. C'est dans ce haut lieu des constructions navales brestoises qu'ont été fabriqués et entretenus de nombreux éléments de la Jeanne, comme l'arbre d'hélice et l'hélice qui y sont aujourd'hui conservés.

Quelques chiffres :

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

À l'entrée, une maquette au 1/100e représentant le navire dans sa configuration postérieure à 1975, avec l'installation des six missiles anti-navire Mer-mer 38 "Exocet" sur le roof avant.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Une "vue d'artiste" du bâtiment (avant 1975)

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Quelques modèles d'hélicoptères embarqués sur la Jeanne :

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Sikorsky - HSS
Développé par la firme américaine Sikorsky Aircraft Corporation, cet hélicoptère est acquis par la Marine au milieu des années 1950 pour la lutte anti-sous-marine. Fabriqués sous licence par Sud-Aviation, les HSS embarquent sur la Jeanne d'Arc dès la première campagne et jusqu'en 1978. (Modèle à l'échelle 1/72)
Alouette III (SA 316/319b)
Conçu par Sud-Aviation à la fin des années 1950, cet hélicoptère léger embarque à bord de la Jeanne d'Arc dès la première campagne. Les derniers exemplaires ont été retirés du service en décembre 2022. (Modèle à l'échelle 1/43)
Super Frelon (SA 321)
Conçu par Sud-Aviation au début des années 1960, cet hélicoptère lourd à capacité anti-sous-marine est prévu pour la Jeanne d'Arc en temps de guerre. Il n'a cependant jamais embarqué en campagne d'instruction. (Modèle à l'échelle 1/72)
 

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Les plans originaux du bateau sont présentés dans l'exposition :

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Ils comportent l'historique des modifications, et l'approbation du plan original, proposée à travers la chaîne hiérarchique de la Direction centrale des constructions et armes navales et signée par de Secrétaire d'État à la Marine (Paul Anxionnaz) le 31 mai 1957.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Brest et la construction des grands navires
Fondé en 1631, l'arsenal de Brest s'est spécialisé très tôt dans la construction des grands navires. À partir des années 1840, il se dote des ateliers des Capucins et d'équipements performants comme le marteau pilon des forges de Pontaniou (1867). Il s'étend au 20e siècle à l'ouest de la Penfeld avec les quais de Laninon et le creusement des bassins n° 8 et 9. Avant la Seconde Guerre mondiale, les cuirassés Dunkerque et Richelieu naissent de son savoir-faire.
Dévasté au cours du conflit, l'arsenal est relevé par la Direction centrale des constructions et armes navales (DCCAN, créée en 1946). Dès le début des années 1950, il est à nouveau en pleine capacité avec la construction du croiseur Colbert et du porte-avions Clemenceau. La construction du porte-avions Foch y sera achevée. C'est dans cette continuité qu'il devient le berceau de la Jeanne d'Arc.
Des photos de la construction du navire.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

La mise à flot du bâtiment a lieu le 30 septembre 1961 sous la présidence du ministre des Armées, Pierre Messmer. Il porte provisoirement le nom de "La Résolue" : en effet, à l'époque le nom de "Jeanne d'Arc" était encore porté par le navire-école qui l'a précédé, un croiseur léger qui a rempli cette fonction de 1931 à 1964.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

À propos de la propulsion du bâtiment :
Schéma explicatif du fonctionnement des machines à vapeur de la Jeanne d'Arc
La Jeanne d'Arc est équipée de 2 appareils propulsifs, 2 lignes d'arbres, 2 hélices, l'ensemble est de la responsabilité de l'ECAN Indret (études, montage, essais et suivi en service)
- L'une des machines de La Résolue au banc d'essai, Établissement des constructions et armes navales (ECAN) d'Indret, automne 1961
- Mise en place de l'une des quatre chaudières de La Résolue
La chaudière est descendue dans son compartiment à travers une brèche ouverte dans le pont, 21 décembre 1961

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Quelques équipements de la Jeanne :
La sirène du bateau
Un élément de porte-voix (utilisé en cas d'avarie des interphones)
Un répétiteur de compas gyroscopique (qui, à la différence des compas magnétiques, indique le nord géographique)

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

La Résolue rencontre le croiseur Jeanne d'Arc
Alors que "La Résolue" accomplit sa croisière d'endurance, elle navigue quelques instants avec le croiseur Jeanne d'Arc qui achève son ultime campagne d'application. Les deux navires font escale le lendemain à Fort-de-France. (19 mars 1964, au large de la Martinique)

Le croiseur-école Jeanne d'Arc (1931-1964)
Deuxième "Jeanne d'Arc" affectée à l'École d'application, elle intègre le rôle de navire-école dès sa conception. Longue de 170 mètres pour un déplacement de 8 000 tonnes, elle peut accueillir 156 officiers-élèves. Dans cette maquette à l'échelle 1/160, le navire est représenté dans sa configuration de fin de guerre, après sa modernisation à Alger, en 1943.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Le croiseur-cuirassé Jeanne d'Arc, mis à l'eau en 1899, armé en 1902, est devenu en 1912 le navire-école d'application des officiers-élèves de la Marine nationale, établissant la tradition des navires-école Jeanne d'Arc. Après diverses missions au cours de la 1ère guerre mondiale, cette Jeanne d'Arc reprend en 1919 sa mission de navire-école, et désarme à Brest en 1928, après 9 campagnes d'application des élèves officiers de l'Ecole navale.
Longueur    145 mètres
Maître-bau    19,4 mètres
Tirant d'eau    8,1 mètres
Déplacement    11 270 tonnes
Propulsion    3 machines (36 chaudières)
Puissance    28 500 cv
Vitesse    23 nœuds
Il est représenté sur cette photo prise au cours de la campagne 1921-1922

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Les conserves de la Jeanne

La Jeanne était toujours accompagnée au cours de ses missions d'un vaisseau escorteur dit conserve (de l'expression "naviguer de conserve"). Il y en a eu neuf au cours de ses quarante-six ans de missions.

 

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Frégate anti-sous-marine Georges Leygues (D640)

Première d'une série de sept unités du même type, la frégate Georges Leygues a été en service de 1979 à 2013. Elle est conserve de la Jeanne d'Arc de 1999 à 2009. (Modèle au 1/100)

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Pêle-mêle, encore quelques objets :

Renard de coupée de la Jeanne d'Arc
Le renard est un tableau de présence mis en place à la coupée lorsque le bâtiment est à quai. Il permet d'indiquer si la personne qui y figure est présente à bord ou non. Il est ici renseigné tel qu'il était lors de la première campagne de la Jeanne d'Arc.
Sextant réglementaire modèle 56
Instrument à réflexion servant à établir un point astronomique. Il est utilisé pour déterminer la position du navire hors de vue de terre en relevant la hauteur angulaire des astres au-dessus de l'horizon.
Micromètre Fleuriais modèle 1928
Instrument de mesure fonctionnant par images réfléchies, permettant de connaître la distance d'éloignement d'un bâtiment grâce à son tirant d'air (hauteur au-dessus de l'eau). Il est utilisé en navigation en formation serrée et lors des manœuvres de proximité.
Compteur différentiel Valessie provenant de la machine de la Jeanne d'Arc
Ce boîtier d'engrenages, connecté à l'arbre d'hélice, fournit des indications précises et commodes pour régler la vitesse moyenne de la machine pendant un temps donné. Il sert en particulier à ajuster exactement la vitesse du navire lors de certaines manœuvres (tenue de poste en ravitaillement à la mer, par exemple).
Inventeur: capitaine de vaisseau André Valessie (1827-1908)
Répétiteur de compas gyroscopique

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Les campagnes du porte-hélicoptères Jeanne d'Arc

Ce tableau résume les 45 campagnes de la dernière Jeanne.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

La Jeanne d'Arc, vitrine du savoir-faire français
Navire unique et à la pointe de la technologie lors de sa mise en service, la Jeanne d'Arc est, dès ses débuts, mise à contribution pour exposer les productions des industriels français du secteur naval et de l'aéronautique. Elle offre l'opportunité de faire valoir à l'étranger d'autres productions "made in France", comme les automobiles des constructeurs nationaux, prêtées au fil des campagnes et exposées sur le quai lors des escales. La haute couture et la mode française sont également mises en avant, à la faveur de défilés organisés à bord. Les réceptions sont l'occasion de faire découvrir aux nombreux invités la gastronomie française à travers les plats raffinés confectionnés par les cuisiniers du bord, et les buffets garnis de vins fins, fromages et de quelques spécialités bretonnes...

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Parmi les escales, celle à Cuba, en novembre 1998, avec la signature de Fidel Castro sur le Livre d'or de la Jeanne. La Jeanne et sa conserve venaient de participer à l'opération Cormoran, mission humanitaire déclenchée par la France suite au passage de l'ouragan Mitch.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

D'autres témoignages de satisfaction, l'un du commandement de la marine indonésienne, l'autre du chef d'état-major des armées, pour l'assistance apportée dans les opérations de secours aux victimes du tsunami de décembre 2004 sur la côte nord de Sumatra (opération Béryx).

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Un entretien privilégié assuré par l'arsenal brestois
Le porte-hélicoptères est fortement mobilisé par ses missions : pour qu'il reste opérationnel, des entretiens réguliers et rigoureux s'imposent. Ils sont réalisés à Brest, entre chaque campagne, par la DCAN, devenue la DCN et DCNS. Naval Group est aujourd'hui l'héritière de cette tradition industrielle. Ces entretiens génèrent une activité périodique importante pour l'arsenal. La Jeanne d'Arc bénéficie d'un traitement privilégié : un passage annuel au bassin, une inspection méticuleuse de toutes les pièces. Les savoir-faire déployés par les ouvriers de l'arsenal brestois expliquent l'exceptionnelle longévité du navire. L'entretien de la Jeanne d'Arc est un objet de fierté pour tous les personnels de l'arsenal. On mettait un point d'honneur à faire partir la Jeanne à l'heure.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

Terminons avec quelques souvenirs philatéliques de la Jeanne : correspondances oblitérées par le bureau postal de la Jeanne, carte de campagne avec oblitération des ports d'escale.
Les marins recevaient traditionnellement des cartes vierges en début de campagne qu'ils pouvaient oblitérer aux escales pour ramener un souvenir de campagne aux familles.

La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)
La Jeanne - Fille de Brest (1964-2010)

En guise de conclusion

Qu'est devenue la Jeanne d'Arc ?
Retirée du service actif le 7 juin 2010, la Jeanne d'Arc a été désarmée. Tous les matériels ont été débarqués, la mâture démontée et les soutes nettoyées. Après la dernière cérémonie des couleurs, le 1er septembre, la coque a été transférée à la base navale de Brest. Le 2 novembre, débaptisée, elle est devenue le Q860.
Elle a alors fait l'objet d'un appel d'offres pour son démantèlement. En octobre 2014, elle a été remorquée jusqu'à Bassens, près de Bordeaux, pour être déconstruite. Cette opération s'est achevée en 2017.

La Mission Jeanne d'Arc
Depuis 2010, le flambeau de l'École d'application a été repris par la « Mission Jeanne d'Arc ». Il n'y a plus de navire-école dédié et ce rôle est confié chaque année à l'un des trois porte-hélicoptères amphibie (PHA) de la Marine, Mistral, Tonnerre, et Dixmude. Il embarque les officiers-élèves pour une durée d'environ cinq mois.

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La vie culturelle à Saint-Pabu

20 Juillet 2024 , Rédigé par japprendslechinois

En ce début d'été, le temps très breton incite à s'intéresser à la vie culturelle locale.

Deux expositions se tiennent en ce moment à Saint-Pabu (Finistère), notre commune de villégiature. Dans la salle municipale Roz Avel est retracée l'histoire du festival Elixir, festival de rock qui a rassemblé des dizaines de milliers de participants et des artistes internationaux en Bretagne au début des années 1980, dont deux fois dans les dunes de Saint-Pabu en 1982 et en 1984. 

L'histoire du Festival Élixir

ÉLIXIR, ce nom brille comme une étoile dans la tête de ceux qui avaient 20 ans dans les années 80. La France ne connaît à l'époque qu'un seul grand festival en plein air. Et il a lieu dans le Finistère, au bout du monde, à quelques encablures de Brest. Huit années durant, les grands noms du rock viendront s'y produire : les Clash, Depeche Mode, Leonard Cohen, Simple Minds, The Stranglers, Joe Cocker, Nina Hagen, Orchestral Manoeuvres, Status Quo, Kid Créole, Siouxsie and the Banshees et tant d'autres. Mais la programmation d'Élixir c'est surtout un savant mélange entre têtes d'affiche et artistes émergents de l'époque qui se serviront du festival comme d'un tremplin. On y verra ainsi les premiers concerts européens des Stray Cats, Midnight Oil, The Waterboys, King Sunny Ade ou des Fuzztones.
Elixir créera ainsi le modèle de futurs festivals prestigieux : Les Vieilles Charrues, Fête du bruit, Le Bout du Monde entre autres. C'est l'histoire de ces huit années de festival, celle des hommes qui l'ont fondé, de 1979 à 1986, que cette exposition raconte avec photos, films et objets souvenirs.

La vie culturelle à Saint-Pabu
La vie culturelle à Saint-Pabu

Des photos du festival de 1982 à Saint-Pabu...

La vie culturelle à Saint-Pabu
La vie culturelle à Saint-Pabu

Des panneaux évoquent les six festivals Elixir, qui se sont tenus de 1979 à 1985 à Irvillac (Finistère),  Plounéour-Trez (Finistère), Plomodiern (Finistère), Guéhenno (Morbihan) et deux fois à Saint-Pabu :

La vie culturelle à Saint-Pabu
La vie culturelle à Saint-Pabu

Il y eut encore deux autres festivals de cette nature au cours des deux années suivantes à Guehenno et à Brest ; pour des questions de marque déposée, ils ont dû changer de nom pour Rockscène. L'exposition ne le précise pas, mais un des organisateurs de l'exposition, bénévole de l'époque, m'a indiqué que l'édition suivante, qui était organisée non plus dans le Finistère mais à Athènes (en Grèce!) a été un fiasco et a ruiné les promoteurs de ce festival.

La vie culturelle à Saint-Pabu

L'autre exposition, plus traditionnelle, est organisée en plein air, le long de la côte. Elle est cette année consacrée à un peintre slovaque, Peter Sojka.

La vie culturelle à Saint-Pabu

Le tableau 1 domine la plage de Corn-Ar-Gazel, à l'ouest

La vie culturelle à Saint-Pabu
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La tableau 2 également, mais au sud de la plage

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 3, un peu plus haut, près de la Maison des Abers (Ti an Aberioù)

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 4 est près de la table d'orientation à l'est de la plage de Korn-Ar-Gazel, lieu de prédilection des parapentes

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 5 surplombe le parking de la plage de Béniguet

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 6 surplombe la plage de Béniguet, côté est

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 7 est sur le chemin qui descend à la plage de Ganaoc'h

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le long du sentier qui remonte vers le Stellac'h, le tableau 8

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Le tableau 9 est accroché aux bâtiments portuaires sur le quai du Stellac'h

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Il faut ensuite remonter le long de l'Aber Benoît jusqu'au petit Pors Ar Vilin pour découvrir le tableau 10

La vie culturelle à Saint-Pabu
La vie culturelle à Saint-Pabu
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Exception au parcours sur le GR 34, le dernier tableau (11) se trouve sur la place principale de Saint-Pabu, près de la reproduction de la balise fétiche de la localité, Le Chien.

La vie culturelle à Saint-Pabu
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Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

13 Juillet 2024 , Rédigé par japprendslechinois

Une exposition originale vient de se terminer au Musée d'Orsay. Comme de temps à autre, le musée offre un espace à un artiste contemporain pour un dialogue avec les toiles du musée. (cf notre billet du 6 janvier 2024 consacré à Peter Doig).

Il s'agit cette fois d'une artiste plus jeune et moins bankable, Nathanaëlle Herbelin, née en 1989. Selon les organisateurs, "fréquentant assidûment les collections du musée d’Orsay depuis l’enfance, l’artiste franco-israélienne Nathanaëlle Herbelin est invitée à mettre en perspective ses toiles et ses sources d’inspiration. Héritière des Nabis, l’artiste remet au goût du jour leurs sujets de prédilection – la vie quotidienne, les intérieurs domestiques et l’intimité, dans des compositions qui n’en sont pas moins résolument contemporaines.

Si la touche subtile de l’artiste, sa palette chromatique et ses motifs de prédilection nous rappellent Pierre Bonnard, Édouard Vuillard ou Félix Vallotton, d’autres détails figuratifs nous ramènent à la réalité la plus contemporaine : grâce à la présence de particularités actuelles (téléphones portables ou câbles d’alimentation électrique) dans ces scènes de genre réactualisées, mais aussi en transposant des préoccupations de notre temps sur ces compositions. Ses œuvres évoquent en effet des sujets de société contemporains tels que les nouvelles dynamiques du couple, les questions de la pilosité ou du plaisir féminin, voire une réponse plus directe au male gaze du XIXe siècle, par un female gaze novateur en peinture."

Dans la première salle, les œuvres de Nathanaëlle Herbelin sur les murs longitudinaux :

Autoportrait, 2018, huile sur bois
Emmanuelle et Efi, 2024, huile sur toile
Sœurs, 2022, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Sa chambre, 2019, huile sur toile
Paysage mental, 2021, huile sur toile
Layla, 2021, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Allaitement, 2024, huile sur toile
Cloison, 2020, huile sur bois
Adva, 2021, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Elené et le bébé, 2022, huile sur toile
Madeleine et Clément, version 2, 2020, huile sur toile
Câlin, 2021, huile sur toile
Redhook cocktail, 2023, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Jérémie au bain, 2023, huile sur toile
Être ici est une splendeur, 2022, huile sur toile
Pince à épiler, version 2, 2024, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

En regard, surtout des œuvres de Pierre Bonnard (1867-1947) :

Nu au gant bleu, 1916, huile sur toile
Étude de nus, 1910, huile sur toile
Nu accroupi au tub, 1918, huile sur toile
 

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Ambroise Vollard, vers 1904, huile sur toile, esquisse
La Femme au chat, vers 1912, huile sur toile
La Manucure, 1912, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

et aussi :

Félix Valloton (1865-1925) : Femmes à leur toilette, 1897, huile sur carton

Édouard Vuillard (1868-1940) : 
Le Salon aux trois lampes, rue Saint-Florentin, 1899, peinture à la colle sur papier marouflé sur toile
Les Journaux, 1909, peinture à la colle sur papier marouflé sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Dans la deuxième salle, cinq grands tableaux de Nathanaëlle Herbelin :

Augustan, 2022, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Attention non divisée, 2023, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

La Chambre sacrée des Érythréens de Levanda I, dernier étage, porte 22 Esquisse, 2020, huile sur bois

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Cour intérieure, 2020, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Le Canapé de l'amour, 2022, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

En regard, Bonnard toujours le plus présent :

La Loge, 1908, huile sur toile
Les Frères Bernheim-Jeune, 1920, huile sur toile
L'Après-midi bourgeoise, 1900, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Femme assoupie sur un lit, 1899, huile sur toile
La Soirée sous la lampe, 1921, huile sur toile

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur
Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Valloton : Le Dîner, effet de lampe, 1899, huile sur carton marouflé sur bois

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

et enfin Vuillard :

La Véranda du Coadigou à Loctudy, Marcelle Aron et Marthe Mellot, 1912, huile sur toile
Madame Hessel lisant le journal devant la cheminée - I, 1917, peinture à la colle sur papier

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Et pour finir, une présentation sur tout un mur de la salle de tableaux de petites dimensions, mêlant des œuvres de Nathanaëlle Herbelin et des œuvres de la collection du musée d'Orsay qui ont inspiré l'artiste.

Nathanaëlle Herbelin - Être ici est une splendeur

Cette mosaïque de 30 petits tableaux en comprend 17 de Nathanaëlle Herbelin et 13 de différents peintres, principalement des nabis.

Parmi celles de l'artiste :
 

Sœur, 2019, huile sur bois, 22 × 36 cm

Cécilia, 2021, huile sur bois, 22,5 × 16 cm

Fuite et Confinement, 2020, huile sur toile, 27 × 25 cm

Shemesh, version 1, 2019, huile sur bois, 19 × 16 cm

Huile sur toile, 2020, huile sur toile, 24 × 30 cm

Sataf, 2018, huile sur bois, 38 × 46 cm

Dernier dîner à la rue Ordener, 2024, huile sur bois, 24 × 19 cm

Les Mains d’Elené, 2017, huile sur bois, 24 × 28 cm

Coupe au couloir, 2021uile sur bois, 
30,5 × 22,5 cm

Quelques unes des œuvres mises en regard dans cette mosaïque :

Paul Ranson : Lustral, 1891, tempera sur toile, 35 × 24 cm

Meijer De Haan : Nature morte au lilas, 1890, huile sur toile, 39,8 × 32,2 cm

Pierre Bonnard : 

Nature morte : assiette et fruits, 1921, huile sur toile, 41,3 × 50,5 cm
Le Chat blanc, 1894, huile sur carton, 51,9 × 33,5 cm

 

Édouard Vuillard :

Le Sommeil de Madame Vuillard, vers 1891-1892, huile sur toile, 24 × 33 cm
Le Bureau, vers 1896, huile sur toile, 24,8 × 32,6 cm
La Visite, vers 1891, huile sur toile, 18 × 22,7 cmJeune fille, la main sur la poignée de la porte, vers 1891, huile sur carton, 32 × 22,8 cm

 

 

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Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)

6 Juillet 2024 , Rédigé par japprendslechinois

Nous terminons dans ce billet le parcours de la grande exposition du musée d'Orsay, dont la première partie est parue le 22 juin dernier.

La salle suivante est intitulée  Convergences
En 1874, le Salon, tout comme la première exposition dite « impressionniste » – dont il diffère apparemment en tout point, par son échelle et ses principes d’organisation – montre des œuvres offrant une certaine vision du présent. Cette institution séculaire n’est plus la vitrine d’un art exclusivement académique ; des œuvres tout à fait radicales, comme Le Chemin de fer de Manet y trouvent leur place. Manet, invité quelques semaines auparavant par ses confrères à exposer avec eux au 35 boulevard des Capucines, refuse obstinément, car il ne veut pas s’abstraire du Salon – selon lui le seul véritable champ de bataille pouvant mener au succès. Tous les artistes qui en sont rejetés – comme Eva Gonzalès, avec une peinture de la vie moderne –, ne rallient pas pour autant l’exposition indépendante. Enfin, pas moins de douze artistes préfèrent multiplier leurs chances d’être vus, et de vendre, en présentant simultanément des œuvres à l’exposition de la Société anonyme et au Salon. Même parmi les futurs impressionnistes, tous ne sont pas définitivement « revenus » du Salon; beaucoup y retourneront quatre ou cinq ans plus tard. Outre deux importants tableaux « refusés », cette section rassemble les œuvres d’artistes présents à la fois à la première exposition impressionniste et au Salon de 1874. La ligne de partage entre tradition et avant-garde est, en 1874, encore très poreuse.

Stanislas Lépine (1835-1892) :
Le Canal Saint-Denis, vers 1876-1882, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, substitut au n° 81]
Paysage, 1869, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 83]
Montmartre, rue Saint-Vincent, 1873-1878, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874,substitut au n° 82]

Avec Lepic et De Nittis, Lépine fait partie des douze artistes exposant, en 1874, à la fois avec les impressionnistes et au Salon, dont il est un habitué (il s'agit de sa douzième participation). Dans ces deux expositions, ce fin paysagiste, élève de Corot, et peintre attitré de Paris, montre des œuvres aux sujets semblables : vues des bords de Seine, canaux de la capitale et alentour, rue escarpée de Montmartre ouvrant sur ses versants boisés. L'exposition chez Nadar offre à Lépine, alors en proie à des difficultés financières, de diffuser plus largement son travail. Pour ses organisateurs, ces tableaux « sains et paisibles », « plus modérés et non moins vaillants » (selon les critiques) tempèrent opportunément les audaces de ses confrères.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Giuseppe De Nittis (1846-1880 :
Éruption du Vésuve, 1872, huile sur bois [Première exposition impressionniste, 1874, substitut au no 116]
Sur les pentes du Vésuve, 1872, huile sur bois [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 117]
Sur les pentes du Vésuve, 1872, huile sur bois [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 117]
Route en Italie, 1870, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, probable n° 118 bis]
Avenue du bois de Boulogne, 1874, huile sur toile [Refusé au Salon, 1874]
Dans les blés, 1873, huile sur bois [Salon, 1874, n° 1394]

D'un côté, d'austères paysages d'Italie - une route quasi- déserte, ou les flancs arides du Vésuve, directement observés par l'artiste au plus près du volcan ; de l'autre, de très raffinées parisiennes en promenade mondaine, aux champs ou en ville. De Nittis, peintre et graveur italien installé en France depuis plusieurs années, semble avoir mûrement réfléchi ses envois à l'exposition impressionniste d'une part, et au Salon d'autre part.
 

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Ludovic Napoléon Lepic (1839-1889) : Le Déluge ; volets de gauche et de droite, 1874, huile sur toile [Salon, 1874, no 1186]
Le triptyque exposé par Lepic au Salon de 1874 a pour thème le Déluge, quand Noé envoie des oiseaux s'assurer de la baisse des eaux : un corbeau, qui s'attarde à se nourrir; puis une colombe, qui rapporte une branche d'olivier, indice de la décrue. Le vicomte Lepic se conforme ici, un peu malgré lui, au goût du Salon pour la grande peinture religieuse : il y trouve l'occasion de peindre des animaux, sa vraie passion.

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Éva Gonzalès (1847-1883) :
La Matinée rose, 1874, pastel sur papier et châssis entoilé [Salon, 1874, n° 2180]
Une loge aux Italiens, vers 1874, huile sur toile [Refusé au Salon de 1874]

Éva Gonzalès peint des scènes de genre modernes. Les qualités de « grâce » du pastel La Matinée rose charment le jury, qui accepte cette jolie nichée. Dans Une loge aux Italiens, elle peint avec une technique large et fluide, accentuant les forts contrastes de lumière. Élève de Manet, cherchant elle aussi le succès officiel, Gonzalès soumet ce tableau au Salon de 1874, en vain. Son allégeance à la peinture franche de Manet lui nuit sans doute, d'autant que le tableau contrevient à l'idée préconçue d'une peinture féminine et délicate. Gonzalès n'envisage pourtant pas de le montrer à l'exposition des impressionnistes, mais elle annonce dans la presse qu'il sera visible.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Edouard Manet (1832-1883) :
Le Bal de l'Opéra, 1873, huile sur toile [Refusé au Salon de 1874]
Polichinelle, 1874, lithographie [Salon, 1874, possible n° 2357]
Le Chemin de fer, 1873, huile sur toile [Salon, 1874, no 1260]

Manet, pressé par ses amis, dont Degas, d'exposer avec eux, refuse. Fort de son succès au Salon en 1873, il reste déterminé à y entrer « par la grande porte » et soumet au jury trois peintures ; Le Chemin de fer est accepté. Ce « double portrait ébauché en plein soleil », selon le critique Burty, place contre une grille, à l'arrière de la gare Saint-Lazare, une jeune femme nous fixant du regard et une fillette, de dos, captivée par le panache de vapeur d'une locomotive. Avec ses couleurs claires, sans ombres ni demi-tons, et son cadrage ramassé, le tableau est d'une modernité fracassante. Au Salon, à côté d'une composition mythologique et du très sage Dans les blés de De Nittis, il détonne. Il devient la risée du public.

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La vie moderne comme motif

En 1863, le poète Charles Baudelaire fait de la «modernité» – un mot apparu au xixe siècle – une composante du beau. Industrialisation, mondialisation, urbanisation : tout change rapidement. À l’exposition de 1874, une trentaine de tableaux font écho à ces évolutions et à l’avènement d’un mode de vie urbain et bourgeois, de la sphère domestique aux rues de Paris rénovées, en passant par le développement des loisirs et des lieux de spectacle. En dehors de Degas, qui montre une blanchisseuse en plein travail, les impressionnistes peignent surtout la «high life », comme on dit alors pour désigner la haute société. Au Salon aussi, on peut voir des scènes de la vie moderne, mais souvent abordées de manière anecdotique ou moralisatrice. Pour les impressionnistes, le temps présent n’est pas seulement un réservoir de sujets nouveaux. C’est une manière neuve de voir et de peindre un monde en proie à l’accélération du temps et en perpétuel mouvement. Ils rapprochent ainsi l’art de la vie.

Henri Fantin-Latour (1836-1904) : Fleurs et objets divers, 1874, huile sur toile [Salon, 1874, no 702]
Fantin-Latour s'est imposé au Salon avec de grands portraits collectifs d'artistes et intellectuels de l'avant-garde, figurant notamment Manet, Bazille, Renoir et Monet. En 1874, on se serait donc attendu à le retrouver aux côtés des impressionnistes. Mais Fantin est tout à fait réticent à les rejoindre; il contribuera sans doute aussi à en dissuader Manet.
 

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Jules Émile Saintin (1829-1894) : Blanchisseuse de lin, 1874, huile sur toile [Salon, 1874, n° 1623]
Aujourd'hui oublié, Saintin expose régulièrement au Salon des peintures de genre comme celle-ci. Plutôt que d'évoquer les difficiles conditions de travail de la blanchisseuse, le peintre préfère s'emparer du stéréotype de la jeune aguicheuse, jouant ainsi de la réputation de petite vertu dont souffraient ces ouvrières.

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Ernest Duez (1843-1896) : Splendeur. Panneau de diptyque, 1874, huile sur toile [Salon, 1874, n°644]
En 1874, ce portrait grandeur nature d'une jeune femme aux cheveux teints et à l'élégance tapageuse, qui n'est autre qu'une prostituée, est remarqué. Splendeur côtoie un second portrait de cette même femme, vieillie, déchue, intitulé Misère (tableau aujourd'hui disparu). L'intention est moralisatrice. Duez, par ailleurs collectionneur des impressionnistes, se fait ici l'écho d'une réalité sociale marquante du Paris des années 1870

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Edgar Degas (1834-1917) : La Repasseuse, 1869, fusain, craie blanche et pastel sur papier [Première exposition impressionniste, 1874, n° 61]
Blanchisseuses et repasseuses sont très présentes dans le Paris de la seconde moitié du XIXe siècle. La croissance de la population et les nouvelles exigences d'hygiène contribuent à l'essor de ces métiers pénibles, surtout féminins. Degas a saisi en quelques traits le geste mécanique et la lassitude d'une jeune fille repassant un voilage. À l'exposition de 1874, ce tableau est le seul à représenter le monde du travail.
 

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Berthe Morisot (1841-1895) : 
Sur la falaise, 1873, aquarelle et rehauts de gouache sur traits de crayon [Première exposition impressionniste, 1874, no 110]
Vue du petit port de Lorient, 1869, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, probable n° 107]
Jeune femme dans un paysage, 1872, aquarelle et rehauts de gouache sur traits de crayon [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 111]
La Lecture, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 105]
Berthe Morisot (1841-1895)
Cache-cache, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 106]
Morisot saisit un moment de jeu entre sa sœur Edma et sa fille aînée. La famille se retrouve à la campagne, à Maurecourt, un village situé au nord-ouest de Paris (visible à l'arrière-plan). La touche, rapide, accorde une même importance au paysage et aux personnages. En 1874, ce tableau est prêté par Édouard Manet, qui, ayant refusé de participer à l'exposition, manifeste ainsi son soutien à Morisot.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Camille Pissarro (1830-1903) : Le Jardin de la ville, Pontoise, 1874, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 139]
Peut-être exposé en 1874, ce paysage urbain est un tableau à part dans l'oeuvre de Pissarro, qui préfère peindre la campagne. Il représente un jardin public créé au XIXe siècle au cœur de la petite ville de Pontoise, où le peintre s'est installé.

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Auguste de Molins (1821-1890) :
La Chasse à courre, 1874, huile sur panneau [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 93 ou n° 94]
Rendez-vous de chasse, 1874, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 93 ou n° 94]

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Eugène Boudin (1824-1898) :
À Trouville, 1868, aquarelle et mine de plomb [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
Plage à Trouville, vers 1865-1867, aquarelle et mine de plomb [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
La Plage à Trouville, 1869, aquarelle sur traits de crayon noir [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
Dans les prés, 1865, aquarelle et mine graphite [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
Scène de bord de mer, vers 1865, aquarelle et mine graphite [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
Plage à Trouville, vers 1865, aquarelle et mine graphite [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 22 - Cadre d'aquarelles]
À partir des années 1860, le tourisme balnéaire prend son essor en Normandie. À Trouville et à Deauville, Boudin se fait le témoin de ces nouveaux rituels sociaux. Il exécute des milliers d'aquarelles de « plages ». Le dessin rapide et les taches de couleurs diluées restituent avec vivacité les silhouettes des citadins élégants en bord de mer.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Edgar Degas : Aux courses en province, vers 1869, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, no 63]
Probablement peint en Normandie, ce tableau « exquis », selon un critique en 1874, avait été acquis deux ans auparavant par le chanteur et collectionneur Jean-Baptiste Faure, et avait été montré à Londres. Ce sujet de la course hippique, loisir très en vogue, est cher au peintre. Il est ici relégué à l'arrière-plan, au profit de la figure de la nourrice allaitant le nouveau-né de bourgeois élégants, amis du peintre, les Valpinçon. Degas désignait parfois cette œuvre comme « la famille aux courses ».

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Henri Rouart (Paris, 1833-1912) : La Terrasse au bord de la Seine à Melun, 1874, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, probable n° 150]

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L’école du plein-air
C’est sous cette bannière que le critique Ernest Chesneau rassemble certains des participants à l’exposition de la Société anonyme de 1874. Cette manière de peindre rapidement, sur le motif, la nature et les effets changeants de l’atmosphère, se pratique pourtant depuis la fin du XVIIIe siècle. Cependant les impressionnistes innovent, car s’ils n’exécutent pas intégralement leurs tableaux en extérieur, ils placent au cœur du processus de travail de l’œuvre aboutie ce qui n’était pour leurs prédécesseurs qu’un exercice, une étape préparatoire. L’importance accordée au paysage par Monet, Sisley et Pissarro reflète aussi un goût plus général. Depuis le milieu du xixe siècle, au Salon comme sur le marché de l’art, le paysage s’affirme comme le «genre moderne», dans l’esprit du temps. Chintreuil et Daubigny, peintres de la génération précédente, présents au Salon en 1874, revitalisaient déjà une production de paysages en phase avec la nostalgie du public pour une vue comme éternelle et intacte, au moment-même où la nature est menacée par l’urbanisation et l’industrialisation.

Claude Monet (1840-1926) : Coquelicots, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 95]

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Charles François Daubigny (1917-1878) : Les Champs au mois de juin, 1874, huile sur toile [Salon, 1874, n° 52?]
Au Salon, Daubigny montre deux grands paysages des environs de Valmondois dans l'Oise, Celui-ci frappe par les coquelicots du premier plan, si éclatants que l'ami Corot les juge «aveuglants» et que ceux de Monet, peints l'année précédente, paraissent bien doux. Depuis les années 1850, Daubigny rencontre le succès en peignant des «Impressions», au grand dam de certains critiques. En 1874, Paysage du mois de juin, pose Daubigny en précurseur des impressionnistes. Dès 1870, il manifeste un précieux soutien aux impressionnistes, en les mettant en contact avec Paul Durand-Ruel, qui sera leur principal marchand.
Antoine Chintreuil (1814-1873) : Le Bosquet aux chevreuils, après 1857, huile sur toile [Salon, 1874, no 387]
Mort en 1873, Chintreuil bénéficie d'une rétrospective à l'École des Beaux-Arts, tandis que le Salon lui rend hommage avec trois tableaux, dont celui-ci.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Camille Pissarro (1830-1903) :
Matinée de juin, Pontoise, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 140]
Gelée blanche, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 137]
Verger en fleurs, 1872, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 136]

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Paul Cézanne (1839-1906) : La Maison du pendu, Auvers-sur-Oise, vers 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, no 42]

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Antoine Guillemet (1841-1918) : Bercy en décembre, 1874, huile sur toile [1874 Salon, 1874, n° 878]
Cette vue panoramique de la Seine à l'Est de Paris par une froide lumière d'hiver aurait pu figurer à l'exposition des impressionnistes, en raison de son réalisme et de l'importance accordée aux effets atmosphériques, ainsi qu'aux jeux de lumière à travers les nuages. Guillemet est en outre un ami des impressionnistes. Ce tableau est pourtant acheté par l'État au Salon de 1874 et exposé au musée du Luxembourg, le musée des artistes vivants, un choix se révélant plus éclectique que conservateur.

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Alfred Sisley (1839-1899) :
Pommiers en fleur - Louveciennes, 1872, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 164]
La Machine de Marly, Bougival, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, probable n° 163]
Le Bac de l'île de la Loge, Port-Marly, inondation, 1872, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 162]
Port-Marly, Gelée blanche, 1872, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 185]

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Claude Monet : Le Havre, bateaux de pêche sortant du port, 1874, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 96]

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Armand Guillaumin (1841-1927) : Soleil couchant à Ivry, 1873, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, no 66]

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Faire sensation : « Impression » et avant-garde
Impression, soleil levant a-t-il vraiment donné son nom à l’impressionnisme en 1874 ? C’est à la fois vrai et faux. Le titre du tableau a en effet inspiré, avec d’autres paysages de Monet, Pissarro et Sisley, le mot « impressionniste» au journaliste Louis Leroy, ironisant sur cette nouvelle peinture. Mais, hormis ce sarcasme, le mot ne s’impose pas encore et le tableau, passé à peu près inaperçu en 1874, ne devient célèbre qu’au début du XXe siècle. Avec cette « impression », Monet transgresse les usages. Il affirme ainsi son désir de transcrire un effet fugitif de la lumière, une sensation subjective, plutôt que de décrire un lieu. Cette intention était probablement renforcée par la présence dans l’exposition de 1874 de pastels accrochés à proximité et d’études de ciel de son maître, Eugène Boudin, car, contrairement aux usages du Salon officiel, les impressionnistes exposaient ensemble dessins et peintures. Cette quête d’instantanéité ne signifie pas que les tableaux impressionnistes sont peints en une seule fois sur le motif. Impression, soleil levant a réclamé plusieurs séances. Il s’agit pourtant de préserver, y compris quand l’œuvre est retravaillée en atelier, la fraîcheur de la sensation première, de donner l’impression d’une impression

Claude Monet : Impression, soleil levant, 1872, huile sur toile [Première exposition impressionniste, 1874, n° 98]

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Eugène Boudin (1824-1898) :
Nuages blancs, ciel bleu, vers 1854-1859, pastel sur papier bleu-gris [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 20 - Cadres de pastels]
Ciel bleu, nuages blancs, vers 1854-1859, pastel sur papier bleu gris [Première exposition impressionniste 1874, possible n° 20 - Cadres de pastels]
Soleil couchant ou ciel d'orage, vers 1959-1960, pastel sec sur papier vergé crème [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 20 - Cadres de pastels]

C'est dans l'atelier du peintre Boudin, à Honfleur (Normandie), que le poète Charles Baudelaire découvre en 1859 ses études de ciels. Ces « beautés météorologiques », « improvisées face à la mer », captant « ce qu'il y a de plus inconstant, de plus insaisissable », l'émerveillent. Monet, initié à la peinture de plein air par Boudin, sera lui aussi « fasciné par ces pochades, filles de ce que j'appelle l'instantanéité ». Ces études circulaient entre les artistes, mais n'étaient pas destinées à être montrées au public. En 1874, son envoi de quatre « études de ciels » affiche une quête qui n'est pas sans rappeler les recherches des impressionnistes, et cela alors que Boudin refusera toujours d'être associé à un groupe.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Claude Monet :
Soleil couchant, vers 1865, pastel sur papier gris [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 99, n° 100 ou n° 101]
Coucher de soleil, 1868, pastel [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 99, ou n° 100, ou n° 101]
Paysage (Paysage Crépuscule), vers 1865, pastel sur papier gris [Première exposition impressionniste, 1874, possible n° 99, ou n° 100, ou n° 101]

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Terminons ce billet avec la dernière salle de l'exposition, qui prend un peu le large par rapport à l'année 1874.

1877 : l’exposition des impressionnistes
Le 4 avril 1877, la troisième exposition des impressionnistes ouvre ses portes, grâce à la détermination et au financement de Gustave Caillebotte, recrue récente, à la fois peintre et mécène. Elle succède aux expositions de 1874 et de 1876. Décevantes d’un point de vue commercial, elles ont néanmoins installé l’idée qu’un mouvement nouveau était né. Ainsi, pour la première et unique fois, les artistes qui exposent en ce printemps 1877 se proclament «impressionnistes ». Ils publient même un journal sous ce titre. Dans un vaste appartement parisien situé au 6 rue Le Peletier sont présentées 245 œuvres de 18 artistes dont deux femmes, Berthe Morisot et la marquise de Rambures, une amie de Degas. Par son exceptionnelle qualité et la primauté accordée à la célébration de la vie moderne, l’édition de 1877 restera peut-être la plus impressionniste de toutes ces expositions. Cinq autres manifestations collectives suivront jusqu’en 1886, mais aucune n’aura la force d’un manifeste.

Claude Monet : La Gare Saint-Lazare, 1877, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 102]
Monet, qui a passé son enfance en Normandie et vit alors à Argenteuil, est un usager assidu de la gare Saint-Lazare. Manet l'avait évoquée dans Le Chemin de fer (Salon de 1874). Deux ans plus tard, Monet décline ce sujet en douze tableaux, donnant à ces «cathédrales» de l'âge industriel la «poésie» appelée de ses vœux par Zola. La répétition d'un motif jugé indigne de la grande peinture, et la présentation, en 1877, d'un ensemble de sept «Gares», marquent une rupture. Monet amorce ce qu'il appellera des «séries»: des groupes de toiles conçues comme un tout, centrées sur un même motif (des meules, des cathédrales...) variant selon la lumière des jours et des saisons.

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Claude Monet : 
Un coin d'appartement, 1877, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 115]
Les Tuileries, vers 1876, huile sur bois [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 105]
Les Dindons (décoration non terminée), 1877, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 101]
Ce grand format fait partie d'un décor en quatre panneaux commandé par Ernest Hoschedé, l'un des premiers collectionneurs des impressionnistes, pour sa propriété dans l'Essonne, le château de Rottembourg. La bâtisse est visible à l'arrière-plan. En 1877, Monet montre deux de ces toiles. Les Dindons est particulièrement moqué pour ses teintes criardes et le caractère inachevé des volatiles. La peinture impressionniste est alors parfois considérée comme « décorative », dans un sens négatif, c'est-à-dire superficielle. Avec ces Dindons, qu'il nomme «décoration non terminée», Monet commet aux yeux des critiques une double offense.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)

Camille Pissarro  : 
La Moisson, 1876, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 180]
Les Toits rouges, coin de village, effet d'hiver, 1877, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 163]
Installé à Pontoise depuis 1873, Pissarro arpente la petite ville et ses abords encore agricoles et champêtres. Il s'intéresse ici à la Côte des Bœufs, ou Côte de Saint-Denis, où certaines fermes anciennes semblent se tenir à l'écart des bouleversements du siècle. Le paysage, dénué de toute présence humaine, est construit avec une rigueur presque abstraite. La ligne d'horizon très haute laisse ainsi les trois quarts de la surface de la composition à la colline, aux maisons et aux arbres dénudés par l'hiver. Les touches sont si denses, intriquées et épaisses, qu'en 1877 certains comparent le tableau à une tapisserie.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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Edgar Degas (1834-1917) : Portrait de jeune femme, 1867, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, possible n° 53 ou n° 54]

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Gustave Caillebotte (1848-1894) : Peintres en bâtiment, 1877, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 6]
Pour sa deuxième participation à une exposition impressionniste, après celle de 1876, Caillebotte poursuit l'exploration de thématiques urbaines. Avec Degas, il est l'un des rares à s'intéresser au monde du travail, ici des ouvriers peignant la devanture d'un magasin. La perspective accélérée de la rue, coupée au cordeau, est caractéristique du Paris remodelé à la suite des grands travaux du baron Haussmann. L'impression de froideur géométrique est le fruit de patientes études préparatoires, une méthode de travail qui distingue Caillebotte des autres impressionnistes.

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et pour finir, Auguste Renoir (1841-1919) :
La Seine à Champrosay, 1876, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 195]
La Balançoire, 1876, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 185]
La Balançoire a pour cadre le jardin de la maison louée par Renoir, rue Cortot à Montmartre, proche du moulin de la Galette, sujet du tableau sur lequel il travaille en ce même été 1876. Jeanne, une Montmartroise habituée du bal, pose sur une balançoire, entourée par une fillette et deux hommes conversant. « Quel calme, quelle sérénité dans ce tableau!», s'enthousiasme Georges Rivière, journaliste et ami de Renoir, qui reproduit l'œuvre en couverture de la revue L'Impressionniste. Certains critiques sont cependant choqués par le rendu des ombres, des taches mauves et bleues parsemant la robe.

Bal du moulin de la Galette, 1876, huile sur toile [Troisième exposition impressionniste, 1877, n° 186]
Renoir transpose aux dimensions de la peinture d'histoire un bal populaire de la Butte Montmartre, où bourgeois et artistes bohèmes se mêlent aux ouvriers. Le pinceau rapide et les taches de couleurs traduisent la frénésie de la danse et le plaisir d'être ensemble. Tout à la fois scène de la vie moderne et hommage aux maîtres du XVIIe siècle français, ce tableau est pour Zola le morceau capital de l'exposition de 1877. Cette «grande toile d'une intensité de vie extraordinaire» fait sensation. Elle est commentée dans une vingtaine d'articles de presse et sera achetée par l'ami Gustave Caillebotte.

Paris 1874 - Inventer l'impressionnisme (II/II)
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